Viktor Orban à l’ombre du coronavirus

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Le premier ministre hongrois Viktor Orban au Parlement, à Budapest, le 30 mars.
Le premier ministre hongrois Viktor Orban au Parlement, à Budapest, le 30 mars. ZOLTAN MATHE/AFP

Editorial du « Monde ». La tentation est trop forte. Pour les autocrates, les situations exceptionnelles, lorsque l’incertitude règne et que la population s’angoisse, sont propices au renforcement de leur contrôle. Le président chinois, Xi Jinping, a profité de la lutte contre le coronavirus pour étendre les systèmes de surveillance de masse ; la Russie de Vladimir Poutine, avec quelques semaines de retard, semble vouloir emprunter le même chemin. Le premier ministre hongrois, Viktor Orban, lui, a choisi une autre stratégie : lundi 30 mars, il a obtenu le feu vert du Parlement, où il détient une large majorité, pour légiférer par décret en vertu de l’état d’urgence, pour une durée indéterminée.

Viktor Orban peut, à juste titre, rétorquer que la Hongrie n’est pas le seul pays à avoir pris des dispositions institutionnelles d’urgence face à la crise sanitaire provoquée par la pandémie. Mais les autres ont posé des limites dans le temps à ces mesures ; en France, l’état d’urgence sanitaire permet au gouvernement de légiférer par ordonnances pendant deux mois.

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La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a jugé utile de rappeler, mardi, que les mesures d’urgence prises par les Etats membres dans le cadre de la lutte contre la pandémie « doivent être limitées à ce qui est nécessaire » et être « strictement proportionnées ». Ces mesures, a-t-elle précisé, « ne doivent pas durer indéfiniment ».

Une communauté de valeurs

Mme von der Leyen a également appelé au « respect de la liberté d’expression » et a souligné que « la démocratie ne peut pas fonctionner sans des médias libres et indépendants ». Une disposition du texte adopté lundi à Budapest, où les médias publics sont étroitement contrôlés, inquiète particulièrement les journalistes indépendants, souvent accusés de diffuser des « fake news » : elle rend passible de cinq ans d’emprisonnement la « propagation de mensonges ou de vérités déformées » sur la pandémie. La Russie a adopté, mardi, une disposition similaire.

Le gouvernement hongrois a rejeté les critiques, à l’intérieur et à l’extérieur, et a assuré que les mesures exceptionnelles prendraient fin lorsque la pandémie serait maîtrisée – mardi, la Hongrie avait enregistré 447 cas de Covid-19 et 15 morts. Le meilleur moyen de parer aux critiques aurait été de fixer, comme les autres pays européens, une limite dans le temps à ces mesures, renouvelables par le Parlement en fonction de l’évolution de la situation.

A la différence de la Chine et de la Russie, la Hongrie est membre de l’Union européenne. Elle a rejoint librement, en 2004, une communauté d’Etats qui se veut bien plus qu’un marché unique et une machine à dispenser des fonds structurels ; c’est aussi une communauté de valeurs, dans le respect de l’Etat de droit et des libertés.

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M. Orban ne serait pas soupçonné de vouloir accroître son pouvoir personnel s’il ne s’était lui-même proclamé chantre de la « démocratie illibérale » et s’il n’avait, depuis dix ans, régulièrement défié l’Etat de droit et réduit le champ de la liberté d’expression. Le rappel à l’ordre de la Commission européenne est le bienvenu. Il ne suffira pas.

L’Union européenne a actuellement d’autres urgences, mais la question de la protection que procure à M. Orban le maintien de son parti, le Fidesz, au sein du groupe parlementaire européen de centre droit, aux côtés de la CDU d’Angela Merkel et du parti français Les Républicains, doit se poser une fois pour toutes. Il n’a été que suspendu. La démocratie, elle, ne peut pas être suspendue par le coronavirus.

Le Monde

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