l’impossible envol d’un peuple dans le Haut-Karabakh

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Grégoire Colin (à gauche) dans « Si le vent tombe », de Nora Martirosyan.

L’avis du « Monde » – À ne pas manquer

Qu’une fiction réussisse à révéler par l’absurde un territoire qui n’est pas reconnu par la communauté internationale, c’est le premier exploit de Si le vent tombe, de Nora Martirosyan, tourné en 2018 dans la République autoproclamée du Haut-Karabakh. Que la réalisatrice et plasticienne née en Arménie, en 1973, ait choisi de dessiner les contours de ce pays à la manière d’une topographe, scrutant les lignes de déplacement de ses personnages, est l’autre bonne nouvelle de ce film ubuesque qui se joue dans un aéroport (celui de Stepanakert, capitale du pays).

Produit par Julie Paratian (Sister Productions), Si le vent tombe a reçu au printemps 2020 le double label de la sélection officielle cannoise et de la section parallèle ACID (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion). Quelques mois plus tard, à l’automne, le Haut-Karabakh était rattrapé par sa tragique histoire. Rattachée à l’Azerbaïdjan en 1920, la province arménienne avait revendiqué son indépendance au moment de la chute de l’Union soviétique, en 1991, se proclamant République indépendante. Au terme d’une guerre de trois ans avec l’Azerbaïdjan, un cessez-le-feu avait été signé en 1994. Mais le territoire est resté le théâtre d’un conflit latent, jusqu’à ce qu’une nouvelle guerre, déclenchée en septembre 2020 par l’Azerbaïdjan (avec le soutien de la Turquie), ne mette à genoux l’enclave arménienne.

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Terrain de l’absurde

Les cinéastes se saisissent parfois d’un problème géopolitique insoluble pour inventer des formes radicales et inventives. Sur le conflit israélo-palestinien, citons le génie burlesque d’Elia Suleiman (Intervention divine, en 2002, It Must Be Heaven, en 2019) et la puissance performative de Raed Andoni (Fix Me, en 2009, Ghost Hunting, en 2017). Si le vent tombe palpite d’une basse tension continue. Première séquence en forme de ruban sombre : un défilement de crêtes montagneuses, la nuit, filmé depuis le corridor de Latchine, soit la route qui relie le Haut-Karabakh à l’Arménie. La cinéaste ne dévoile pas encore un paysage, mais de purs espaces de perceptions, images stroboscopiques et signes d’une présence humaine qui reste encore à établir.

L’aéroport ne voit décoller ni atterrir aucun avion – le Haut-Karabakh n’étant pas reconnu officiellement. Et pourtant, chaque jour, tout le monde est à son poste

Les habitants de ce microterritoire aride vivent sur le terrain de l’absurde. L’aéroport de Stepanakert nous tend les bras, à l’image de ses deux ailes en béton incrustées dans la façade. Le petit bâtiment a fière allure, mais il ne voit décoller ni atterrir aucun avion – le pays n’étant pas reconnu officiellement, l’aéroport ne détient pas les autorisations nécessaires. Et pourtant, chaque jour, tout le monde est à son poste, les agents de piste, le personnel de la tour de contrôle, le directeur, etc. Tous guettent le jour où des passagers pourraient enfin embarquer. Ce serait, pensent-ils, le premier pas vers la reconnaissance du pays.

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