« Le succès de la démocratie tunisienne protège la lutte palestinienne » – Jeune Afrique

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Hael Al-Fahoum, ambassadeur de Palestine en Tunisie, revient sur le plan de paix américain pour le conflit israélo-palestinien, contre lequel Tunis et Ramallah travaillent main dans la main.


Ancien ambassadeur de Palestine en France, Hael Al-Fahoum a posé ses valises en Tunisie il y a cinq ans, un pays où il assure avoir des « bons rapports avec tous les partis politiques », et « notamment avec la présidence ».

Dans son bureau, où un écran diffuse 24h/24 les images venant de Cisjordanie et de Gaza, les symboles nationaux – un portrait d’Arafat, une photo du poète Mahmoud Darwish – ne laissent aucun doute sur ses origines. Devant lui, sur la table, la carte de la Palestine proposée par Donald Trump dans son « deal du siècle » pour le Moyen-Orient.

Une nouvelle résolution – non contraignante – sur la question palestinienne, alternative au projet du locataire de la Maison Blanche, sera présentée au Conseil de sécurité de l’ONU par la Tunisie, membre non permanent depuis janvier 2020, mais pour le compte de la Tunisie.

« Au niveau international, la Tunisie porte le message des Palestiniens », confirme l’ambassadeur, sans jamais remettre en question le soutien du palais de Carthage à la cause palestinienne, qui a pourtant récemment limogé son ambassadeur à l’ONU à cause d’une « faute diplomatique grave » concernant ce même projet de résolution, par peur d’altérer la relation entre la Tunisie et les États-Unis, a appris Jeune Afrique de source diplomatique. Mais l’ambassadeur insiste : « la coordination entre les deux pays est totale ».

Jeune Afrique : Vous feuilletez le « deal du siècle » de Donald Trump. Que pensez-vous de cette proposition américaine ?

Hael Al-Fahoum : Ce plan est tout simplement une mauvaise stratégie, et cette carte morcelée ne représente pas un État palestinien. Il y a un consensus international, comme le montre le Conseil de sécurité, sur les paramètres de la solution à deux États.

Au lieu de présenter de nouveaux projets, pourquoi ne cherche-t-on pas une solution qui va dans le sens des intérêts de toutes les parties concernées, des Palestiniens comme des Israéliens ? Pourquoi légitimer un processus d’annexion illégal au regard du droit international ?

L’approche de Donald Trump est suicidaire et seule une solution alternative permettra de protéger les générations futures. Ce plan représente la dernière étape d’une stratégie qui dure depuis plus d’un siècle.

Que contient ce projet de résolution tunisien sur la question palestinienne ?

L’approche tunisienne est très simple. Il existe un consensus au niveau de la communauté internationale pour parvenir à une solution. Il faut la négocier ensemble, en prenant en considération les besoins de toutes les parties concernées. Il faudrait également remettre en question les subventions venant des puissances étrangères.

La Tunisie propose une résolution qui réaffirme ces principes de base : deux États, Jérusalem comme capitale de la Palestine selon les frontières de 1967, une solution pour les réfugiés palestiniens.

Il faut trouver rapidement un moyen pour coexister ensemble, pour utiliser nos énergies non pas à s’autodétruire mais à s’auto-reconstruire et créer une référence positive pour le monde entier. S’il s’agira d’un seul État, un réfugié palestinien et un Juif doivent pouvoir partager les mêmes droits. On n’acceptera jamais un État d’apartheid comme celui qui a été dessiné sur cette carte, même pas en échange d’argent.

Le monde arabe a-t-il abandonné la Palestine ?

Renversons la perspective : c’est la résistance palestinienne qui se mobilise contre la politique de Trump, laquelle menace potentiellement chaque peuple, notamment arabe. Trahir les Palestiniens, c’est risquer de se trahir soi-même. Les manifestations contre Trump le prouvent.

En tant que membre non permanent à l’ONU, la Tunisie mène le jeu en ce moment délicat. Des concertations bilatérales entre Ramallah et Tunis ont-elles eu lieu ?

Il existe une corrélation totale entre la Palestine et la Tunisie concernant toutes les domaines, que ça soit au niveau régional, bilatéral ou international. On se consulte pour le moindre détail. Avant de présenter un dossier en conférence internationale, je consulte le ministère des Affaires étrangères tunisien pour savoir s’ils ont des commentaires à faire. On échange tous les points de vue et on développe des stratégies communes.

La Tunisie porte le message des Palestiniens

Pour moi le succès de la Tunisie est le meilleur soutien pour la Palestine. Ici je me considère comme un Tunisien, et je demande à mes frères de faire la même chose avec la Palestine. Le succès de la démocratie tunisienne protège la lutte palestinienne. Le fait que la Tunisie est maintenant membre non permanent à l’ONU est très important pour nous, spécialement après la proposition de Trump. La Tunisie porte le message des Palestiniens.

Manifestation de soutien à la cause palestinienne sur l'avenue Bourguiba, à Tunis, en mars 2019.

Manifestation de soutien à la cause palestinienne sur l’avenue Bourguiba, à Tunis, en mars 2019. © AP/Sipa

Kaïs Saïed a fait de la question palestinienne son cheval de bataille. Quels sont vos rapports avec le nouveau président ?

Je ne pense pas que la question palestinienne soit son cheval de bataille. Kaïs Saïed est un homme droit. Et c’est cela dont il parle : le président parle du droit des peuples, dans le sens de « haq » en arabe, absolu et pas négociable. Il faut comprendre le fond de son message : il défend tout un système de valeurs.

« En abandonnant le droit du peuple palestinien, on abandonne une partie fondamentale des nos valeurs de Tunisiens », a-t-il affirmé. Avec lui on ne parle plus du conflit israélo-palestinien ou de la question palestinienne, mais de la cause palestinienne.

Franchement, ses discours ont pu heurter. Mais il y a une approche différente avec Kaïs Saïed, que je considère comme sincère. Il veut faire quelque chose de bien pour ce pays.

Cela peut-il jeter un froid entre la présidence tunisienne et l’administration américaine ? 

C’est possible. Mais la Tunisie est un pays fort avec un énorme potentiel, même si le passage n’est pas facile et parfois on tombe dans quelques pièges. Il a fallu trois siècles pour former les sociétés occidentales à une démocratie relative, et elles sont quand même tombées dans les pièges de la démocratie manipulée par les grandes puissances financières.

En Tunisie on est en train d’apprendre les ficelles de ce système politique et cela prend du temps.

Vous avez également rencontré son adversaire Nabil Karoui. Quelle idée vous êtes-vous fait de ce moment politique en Tunisie ?

J’ai des bons rapports avec tout le monde, en particulier avec la présidence. Je ne veux pas rentrer dans les divisions internes. Quand je rencontre les représentants des partis politiques, j’insiste pour leur dire : donnez le meilleur de vous même pour la stabilité de la Tunisie, ce sera un pas en avant pour la Palestine aussi.

On peut ne pas toujours partager le même point de vue, mais on peut poursuivre le même objectif. Pour moi, le droit à l’autodétermination et à la liberté d’un peuple représentent une base, quelque chose d’absolu et de réel qui vient avant toute division partisane.



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JeuneAfrique

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