Société : Pourquoi la PMA pour toutes n’est pas pour demain

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Si le projet de loi bioéthique qui propose notamment d’étendre la procréation médicalement assistée aux femmes célibataires et couples de femmes était approuvé, de nombreux obstacles persisteraient.

Le projet de loi bioéthique arrive ce mardi à l’Assemblée nationale avec l’emblématique extension de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes, quels que soient leur statut marital ou leur orientation sexuelle, promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Si le texte était définitivement adopté – pas avant le début de l’année 2020 à l’issue d’un long processus parlementaire – toutes les embûches ne seraient pas pour autant levées avant que ces femmes ne deviennent mères.

L’extension de la PMA aux femmes célibataires et couples de femmes pourrait concerner chaque année 2000 femmes, a estimé Agnès Buzyn, la ministre des Solidarités et de la santé. À titre de comparaison, en 2016, quelque 1760 couples ont bénéficié d’au moins une tentative d’assistance médicale à la procréation avec les spermatozoïdes d’un donneur, rappelle un rapport de l’Agence de biomédecine.

Or, les dons de gamètes sont déjà en tension: en 2016, 363 hommes ont donné leur sperme en France. Bien que ce chiffre soit en hausse, “le nombre de dons ne permet pas encore de répondre aux besoins de tous les couples dans les meilleurs délais”.

Comme le pointent les Cecos, les Centres d’études et de conservation des œufs et du sperme habilités à recueillir et conserver les gamètes, le nombre de donneurs est en effet insuffisant. Plusieurs éléments entrent en jeu, notamment la limitation à dix grossesses par donneur. Autre facteur qui explique la pénurie de gamètes mâles: un tiers des donneurs ne peuvent être retenus, souvent parce que les spermatozoïdes supportent mal la congélation ou pour des raisons génétiques. Tout cela a pour conséquence des délais d’attente déjà très longs.

Les couples hétérosexuels qui ont recours à un don de sperme – un peu moins d’un millier de naissances en 2016 – doivent aujourd’hui attendre en moyenne six mois à deux ans, parfois plusieurs années. Des délais qui pourraient ainsi s’allonger encore un peu plus. Mais pas question pour autant de rémunérer les dons, qui resteront gratuits. Agnès Buzyn a promis une campagne de recrutement de nouveaux donneurs.

  • La destruction des stocks de sperme?

Le projet de loi prévoit également pour les enfants nés d’un don de pouvoir à leur majorité accéder à l’identité du donneur – sans pour autant créer de rapport de filiation. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui puisque l’anonymat du donneur, de sperme ou d’ovocyte, est garanti.

Après l’entrée en vigueur de la loi, il ne sera donc plus possible d’utiliser des gamètes dont le donneur n’aurait pas donné son accord pour divulguer son identité. C’est pour cela que le texte prévoit la destruction du stock de gamètes. Un immense gâchis, estiment certains, alors que l’étude d’impact du projet de loi dénombrait près de 90.000 paillettes de spermatozoïdes en stock fin 2016.

“Il serait pourtant très simple de recontacter les donneurs et d’obtenir leur accord par téléphone ou par mail à la levée de leur anonymat”, s’indigne pour BFMTV.com Nicolas Faget, porte-parole de l’Association des parents et futurs parents gays et lesbiens.

S’il n’est pas question de les contacter individuellement, une campagne nationale d’information pourrait les appeler à se manifester.

La ministre de la Santé a assuré que le stock de gamètes ne serait pas détruit. Mais une partie le serait tout de même, puisque les gamètes existantes seraient utilisées jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi, moment à partir duquel celles qui resteraient seraient obsolètes.

“Une période de transition permettra d’organiser le passage de l’ancien au nouveau système de dons, pour éviter la pénurie”, a voulu rassurer Agnès Buzyn.

Un risque réel: comme cela s’est vu dans les pays qui ont levée l’anonymat du donneur, les premiers temps, les dons sont en baisse. S’ils repartent ensuite à la hausse, cela peut prendre plusieurs années, allongeant encore les délais d’attente.

Sans compter que le projet de loi de bioéthique doit également permettre aux femmes et hommes qui le souhaitent l’auto-conservation de leurs gamètes, avec des conditions d’âge. Ce qui risque d’augmenter sensiblement l’activité des 29 Cecos.

Emilie Duret, coprésidente de l’association française des avocats LGBT+, partage les mêmes inquiétudes.

“Alors qu’à l’étranger, il n’y a pas de délais d’attente et qu’en quelques mois on peut tomber enceinte, je ne vois pas comment ces centres pourront répondre à la demande alors qu’ils ont déjà du mal avec celle des couples hétérosexuels.”

Elle souhaite ainsi que d’autres centres puissent eux aussi recueillir et gérer les gamètes.

“Evidemment certains ont la crainte d’une marchandisation de la PMA. Mais par le biais d’association ou de partenariat avec un hôpital, cela pourrait décongestionner les Cecos.”

Si le texte est adopté au Palais Bourbon, il sera ensuite examiné au palais du Luxembourg. Et pourrait faire la navette entre les deux chambres, avec la possibilité d’une commission mixte paritaire en cas de désaccord et d’un vote ultime à l’Assemblée nationale. Promulgué par le président de la République, il n’en serait pour le moins pas encore applicable: le conseil constitutionnel pourrait être saisi.

La loi n’entrerait alors en vigueur qu’après sa publication au Journal officiel et ses décrets d’application. Ce qui fait craindre à Nicolas Faget, de l’Association des parents et futurs parents gays et lesbiens, plusieurs années d’attente.

“Peut-être 2021, et encore, ces femmes pourraient attendre encore plus longtemps. On l’a vu avec le mariage pour tous. Des maires ont refusé de marier des couples homosexuels. Cela pourrait être pareil avec le refus de certains médecins mettant en avant une clause de conscience ou une priorisation faite sur les couples hétérosexuels. Ce n’est pas illégitime de penser ça quand on voit la réaction de l’Académie de médecine (elle a émis des réserves sur la PMA pour toutes, NDLR). Cela risque d’être très long pour elles. Or, une femme de 35, 36, 37 ans ne peut pas se permettre cette incertitude.”

C’est pour cela qu’il continue de conseiller à ses adhérentes de se tourner vers l’étranger si elles en ont les moyens. Mêmes inquiétudes pour Emilie Duret, de l’association française des avocats LGBT+, qui table sur 2023.

“Il faut se donner les moyens pour que ce droit soit réalisable en pratique. Sans budget, l’ouverture de la PMA à toutes les femmes restera un droit théorique. Celles qui pourront se le permettre iront à l’étranger, les autres n’auront pas d’enfant ou devront attendre plusieurs années, comme c’est déjà le cas aujourd’hui chez les couples hétérosexuels.”

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