« Les élites populistes perçoivent l’UE comme un nouveau Moscou »

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Le sociologue franco-polonais Georges Mink explique comment certains politiques des pays de l’Est exploitent les « jeux  de mémoire »,  au risque de provoquer de nouvelles fractures en Europe.

Par et Publié aujourd’hui à 15h26, mis à jour à 16h16

Temps de Lecture 7 min.

Une photo de Vladimir Poutine dans une station-service de Svilengrad, en Bulgarie, en février 2016.
Une photo de Vladimir Poutine dans une station-service de Svilengrad, en Bulgarie, en février 2016. TOMMASO RADA

Le sociologue franco-polonais Georges Mink est directeur de recherche émérite à l’Institut des sciences sociales du politique (CNRS-université Paris-Ouest), président de l’International Council for Central and East European Studies, et enseigne au Collège d’Europe Natolin-Varsovie. Il décrypte, dans cet entretien, l’héritage de 1989 dans les pays d’Europe centrale et orientale.

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Solidarnosc en Pologne, la « révolution de velours » en Tchécoslovaquie, la chaîne humaine des pays baltes, la chute du mur de Berlin, tous ces événements ont eu lieu la même année. Trente ans après, que reste-t-il de l’esprit de 1989 ?

Assez peu de choses, en termes de commémorations… On fête peu cette date, sauf en Allemagne. En Pologne et en Hongrie, très peu de choses sont organisées spontanément. Cela s’explique sans doute parce que l’héritage de 1989 subit une sorte de double logique : d’une part, un débat contradictoire – « qui a fait quoi et à qui a profité le crime » – ; d’autre part, cela paraît lointain pour ceux qui sont aujourd’hui à des postes de responsabilité.

Néanmoins, l’ombre de 1989 est toujours là, bien plus complexe que la métaphore des dominos, qui consiste à dire que les différentes pièces seraient tombées les unes après les autres, quasi automatiquement. Il y a eu différents agendas. La Pologne a été précoce et a donc essuyé les plâtres. En avançant pas à pas, elle a envoyé le signal à d’autres pays qu’on pouvait aller plus loin et plus vite, avec des ruptures plus radicales. Ces temps différenciés font que l’héritage de 1989 est vécu différemment selon les pays.

Quels souvenirs ces transitions ont-elles laissés ?

La prudence des acteurs de 1989 autour de la Table ronde polonaise [processus de négociations sur la sortie du communisme] permet, encore aujourd’hui dans la vie politique, de stigmatiser une partie de ces acteurs, au prétexte qu’ils auraient dû rompre plus radicalement avec le communisme. La Table ronde est un véritable levier pour le PiS, le parti populiste au pouvoir en Pologne, qui construit sa narration en grande partie sur cet épisode. Selon lui, les représentants de la Plate-forme civique, c’est-à-dire l’opposition, sont les héritiers directs des négociateurs d’hier qui ont capitulé devant les communistes et permis leur conversion, voire même sécurisé leur entrée dans la démocratie.

Un autre phénomène lié à 1989 a trait au désir qu’avaient les sociétés civiles d’en finir, partout, avec le communisme. Ce qui a ralenti les changements, en Pologne comme en Tchécoslovaquie, c’est cette notion de « solidarisme », en concurrence avec l’autre idée consistant à bâtir au plus vite le pluralisme politique. Il y a là une opposition entre des leaders emblématiques tels qu’Adam Michnik, par exemple, qui était pour le maintien d’un mouvement communautaire de type Solidarnosc, en attendant l’arrivée de partis. Le même conflit a opposé, en Tchécoslovaquie, Vaclav Klaus et Vaclav Havel. Klaus avait compris qu’en créant son parti, il allait concurrencer Havel qui, lui, raisonnait encore en termes de mouvement social, antitotalitaire, démocratique. C’était une course de vitesse pour le pouvoir.

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