Sécurité: des gros bras indispensables à certains politiciens

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Ces captures d’écran de la vidéo prise à Grand-Baie, dimanche, témoignent de la violence de la rixe.

Ces captures d’écran de la vidéo prise à Grand-Baie, dimanche, témoignent de la violence de la rixe.

Leur job : assurer la sécurité de ceux qui font appel à eux. Qu’on les appelle «bouncers», «videurs», «tapeurs» ou «gros bras», ces agents ne passent pas inaperçus. La politique aussi les engage mais, des fois, ça dérape et cela se termine dans le sang, comme à Grand-Baie, dimanche.

Les politiciens aiment s’entourer d’un service d’ordre, souvent composé d’agents, lors de certains déplacements.

Ils ne font pas qu’assurer la sécurité dans les boîtes de nuit. Les videurs, ou bouncers, vocable sous lequel ils sont mieux connus, sont également au service de certains politiciens, surtout lors des campagnes électorales. Certains font même appel à eux lors de déplacements privés, à Maurice ou à l’étranger. Mais évidemment quand on les interroge officiellement sur cet aspect des choses, nos politiques sont avares de commentaires sur la question. Cependant, quelques-uns d’entre eux ont accepté de nous dire comment ils font pour recruter leurs anges gardiens.

«Il y a des campagnes qui sont plus dangereuses que d’autres…» Ce sont les mots d’un politicien de carrière, qui a choisi de parler sous le couvert de l’anonymat. Il explique que son service de sécurité est le même depuis des années. «C’est une question de confiance», justifie-t-il.

Passe-t-il par des agences de sécurité ? Oui et non ! Le politicien explique qu’il a effectivement retenu les services d’une agence spécialisée mais qu’il a recours aux mêmes agents à chaque fois que le besoin se fait sentir. «Durant certaines campagnes, le moindre incident peut être très dangereux. Des fois, il s’agit d’accrochages banals entre les sympathisants de différents partis. Donc, les leaders de partis sont davantage sur la défensive. Nous avons besoin de protection», soutient notre interlocuteur.

Autre modus operandi : faire appel à des mandants des diehard du parti, qui font office de gros bras. Dans certains partis politiques, c’est une histoire de tradition, de culture. «J’ai remarqué que certains agents faisaient aussi office de garde rapprochée pour le leader. Ils sont présents dans les réunions en tant qu’activistes et se déplacent également avec lui lorsqu’il a des sorties officielles», indique un autre politicien. Ensuite, soutient-il, il existe aussi ceux qui, volontairement, insistent pour s’attribuer la tâche d’agent de sécurité.

Comment opère-t-on au sein d’un parti pour décider de la sécurité des chefs, des agents ou des autres politiciens qui seront sur le terrain durant une campagne ? «Cela ne se décide pas ouvertement lors d’une réunion de campagne. C’est chacun pour soi. La plupart du temps, les politiciens ont recours à ceux à qui ils font confiance», poursuit notre interlocuteur.

Sollicité, Shakeel Mohamed, chef de file du Parti travailliste et député de la circonscription no3 (Port-Louis-Maritime–Port-Louis-Est) affirme, pour sa part, n’avoir jamais eu recours à un service de garde rapprochée. «Je sais que certains politiciens font toujours appel à des bouncers mais cela n’a jamais été une nécessité pour moi. Je trouve que les gros bras mettent de la distance entre le public et le politicien. Même lorsque j’ai été ministre, je n’ai pas voulu que les éléments de la VIPSU s’approchent trop près de moi», précise-t-il.

Grand-Baie : un anniversaire qui tourne en bagarre

Il a été salement amoché et figure parmi les personnes agressées devant une boîte de nuit à Grand-Baie, aux petites heures dimanche. Un habitant de Camp-Levieux, âgé de 27 ans, a été attaqué à coups de sabre par un groupe de «bouncers». Et a dû se faire admettre à l’hôpital Victoria, à Candos. La victime, un employé d’hôtel qui peine à parler, raconte qu’elle s’était rendue à cette discothèque avec des amis, pour célébrer un anniversaire.

«J’étais avec ma petite amie. Nous n’avons pas vraiment eu de problème à l’intérieur. Je ne comprends pas ce qui a bien pu se passer», relate le jeune homme. Cependant, il explique qu’une petite dispute a éclaté à l’intérieur mais que l’affaire avait vite été réglée. «On s’amusait. Il y a eu une banale altercation mais on a vite passé l’éponge. Zot inn dir korek apré», poursuit-il (voir ci-contre).

Mais alors que le groupe quittait la boîte de nuit, les gros bras se seraient mis à saccager une voiture. «Je leur ai demandé pourquoi ils saccageaient ce véhicule, car la dispute avait déjà été réglée. Les vigiles m’ont agressé à coup de sabre. J’ai perdu connaissance.» La police de Grand-Baie, alertée, a conduit le blessé à l’hôpital SSRN, à Pamplemousses. Il a ensuite été transféré à l’hôpital Victoria, à Candos.

La scène de violence a été filmée par des témoins. Plusieurs personnes, dont des agents de sécurité, ont été interrogées par la police de Grand-Baie, hier. À 19 heures hier soir, les présumés agresseurs étaient toujours recherchés.

Histoire : le PMSD et ses «Tapeurs»

Le recours à des manifestants violents et des hommes de main – «tapeurs» dans le langage populaire – marqua, à compter de 1965, l’action politique du Parti mauricien social-démocrate (PMSD). Le parti du coq s’opposait de façon de plus en plus virulente à l’indépendance du pays.

