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VICTOR MORIYAMA POUR LE MONDE
ReportageLa zone humide, qui abrite une faune et une flore exceptionnelles, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Plus de 16 000 départs de feu ont été comptabilisés dans la région depuis le début de l’année.
Ici, un caïman est mort carbonisé, son éternel sourire reptilien aux lèvres. Plus loin, le crâne d’un gros buffle repose sur le sol craquelé, couleur de charbon. Ailleurs, entremêlée aux racines et aux troncs d’arbre roussis, gît la sinistre dépouille d’un serpent des marais, figé dans sa fuite désespérée des flammes. En cette fin de saison sèche, le Pantanal brésilien a des allures de cimetière. Ravagée par des incendies gigantesques depuis le mois de juillet, cette aire de biodiversité exceptionnelle, abritant quelque 650 espèces d’oiseaux, 98 de reptiles et 159 de mammifères, aurait déjà perdu, selon les experts, 20 à 25 % de sa superficie, soit 3 à 4 millions d’hectares partis en fumée. L’équivalent de la superficie de la Belgique ou de la Suisse.
Pour saisir toute l’ampleur de l’hécatombe, il faut emprunter la Transpantaneira, route légendaire qui, sur 150 kilomètres, traverse la région du nord au sud, depuis la cité de Poconé jusqu’à celle de Porto Jofre. Il y a quelques mois encore, le visiteur de passage y était transporté dans un paysage préservé, tout de tourbes et d’étangs, vaste marécage aux allures de Camargue des tropiques, royaume des jaguars, tapirs, tamanoirs et anacondas géants, aras au plumage bleu nuit et échassiers tuiuiu à collerette vermeille… Un paradis de l’écotourisme.
Tout a changé cette année avec l’arrivée de la saison sèche. En ce mois de septembre, sous 40 °C, le Pantanal n’est plus que l’ombre de lui-même : aux forêts carbonisées, couleur de charbon, succèdent des rivières et des lacs asséchés, striés comme du vieux parchemin. Depuis le début de l’année, 16 000 incendies ont été comptabilisés dans la région, contre à peine 6 000 pour la même période en 2019. Malgré une accalmie récente, à la faveur de quelques maigres pluies, on aperçoit, çà et là, encore bien des départs de feu. Une fumée ocre et épaisse recouvre en permanence l’horizon, parfois jusqu’au ciel. En pleine journée, le soleil se fait souvent invisible.
Impossible de savoir combien de milliers d’animaux ont péri dans la catastrophe. Les survivants, de leur côté, ont piètre allure. Le long de la route errent des singes, des loutres et des rapaces épuisés, poussés par la sécheresse, à la recherche d’une nourriture introuvable. Au bord des derniers points d’eau, souvent de grosses flaques boueuses, crocodiles et échassiers s’agglutinent par dizaines, se disputant âprement les derniers centimètres de marigot disponible. La moindre charogne devient la proie des vautours au ventre vide.
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