Une révision de la Constitution de Maurice s’impose

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Notre Constitution a été élaborée à une époque coloniale.

Notre Constitution a été élaborée à une époque coloniale.

«À Maurice, il faut une majorité de trois quarts pour pouvoir changer la Constitution. En revanche, dans d’autres pays du Commonwealth, c’est deux tiers», déclare d’emblée Jocelyn Chan Low, historien et ancien doyen de la faculté de Social Studies & Humanities à l’université de Maurice (UoM).

Selon lui, ces clauses fondamentales viennent protéger les minorités. De plus, un amendement apporté en 1982 par le Mouvement militant mauricien préconise la tenue d’un référendum à cet escient. «Donc, tout est verrouillé pour le moindre gros changement constitutionnel qu’on voudrait apporter.»

Pour Kris Valaydon, juriste, les changements majeurs de la Constitution se font lors des grandes mutations au niveau du système politique, du gouvernement ou des institutions. En somme, l’enjeu national doit avoir un impact sur la vie de la population. «Des changements au système politique peuvent intervenir après une révolution ou plus pacifiquement, comme par exemple par voie électorale et lorsque l’adoption d’un nouveau texte constitutionnel est plébiscitée par la population

En fait, précise Kris Valaydon, la révision n’est pas une simple substitution d’une ancienne Constitution par une nouvelle. Elle peut être faite à tout moment pour mettre fin à une ambiguïté ou une incohérence en termes de droits. D’après le juriste, la Constitution de Maurice pose un «problème fondamental». Elle a été écrite et imposée par un pays qui n’en possède pas une en version écrite, à savoir le Royaume-Uni.

Little England

«Quant à l’aspect colonial, on nous a imposé une Constitution basée sur une culture de Westminster, soit une culture britannique, adaptée pour un Little England et non pour l’île Maurice, qui n’a pas la même histoire», poursuit Kris Valaydon. Encore moins, les mêmes paramètres politiques et caractéristiques démographiques, entre autres.

Bien que la Constitution mauricienne ne soit pas complètement désuète, ses failles méritent d’être repensées, souligne l’historien Jocelyn Chan Low. De son côté, Kris Valaydon affirme que la Constitution est obsolète. «Elle ne correspond pas aux idéaux d’une démocratie moderne. Cette Constitution est faite pour une démocrature et non une démocratie. C’est-à-dire qu’elle relève plus d’une dictature premierministérielle qu’autre chose.»

Néanmoins, Rajen Narsinghen, Senior Lecturer en droit à l’UoM et constitutionaliste, soutient que la révision est impérative mais en préservant la structure. «Il faut conserver les essential features de la Constitution qui ont garanti la stabilité politique et la paix sociale. Maurice est une République, une démocratie selon l’article 1, dotée d’un régime parlementaire.»

Système électoral qui protège les élus

Quels articles sont dépassés ? La plupart de nos interlocuteurs mentionnent le système électoral. «Celui-ci est difficile à changer car il protège les élus. Dans la foulée, on trouve le Best Loser System et qui ne favorise pas le mauricianisme», affirme l’historien. À ce titre, Rajen Narsinghen déclare qu’il est grand temps de proclamer Maurice comme un État laïc («secular State») : «Il faut privilégier une équité des religions.»

L’indépendance des institutions comme le commissariat de police est aussi discutable, confie Jocelyn Chan Low. Un exemple : «Un policier fait du canvassing sur Facebook et le commissaire dit qu’il n’a pas vu cela. Il y a un problème dans le sens où certaines institutions doivent agir en toute indépendance. Mais dans la pratique, on ne le voit pas

Un point que reprend Rajen Narsinghen. «L’élection du président de la République se fait à travers une majorité parlementaire. Selon la Constitution, il doit être le garant de l’unité nationale et doit être supposément indépendant. Dans la réalité, ce n’est pas le cas.»

Ceci s’applique également aux nominations à certains postes par la présidence, ajoute le constitutionaliste. «Si le président est un nominé politique, il y aura une certaine partialité. Par exemple, dans le cas des chefs juges, cela peut se faire à travers la Judicial and Legal Services Commission.» Il suggère que ce type d’exercice se fasse à travers d’autres instances.

Inclusion du droit lié à l’environnement

Selon nos interlocuteurs, les droits fondamentaux doivent s’élargir et inclure ceux liés à l’environnement ou d’ordre humain et socio-économique pour le logement et l’éducation, entre autres. En sus des principes fondamentaux de la Constitution et le système électoral inique, Kris Valaydon évoque des articles dépassés portant sur l’exercice du pouvoir exécutif et législatif, le rôle et le pouvoir du Parlement réduit aujourd’hui à un «talk-show» et la manière de choisir le speaker, le président de la République et l’importance des pouvoirs décentralisés, notamment.

Appartenance ethnique

Par conséquent, plusieurs révisions s’imposent. À commencer par la déclaration d’appartenance ethnique, qui fait actuellement débat. «La Constitution ne reconnaît pas le Mauricien. Et lors des élections générales, il est rappelé à tout candidat de respecter la découpe de l’électorat en quartiers ethniques. L’interdiction à un Mauricien de se déclarer Mauricien pour participer à la vie politique relève d’une logique de division et d’une ouverture vers une dérive», souligne Kris Valaydon. Selon lui, il faut aussi revoir les articles ayant suscité des polémiques récemment.

À ce titre, le juriste mentionne le changement de titulaire au poste de Premier ministre. «Ce scénario n’est pas prévu dans la Constitution de Maurice. Il y a eu un débat très documenté alors, même si au final, la politique l’avait emporté et non le droit, selon moi. Pour enlever les ambiguïtés, il faut réviser la Constitution.»

De plus, il est inconcevable que la date des élections ne dépende que du Premier ministre, critique- t-il. D’autres amendements impliquent les droits des personnes âgées, un Ombudsman à la santé, entre autres.

Comment cela se passe-t-il ailleurs ? Aux États-Unis, l’article V de la Constitution, ratifiée depuis 1789, régit toute révision constitutionnelle. Celle-ci peut être proposée par le Congrès avec une majorité de 2/3 des votes de la Chambre des députés et du Sénat. S’ensuit tout un processus agréé par deux instances. D’après l’ambassade américaine à Maurice, depuis son application, 27 amendements ont été adoptés. Ceci signifie que ce cadre âgé de 232 ans garantit toujours les droits de la population américaine, assurent les médias internationaux.

Selon Kris Valaydon, en France, la dernière Constitution date de 1958. Depuis, il y a eu environ 25 révisions.


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Lexpress

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