Le surprenant et fructueux trafic international de cactus

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Un cactus Eriosyce chilensis en fleur, photographié au Chili en octobre 2007.

C’était en février 2020. Après avoir reçu un « tuyau », les carabiniers italiens ont fait une descente chez un certain Andrea Piombetti, un collectionneur et vendeur de cactus bien connu à Senigallia, une ville sur la côte Adriatique. C’était le début de l’opération Atacama – du nom du désert chilien – visant à démanteler un trafic international de… cactus, écrit le New York Times. En novembre 2020, une opération du même type a visé un autre trafiquant de cactus, installé un peu plus au nord, à Rimini.

Dans une serre de fortune chez M. Piombetti, les gendarmes italiens ont découvert environ un millier de Copiapoa et d’Eriosyce, des cactus originaires du Chili, dont le commerce est interdit, en vertu de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Convention on International Trade of Endangered Species ou CITES), aussi appelée Convention de Washington.

Ce n’était pas la première fois que M. Piombetti a maille à partir avec les carabiniers. En 2013, lors d’une descente, ils avaient saisi chez lui une cargaison de six cents cactus chiliens. Mais l’affaire n’avait pas eu aucune suite judiciaire, en raison de retards dans la procédure et de la prescription.

Les cactus plus menacés que les mammifères et les oiseaux

Depuis quelques années, le cactus a remplacé le ficus : le Guardian en 2017 et le New Yorker deux ans plus tard décrivent l’engouement pour celui qui est devenu la plante d’intérieur par excellence du « millénial ». Mais certains amateurs fortunés ne se contentent pas des espèces vendues dans les jardineries ou chez les spécialistes ayant pignon sur rue.

Sur certaines falaises du Mexique, au Pérou ou au Texas

En effet, il en va des cactus comme des climats du vignoble de Bourgogne : de nombreuses espèces sont très localisées. On ne les trouve, par exemple, que sur certaines falaises calcaires abruptes du Mexique, sur une seule parcelle sablonneuse de moins d’un kilomètre carré sur la côte du Pérou, ou au fin fond du Texas.

De fait, les cactus sont encore plus menacés que les mammifères et les oiseaux et figurent sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (l’UICN). « A l’heure actuelle, 31 % des espèces de cactus sont menacées d’extinction », écrivait l’UICN en 2015. « La destruction de son habitat, l’industrie de l’horticulture et le commerce illégal de manière générale sont désignés comme responsables du déclin du taxon », note de son côté le WWF.

Trafic mondial méconnu

Les espèces rares sont difficiles voire impossibles à acheter légalement. C’est la raison pour laquelle s’est développé un trafic international, qui n’a rien à envier à la contrebande d’os de tigres, de l’ivoire, d’écailles de pangolin et de corne de rhinocéros. Mais ce commerce illégal est largement ignoré, en raison de la « cécité végétale », le biais cognitif qui tend à ignorer les espèces végétales.

Pourtant, régulièrement les services douaniers ou de protection de la nature annoncent des prises qui ne donnent qu’une idée imprécise de cette contrebande. Ainsi, en septembre 2016, les douanes françaises ont annoncé avoir intercepté 369 cactus appartenant à onze espèces différentes de cactus très rares et protégées, dont la valeur était estimée à près de 80 000 euros.

En 2019, un couple de touristes allemands a été arrêté à l’aéroport de Denver

A la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, les différentes agences fédérales américaines luttent contre le trafic d’êtres humains et de drogue. Mais pas seulement. En juin 2019, un couple de touristes allemands a été arrêté à l’aéroport de Denver, accusé d’avoir tenté de rapporter chez lui des graines de cactus en voie de disparition. En février 2021, les autorités néo-zélandaises annonçaient la condamnation d’une femme accusée de contrebande de plantes succulentes et de cactus en voie de disparition, entre la Nouvelle-Zélande et la Chine.

En Arizona, les Saguaros, majestueux cactus arborescents, qui sont l’attraction du parc national du même nom, sont aussi la cible de trafiquants, rappelle le magazine Géo. Pour ce cactus, la valeur est surtout déterminée par la taille (environ 200 dollars les trente centimètres) : « Mais, dès que le cactus a plusieurs bras et prend sa forme très prisée de candélabre, le prix s’envole. Il oscille alors entre 5 000 et 10 000 dollars, au point que certains propriétaires l’incluent dans leur assurance habitation. »

Pourtant, une fois qu’ils sont passés entre les mailles du filet, on les trouve facilement dans des magasins de plantes de luxe au Japon, sur eBay, Instagram, Etsy ou Facebook, relève le New York Times.

Renvoyer les cactus au Chili

L’opération Atacama a permis de retracer une partie du parcours des cactus de M. Piombetti. Selon les enquêteurs, il s’est rendu sept fois au Chili, la dernière fois en décembre 2019, où il a ramassé des cactus à proximité du Parc national Pan de Azúcar.

Selon les autorités, la prise de février 2020 est évaluée à près de 1,2 million de dollars

Puis il a envoyé des plantes en Grèce et en Roumanie, où les services des douanes sont moins sourcilleux, ou vers le Japon. Selon les autorités, la prise de février 2020 est évaluée à près de 1,2 million de dollars au marché noir (plus de 980 000 euros).

Généralement, les cactus confisqués sont détruits par les autorités italiennes, sauf lorsqu’il s’agit d’espèces rares, poursuit le New York Times. Après le raid des carabiniers, les cactus ont été entreposés au département de botanique de l’université de Milan. Mais en raison de leurs besoins spécifiques, les conserver en Italie revenait à les laisser mourir.

Fin 2020, le jardin botanique de Milan, l’UICN et un amateur de plantes de Baltimore (Maryland) ont payé les frais nécessaires au voyage retour des cactus vers le Chili. A la fin du mois d’avril, 844 cactus ont retrouvé leur terre natale, une centaine étaient morts et 84 sont restés à Milan pour être étudiés.

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