Les Kurdes, éternels laissés-pour-compte

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Editorial. Abandonnés par les Occidentaux, les Kurdes ont dû se placer sous la protection de la Russie pour éviter de se faire massacrer par la Turquie dans le nord-est syrien. Une alliance qui laisse un goût amer.

Publié aujourd’hui à 11h02 Temps de Lecture 2 min.

Distribution de nourriture dans le camp de Bardarash, en Irak, qui abrite à ce jour 6 900 réfugiés, le 21 octobre 2019.
Distribution de nourriture dans le camp de Bardarash, en Irak, qui abrite à ce jour 6 900 réfugiés, le 21 octobre 2019. LAURENCE GEAI POUR “LE MONDE”

Editorial du « Monde ». Lâchés par leurs alliés occidentaux, les Kurdes se retrouvent une fois de plus dans la position des laissés-pour-compte de l’histoire. L’annonce soudaine du président américain, Donald Trump, de retirer les forces spéciales américaines du nord-est de la Syrie les a mis le dos au mur. Pour ne pas être massacrées par l’armée turque et ses supplétifs syriens coutumiers des exactions, les forces kurdes ont dû se placer sous la protection du Kremlin et du régime de Bachar Al-Assad, avec lequel elles ont toujours ménagé leurs relations.

Cette alliance a un goût amer. L’amertume des tomates pourries que les habitants de Kamechliyé, ville majoritairement kurde de l’extrême nord-est de la Syrie, ont jetées sur les véhicules blindés américains en partance vers la frontière irakienne les 20 et 21 octobre.

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Pendant plus de quatre ans, les forces kurdes ont été le fidèle bras armé des Occidentaux dans la lutte contre l’organisation Etat islamique (EI). Epaulés par leurs alliés américains et français, ces vaillants combattants ont payé un lourd tribut (plus de 10 000 combattants et combattantes) à la lutte contre le « califat » autoproclamé. Sans eux, les coupeurs de têtes de l’EI séviraient encore.

Les Kurdes étaient nos frères d’armes, mais c’était hier. En guise de remerciement, Donald Trump les a lâchés en un tournemain, justifiant sa volte-face par un tissu d’âneries : « Ils sont pires que l’EI », « Ils ne nous ont pas aidés en Normandie », « Ils ont assez de sable là-bas pour jouer ».

L’impéritie des Occidentaux a un visage, celui de Havrin Khalaf, 35 ans, kurde et militante de la société civile. La jeune femme a été abattue sommairement le 12 octobre par les supplétifs syriens du groupe Ahrar Al-Charkiya, allié à l’armée turque. Tirée de son véhicule, la jeune militante, qui n’était pas armée, a été traînée par les cheveux avant d’être tuée de plusieurs balles en plein visage et dans le dos par les nervis islamistes à la solde d’Ankara.

Sur les routes de l’exode

La région était l’une des rares zones de Syrie où une paix relative régnait entre les différentes communautés ethniques et religieuses (kurdes, yézidies, assyriennes, arabes). En deux semaines, l’incursion turque a semé la mort et la destruction sur ce territoire, poussant 200 000 personnes sur les routes de l’exode. Un entretien de six heures entre les présidents, russe, Vladimir Poutine, et turc, Recep Tayyip Erdogan, le 22 octobre, à Sotchi, a suffi à y mettre un terme.

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La victoire revient à M. Poutine, qui se pose plus que jamais en acteur incontournable de la région après avoir réussi à calmer l’ardeur guerrière de son « ami » Erdogan. Tout à sa nostalgie ottomane, ce dernier se rêve en justicier de l’islam sunnite, à même de rendre les régions situées à l’est de l’Euphrate « à leurs propriétaires naturels », les Arabes et surtout les réfugiés syriens de Turquie (3,6 millions), qu’il brûle de renvoyer chez eux, un projet irréalisable qu’il nourrit pour gagner des points auprès de son électorat islamo-nationaliste.

Avant tout, le triomphe est total pour Bachar Al-Assad. Principal responsable de la tragédie syrienne, il est désormais considéré par toutes les parties comme l’incarnation du moindre mal. L’opportunisme habile du maître du Kremlin a pu aider à sortir d’une situation difficile. Il ne suffira pas à faire émerger une solution politique en Syrie. Remettre en selle un régime sanguinaire ne saurait être la pierre angulaire de l’ordre raisonnable que tout dirigeant devrait chercher à promouvoir. Incapables de proposer une alternative convaincante à l’offre de Poutine, Américains et Européens se sont retirés du jeu. Ils n’auront pas leur mot à dire sur l’avenir de la Syrie, ils seront juste sollicités pour sa reconstruction.

Le Monde

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