Les renseignements américains et allemands ont espionné une centaine de pays grâce à une société de chiffrement

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Les services secrets américains et allemands ont espionné pendant des années plus d’une centaine de pays à travers une société suisse spécialisée dans le chiffrement des conversations, ont révélé mardi 11 février le Washington Post, la télévision allemande ZDF et la radio-télévision suisse SRF.

La société Crypto AG est devenue après la seconde guerre mondiale le leader sur le marché des équipements de chiffrement, vendant pour des « millions de dollars » son matériel à plus de 120 pays, rapportent les trois médias. Parmi ses clients, on trouve « l’Iran, les juntes militaires d’Amérique latine, l’Inde et le Pakistan, et même le Vatican », explique le quotidien américain. Au total, une centaine de pays, dont des pays européens (Portugal, Italie, Irlande, Espagne) et des membres de l’OTAN, ont utilisé la technologie de l’entreprise suisse.

Des clients qui ne connaissaient pas les liens très discrets qu’entretenaient Crypto et le renseignement américain après-guerre. Dès 1960, la CIA et le fondateur de l’entreprise suisse, Boris Hagelin, signent un accord commercial, qui entraîne le versement de 855 000 dollars. Une somme officiellement présentée comme des « dépenses de marketing ».

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Approchée par le renseignement français

L’expertise reconnue de l’entreprise en chiffrement ne manque pas d’attirer les convoitises d’autres Etats. En 1967, les services de renseignement français et allemands font part à Hagelin de leur volonté de racheter Crypto. Le fondateur refuse, et fait remonter l’offre à la CIA… qui rachètera finalement l’entreprise trois ans plus tard, en binôme avec son homologue allemand, le BND, pour 5,75 millions de dollars.

Les deux agences de contre-espionnage ont alors pu « truquer les équipements de la société afin de casser facilement les codes que les pays (clients) utilisaient pour envoyer des messages cryptés », expliquent les trois médias.

Elles ont ainsi surveillé la crise des otages à l’ambassade américaine de Téhéran en 1979, fourni des informations sur l’armée argentine au Royaume-Uni pendant la guerre des Malouines, suivi les campagnes d’assassinats des dictateurs sud-américains, et surpris des responsables libyens se féliciter après l’attentat contre la discothèque La Belle à Berlin-Ouest en 1986 qui avait tué deux soldats américains, affirme le Washington Post.

L’opération, nommée « Thesaurus » puis « Rubicon », a été « le coup du siècle » en matière de renseignement, se félicite la CIA dans un rapport de 2004 consulté par les auteurs de l’enquête. Ils ont également eu accès à des documents rassemblés par les services de renseignement allemands en 2008. Ces derniers se sont finalement désengagés de l’accord à partir de la fin des années 1970, et s’en sont totalement retirés au moment de la réunification, transmettant leurs parts à la CIA. L’agence américaine, elle, n’a revendu l’entreprise qu’en 2018. « Crypto avait perdu de son importance sur le marché mondial de la sécurité du fait de la diffusion massive d’une technologie de chiffrage fort dorénavant accessible sur les smartphones », analyse le Washington Post.

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Caisse noire

Ni la CIA ni le BND n’ont souhaité commenter cette enquête, sans pour autant nier l’authenticité des documents, rapporte le quotidien américain. Plusieurs enquêtes soupçonnaient déjà l’implication des services de renseignement américains dans l’entreprise, mais c’est la première fois que des documents internes de la CIA et du BND attestent de l’existence du projet – et de son ampleur.

L’ancien coordinateur du renseignement allemand, Bernd Schmidbauer, a confirmé à la ZDF l’existence de cette opération, estimant que « Rubicon » avait permis « de rendre le monde un peu plus sûr ». La révélation de l’existence du projet soulève cependant de nombreuses questions, notamment concernant la destination des très confortables revenus générés par la société, qui selon les documents consultés par les trois médias ont pu alimenter une « caisse noire » des services de renseignement allemands. Les Verts allemands ont demandé des « explications » à la commission parlementaire fédérale en charge du renseignement.

La société suédoise Crypto International, qui a racheté Crypto AG, a estimé que l’enquête était « très alarmante », assurant qu’elle n’avait « aucun lien avec la CIA ou le BND ». Les autorités suisses ont fait savoir mardi avoir lancé une « recherche » sur le sujet le 15 janvier. La licence d’exportation de la société a été suspendue en attendant les conclusions de l’enquête.

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