Les « lumières éteintes » du palais Farnèse, à Rome, symbole de la crise franco-italienne

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La salle des Fastes Farnesiens, bureau de l'ambassadeur.

BECHET Benjamin / Benjamin BECHET / PINK / saif images

Par Jérôme Gautheret

Les rapports entre l’Italie et la France ont souvent été compliqués et toujours ambivalents.  Le rappel par Paris de son ambassadeur, le 7 février, en est le dernier épisode spectaculaire.

Au palais Farnèse, le salon des Fastes farnésiens, bureau de l'ambassadeur de France à Rome.
Au palais Farnèse, le salon des Fastes farnésiens, bureau de l’ambassadeur de France à Rome. BECHET Benjamin / Benjamin BECHET / PINK / saif images

A l’approche de la place, ce qui frappe d’abord ce sont les proportions parfaites d’une façade Renaissance à trois niveaux, rehaussée des drapeaux français et européen. Le palais Farnèse a été construit en trois quarts de siècle, entre 1515 et 1589, au cœur de Rome, et il évoque plus les harmonies géométriques de la Renaissance que les audaces du baroque. A la nuit tombée, on devine, au premier étage, grâce à l’éclairage intérieur, un superbe décor de fresques. Et il n’est pas rare de voir les curieux s’arrêter sur la place et plisser les yeux pour essayer d’en mieux deviner les détails : l’ambassade, bonne joueuse, laisse d’ordinaire la lumière allumée toute la nuit.

C’est ici, dans ce salon des Fastes farnésiens – décor du deuxième acte du Tosca de Puccini –, au milieu de scènes retraçant les hauts faits de la lignée des Farnèse, que travaille l’ambassadeur de France à Rome. Et c’est depuis la petite loggia dessinée par Michel-Ange, qui s’ouvre en son centre, qu’il a le loisir de faire admirer à ses visiteurs la place Farnèse et, un peu plus loin, la rumeur incessante du Campo dei Fiori.

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Choisi par la République française comme son ambassade en 1874, racheté ensuite à la maison de Bourbon des Deux-Siciles, enfin cédé à l’Italie, qui le laisse en concession à la France contre un loyer symbolique, le palais abrite aussi l’Ecole française de Rome, institut de recherche en histoire, en archéologie et en sciences humaines et sociales. Pour les habitants de la ville, plus qu’une simple ambassade, il s’agit d’une des traces les plus parfaites de la grandeur de la Rome des papes, qui contient dans le secret de ses murs un trésor inestimable de l’art baroque : la galerie des Carrache, récemment restaurée, considérée par nombre d’historiens de l’art comme le pendant laïque de la chapelle Sixtine.

Un excellent thermomètre

Aussi la présence française en ces murs suscite depuis l’origine, côté italien, des sentiments ambivalents, où l’affection sincère se mêle à l’agacement d’être privé de la jouissance d’un des plus précieux joyaux de la ville. De l’autre côté, la France dispose, avec « le Farnèse », d’un outil d’influence incomparable. D’ailleurs, les diplomates le reconnaissent sans peine : on répond rarement non aux invitations de l’ambassadeur, et l’attrait du Farnèse n’y est pas pour rien.

C’est sous les fenêtres du palais que les Italiens se massent pour témoigner de leur soutien lors des grandes épreuves, comme au lendemain des attentats de 2015. Et c’est au même endroit que l’on vient, aux moments de crise, manifester sa colère. Ainsi, durant l’été 2018, alors que la tension franco-italienne grimpait en flèche, les chercheurs qui suaient sous les toits, fenêtres ouvertes, dans la bibliothèque de l’Ecole française de Rome, ont-ils eu plusieurs fois la surprise d’entendre l’écho lointain de slogans antifrançais, que des petits groupes de manifestants hurlaient au mégaphone depuis la place… Au fond, le Farnèse est un excellent thermomètre de la relation franco-italienne.

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