« L’indignité est au cœur des mouvements contestataires dans le monde arabe »

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Pour Myriam Benraad, les contestations portées en grande partie par la jeunesse apolitique s’inscrivent dans le continuum des « printemps » de 2011 et des déceptions qui ont suivi.

Propos recueillis par et Publié aujourd’hui à 12h46

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Une étudiante lors de manifestations contre la hausse des prix et des impôts à Tunis, le 9 janvier 2018.
Une étudiante lors de manifestations contre la hausse des prix et des impôts à Tunis, le 9 janvier 2018. ZOUBEIR SOUISSI / REUTERS

Les « printemps arabes » de 2011 paraissaient enlisés dans d’interminables conflits (Libye, Syrie, Yémen) ou étouffés par la contre-révolution (Egypte). En 2019, a émergé une nouvelle vague contestataire, portée par une jeunesse qui se dit apolitique, en Egypte, en Irak et en Algérie. Politologue et spécialiste du monde arabe, Myriam Benraad, auteure notamment de Jihad : des origines religieuses à l’idéologie (Le Cavalier bleu, 2018), décrypte cette nouvelle donne.

Quel est le moteur de ces nouvelles contestations ?

Il y a d’abord la colère de populations laissées à l’abandon par des Etats qui n’ont aucune intention de se réformer. Les acteurs de ces contestations – pas si nouvelles quand on les replace dans le temps long – sont en majorité des citoyens qui ne supportent plus leurs conditions de vie, ainsi qu’une jeunesse, démographiquement toujours plus nombreuse, qui ne se satisfait plus de ce statu quo. Les griefs formulés par ces foules sont une remise en cause profonde des systèmes politiques qui ont échoué à les entendre et à répondre à leurs attentes par une action institutionnelle tangible. Il est impossible de dissocier les revendications socio-économiques du volet politique.

Ensuite, il y a la dignité, karama en arabe, une notion centrale et décisive, renvoyant à une pluralité de sens qui ont constitué, depuis 2011, autant d’expressions protestataires que d’enjeux pour des transitions toujours en cours. En descendant dans les rues, les populations arabes exigent avant tout du respect et de la reconnaissance. Elles entendent donner corps à cette citoyenneté à laquelle toutes aspirent. Pour certains protestataires, cette revendication correspond également à une quête d’identité, de morale, de justice, de valeurs, après de longues années d’autoritarisme politique et de violations de leurs droits les plus fondamentaux.

La dignité était déjà centrale dans les soulèvements de 2011. S’agit-il des mêmes ressorts ?

Au-delà des spécificités nationales, tous les soulèvements de 2011 visaient des castes de dignitaires établis dont le monopole des ressources économiques et financières leur était garanti par l’exercice du pouvoir. Aux yeux de ceux-là, la dignité est « aristocratique » et se confond avec une conscience aiguë de leurs privilèges. Il n’est pas non plus possible de s’en prévaloir si l’on considère la situation de certains groupes ethniques ou religieux. Enfin les femmes, humiliées parmi les humiliés, subissent une double oppression.

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