Les souvenirs à vif de Yun Bin, victime des Khmers rouges

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Yun Bin, 64 ans, qui l’an dernier a témoigné devant le tribunal chargé de juger, à Phnom Penh, les hauts responsables du régime génocidaire khmer rouge, a survécu en 1978 à son exécution. 41 ans plus tard, il ne sait toujours pas pourquoi on a voulu le tuer.

Par Publié aujourd’hui à 02h14

Temps de Lecture 4 min.

LETTRE DE PHNOM PENH

21 mai 1978, 9 heures du matin : Yun Bin, un paysan de 23 ans, est en train de couper des herbes dans un champ près de son village de Tuol Manchey, à une centaine de kilomètres à l’est de Phnom Penh. Il travaille au sein de l’une des communes populaires établies par les Khmers rouges, à l’époque au pouvoir depuis trois ans.

Un peu après 9 heures, il est convoqué auprès du chef de la commune, qui lui dit : « Tu vas partir pour aller étudier dans un village. Tu y seras heureux. » Yun Bin ne sait pas encore que l’expression « aller étudier » est un code khmer rouge qui signifie « mise à mort ».

Quarante et un ans plus tard, assis sous le pilotis de sa maison traditionnelle, le paysan aux cheveux court et gris à l’impeccable dentition ne sait toujours pas pourquoi il a été conduit, ce matin-là, vers la mort. « On n’avait pas grand-chose à manger, deux cuillères à soupe d’un gruau de riz trois fois par jour. On avait peur. Mais ce 21 mai-là, je n’avais aucune raison de penser qu’ils allaient m’assassiner. »

Yun Bin, à Tuol Man Chey, le 30 octobre. Il a témoigné en 2018 devant le tribunal chargé de juger, à Phnom Penh, les hauts responsables du régime khmer rouge.
Yun Bin, à Tuol Man Chey, le 30 octobre. Il a témoigné en 2018 devant le tribunal chargé de juger, à Phnom Penh, les hauts responsables du régime khmer rouge. AGNES DHERBEYS / MYOP AVEC LE SOUTIEN DU CNAPAPHIE DOCUMENTAIRE

Jeté dans un puits rempli de cadavres

Ils sont huit, six garçons et deux filles, dans le groupe qui est emmené plus tard dans un village voisin sur une carriole tirée par un cheval. On prend leur identité. On leur redit qu’ils vont aller étudier. Ils attendent toute la journée.

La nuit est tombée quand un camion militaire vient les prendre. « A ce moment, ils nous ont lié les mains derrière le dos. C’est là que j’ai commencé à avoir peur. » Quand il monte dans le camion, il voit d’autres gens, le visage ensanglanté, qui ont visiblement été battus. « Alors j’ai compris : on allait nous tuer. » Yun Bin, dont les mains n’ont pas été attachées fermement, esquisse un mouvement. Un soldat fait mine de le frapper. Un autre arrête le geste de son camarade : « Pas la peine, il va mourir bientôt… »

Dix minutes plus tard, tout le monde descend. Le groupe, une trentaine de personnes, est emmené près d’un puits. « J’ai senti une odeur de pourriture qui sortait du trou. J’ai réalisé que des cadavres y avaient été jetés et pourrissaient. » Autour du puits, des soldats, hache à la main.

L’exécution commence. Un à un, les suppliciés sont frappés et tués à coups de hache ou de binette. Une forme d’exécution classique chez les Khmers rouges qui écrasaient aussi les bébés contre les arbres : il fallait économiser les balles, on exécutait à la main les « ennemis de la révolution ».

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