Au début de 1965, des tapeurs du PMSD tuèrent un partisan travailliste, Rampersad Surath, à Belle-Rose, lors d‘un défilé de voitures organisé par ce parti. Le cas Surath fut largement exploité par le Parti travailliste. Cette victime du PMSD est honorée par une statue érigée en son honneur à l’avenue Broad, à Belle-Rose. Une rue voisine porte son nom. Le PMSD intégra le gouvernement en 1969, année qui marqua aussi la naissance du Mouvement militant mauricien (MMM). Paul Bérenger, tout jeune leader du MMM, fut agressé par des tapeurs du PMSD en septembre 1969, lors d’une manifestation à Port-Louis.

Par la suite, des tapeurs bleus exercèrent un règne de terreur dans certaines régions du pays, s’en prenant à de jeunes militants. À Curepipe, Amédée Darga et Raja Bhadain du MMM furent particulièrement harcelés. Curepipe était alors considérée comme le bastion du PMSD.

Et c’est à Curepipe précisément que, le 25 novembre 1971, des agents du PMSD firent usage d’armes à feu dans une tentative d’assassiner Paul Bérenger. Ils prirent pour cible une voiture dans laquelle voyageait Dev Virahsawmy, premier député Mauve. Un occupant de la voiture, un docker du nom d’Azor Adelaïde, fut tué. Ce tragique événement estompa largement la culture des tapeurs au PMSD.

Métier : videurs 

Une formation assidue

En matière de sécurité, un mot revient souvent : formation. Vimen Sabapati, agent de sécurité, est catégorique. «Un agent de protection n’a pas le droit d’agresser qui que ce soit. Il commet une infraction et est passible d’arrestation par les forces de l’ordre, comme n’importe quel autre citoyen. Son rôle principal est de protéger un individu ou plusieurs personnes à la fois.» Vimen Sabapati, qui compte 19 ans d’expérience dans ce métier, ne veut plus employer le mot «bouncer». Il exhorte les aspirants agents de sécurité à suivre une formation en bonne et due forme avant de faire acte de candidature à ce poste.

«C’est un métier à risque et bien des fois nous côtoyons des personnes ivres, voire agressives. Mais il nous faut garder notre calme. Cela demande une maîtrise de soi, d’où l’importance de la formation. Il ne suffit pas d’avoir un corps musclé pour faire ce travail correctement.» Anderson, un des collègues de Vimen Sabapati, est sur la même longueur d’onde. Il dit regretter que les récents incidents aient donné une mauvaise image à un «métier noble».

Comment faire acte de candidature ?

C’est aux services du commissaire de police qu’incombe la responsabilité de recruter des aspirants agents de sécurité, cela conformément à la Private Security Service Act 2004. La personne intéressée doit être âgée de 18 ans ou plus, être médicalement apte et elle doit avoir suivi une formation préalable. Autre critère de sélection : l’aspirant agent de sécurité doit avoir un casier judiciaire vierge. Le permis de l’agent est valide pour un an et la demande de renouvellement doit être faite 21 jours avant la date d’expiration de l’actuel permis. Soulignons que selon l’article 18 de la loi, il commet une infraction si un agent de sécurité se comporte comme un policier. Son travail consiste, entre autres, à surveiller et à protéger une personne ou une propriété.

Rapport commission drogue et mode de recrutement

Dans le rapport de la commission d’enquête sur la drogue, l’ex-juge Paul Lam Shang Leen a évoqué le «besoin urgent» de revoir les méthodes de recrutement des agents de sécurité telles qu’entreprises par les forces de l’ordre. Il a également recommandé de revoir les formations car, dit-il, certains ne sont «pas aptes à servir la communauté».

Flou autour de la rixe sanglante

La vidéo circulant sur Facebook montrant des agents de sécurité, devant une boîte de nuit de Grand-Baie, qui s’en prennent à un couple auprès d’une voiture fait le buzz (voir ci-contre). Mais des témoins laissent entendre un autre son de cloche, ce qui laisse penser qu’il y a autre chose derrière ce «simple» cas d’agression. Entre la vidéo et les témoignages, où se trouve la vérité ?

Les causes exactes d’une telle violence de la part des videurs n’ont pas encore été déterminées. Si certains internautes blâment les agents de sécurité, les accusant de se montrer violents envers le couple, telle que l’action est perçue selon les images filmées, d’autres ne partagent pas le même avis.

Selon un témoin oculaire, «la voiture a été prise d’assaut car le jeune de 27 ans, qui était accompagné d’une jeune femme, a fait demitour près de la station-service se trouvant dans les environs pour ensuite foncer à vive allure sur des gens. Ils ont ainsi heurté une voiture, qu’on voit sur la vidéo». Cette partie, expliquée par notre témoin, serait une quasi-certitude, car l’inspecteur de police en charge de l’enquête maintient que la voiture a été vue sur les caméras de surveillance en train de foncer sur des piétons.

Selon notre témoin, l’origine de cette rixe remonte à un peu plus tôt, à l’intérieur de la boîte de nuit. «Suite à une dispute entre deux groupes à l’intérieur de la discothèque, le propriétaire est intervenu, avec quelques agents de sécurité, pour demander à ces personnes de sortir. Le propriétaire est lui aussi sorti. Voyant la dispute devant sa discothèque, l’homme a essayé de calmer les esprits mais il s’est pris une brique sur la tête. Les agents de sécurité, faisant leur travail, ont demandé une explication aux fauteurs de troubles mais en vain. La situation a peu après pris une tournure brutale. Résultat, la vidéo en ligne.»

Sollicité, le propriétaire de la boîte de nuit n’est pas revenu vers nous. Au niveau de la police, l’enquête se poursuit.


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Lexpress

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