« Réduire les dettes réciproques dans la zone euro »

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Par Jean Matouk

« Le Monde » a demandé à des contributeurs de tous horizons de proposer, chaque jour, une idée pour changer la France. L’économiste Jean Matouk suggère une réduction d’une partie des dettes de chaque pays européen détenues dans un autre Etat membre de la zone.

Tribune. Je propose que l’Union européenne décide, en accord avec la Banque centrale européenne (BCE), que les dettes publiques des pays de la zone euro détenues par les banques de ces pays soient toutes réciproquement réduites de 20 % ou 25 %.

L’opération serait décidée dans le cadre d’une coopération renforcée. Elle serait proposée par le conseil des ministres de la zone et soumise au Parlement européen ou, si l’on veut être rigoureux, à une Commission spéciale des députés européens des pays de la zone.

Elle serait aussi soumise à la Banque centrale européenne, car celle-ci devrait autoriser exceptionnellement les banques commerciales porteuses de la dette à étaler sur dix ou quinze ans la provision pour créance perdue correspondante afin de réduire l’impact de la mesure sur les ratios de solvabilité des banques.

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L’annulation pourrait être exceptionnellement plus large – 50 % s’agissant de la Grèce, 30 % pour l’Italie – compte tenu du niveau d’endettement de ces pays par rapport à leur produit intérieur brut (PIB) – 138 % et 176 % respectivement. Tous les pays de la zone en bénéficiant, on peut penser que même les plus rigoureux quant aux finances publiques, comme l’Allemagne ou la Finlande, seraient d’accord.

9 milliards pour la Grèce

La mesure permettrait d’abord de réduire de 20 % ou 25 % la charge d’intérêt de la dette pour tous les pays. Si l’on fait l’hypothèse que la moitié des dettes sont détenues par des banques des pays de la zone, la France, dont la charge de dette est d’environ 43 milliards d’euros, obtiendrait un bénéfice budgétaire de l’ordre de 4,5 milliards par an.

Pour l’Allemagne, dont la dette représente 63,9 % du PIB soit 1 945 milliards et bénéficie d’un taux moyen d’intérêt d’environ 0,5 %, le gain ne serait que de l’ordre de 1 à 1,5 milliard d’euros. En revanche, le gain pourrait être de l’ordre 8 milliards pour l’Italie et de 9 milliards pour la Grèce, et même plus si leurs partenaires acceptent une réduction d’endettement plus forte.

La mesure permettrait de réduire de 20 % ou 25 % la charge d’intérêt de la dette pour tous les pays

Chaque pays pourra affecter cette somme à son budget. Ce gain serait perçu par les citoyens comme une manifestation de la solidarité de l’Union européenne, une réalisation de cette Europe « protectrice » si souvent évoquée.

Une solution encore plus européenne serait possible. Les Etats laisseraient ces sommes à la disposition de la Banque centrale européenne ou de la Banque européenne d’investissement, avec deux usages possibles. Ou bien un véritable programme de grands travaux dans toute la zone, soit pour des infrastructures, soit pour la transition écologique.

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