l’église Saint-Jean de Kibuye, oubliée de Dieu

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Les lieux du génocide (6/9). Il y a vingt-cinq ans, des centaines de Tutsi ont été massacrés dans cet édifice religieux au bord du lac Kivu.

Par Pierre Lepidi Publié aujourd’hui à 07h00

Temps de Lecture 6 min.

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L’église de Kibuye, au Rwanda, en août 2012.
L’église de Kibuye, au Rwanda, en août 2012. Adam Jones / Flickr

D’une beauté fascinante et mystérieuse, le paysage touche au sublime. Au bout d’un chemin de terre, l’église Saint-Jean de Kibuye, à environ 130 km à l’ouest de Kigali, au Rwanda, surplombe des rivages apaisants couverts d’une végétation luxuriante. Avec ses reflets bleus et argentés, le lac Kivu s’enroule autour du promontoire sur lequel repose l’édifice religieux. En ce dimanche matin, l’église est pleine. De la route, on entend chanter les fidèles. Il y a vingt-cinq ans, ce petit coin de paradis a connu l’enfer.

Patrice Bigenimana croit toujours en Dieu. Il ne va pas à la messe mais il connaît bien l’église Saint-Jean : « J’y étais réfugié le 17 avril 1994 et les hurlements que j’ai entendus résonnent encore dans ma tête. » Alors qu’il travaillait avec son père dans les plantations qui bordent le lac, le garçon, âgé de 12 ans à l’époque, a vu arriver les extrémistes hutu armés de fusils, de machettes, de lances et d’ubuhiri, des massues cloutées. « On les voyait marcher sur la route en contrebas, raconte-t-il. La file qu’ils formaient était interminable. Ils venaient par milliers de toutes les communes de la région et convergeaient vers nous en chantant et en criant : “Tugomba kubica” [Nous devons les tuer]. »

Présentation de la série Rwanda : les lieux du génocide

Onze jours plus tôt, l’attentat contre l’avion du président Juvénal Habyarimana a donné le signal que tous les miliciens et les soldats des Forces armées rwandaises (FAR) attendaient. A Kibuye, les tueries de masse ont commencé une semaine plus tard. Au départ ciblées, les attaques perpétrées contre les Tutsi vont se généraliser et devenir massives à partir du 14 avril. Des milliers de rescapés venus des collines environnantes se réfugient alors dans le stade Gatwaro et l’église Saint-Jean, où ils pensent être en sécurité.

Une mer de cadavres

« Lorsque nous avons vu arriver les miliciens, nous nous sommes précipités dans l’église avec mon père, se souvient Patrice Bigenimana. Mais il y avait déjà beaucoup de monde. C’est le préfet Clément Kayishema qui a tiré les premières balles. Il était sur un promontoire avec une mitraillette et visait ceux qui étaient à l’extérieur. » Dans l’église, les réfugiés se barricadent mais la chaleur devient rapidement insoutenable. « Les miliciens ont cassé les vitraux et fait brûler des pneus devant pour nous asphyxier, poursuit Patrice Bigenimana. Comme on ne pouvait plus respirer, il a fallu ouvrir les portes de l’église. »

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