Le Libanais Georges Zreik, martyr d’un système en faillite

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Faute de pouvoir payer les frais de scolarité de sa fille, un chauffeur de taxi s’est immolé par le feu. L’émotion suscitée par ce geste n’a déclenché aucune mobilisation concrète dans un pays miné par les problèmes économiques et sociaux.

Par Benjamin Barthe Publié aujourd’hui à 03h38, mis à jour à 03h38

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Les établissements privés, qui scolarisent près de 60 % des élèves : un fardeau financier terrible sur les épaules des parents libanais.
Les établissements privés, qui scolarisent près de 60 % des élèves : un fardeau financier terrible sur les épaules des parents libanais. CAPTURE D’ECRAN / FACEBOOK

LETTRE DE BEYROUTH

Sur son portrait posthume, partagé sur les réseaux sociaux, Georges Zreik a le regard vide d’un homme à bout de forces, rongé de l’intérieur. La proximité de sa fillette, qui l’embrasse sur la joue, la mine rieuse, le laisse sans réaction. Vendredi 8 février, ce quinquagénaire libanais, chauffeur de taxi des hauteurs de Tripoli, s’est définitivement éteint.

Georges Zreik a succombé à ses brûlures, vingt-quatre heures après s’être immolé par le feu. Un geste désespéré, motivé par son incapacité à payer la scolarité de sa fille, inscrite dans le privé. Le drame témoigne de la paupérisation croissante de la petite classe moyenne libanaise, otage d’un système politico-économique en faillite.

Quelques heures avant d’en venir à cette extrémité, Georges Zreik, résident de Bkaftine, un village chrétien du nord du pays, avait tenté de trouver un arrangement avec l’administration de l’école. L’un de ces innombrables établissements, souvent religieux, qui pallient le délabrement du système éducatif public libanais, tristement célèbre pour ses locaux vétustes et ses classes à 50 élèves.

Déchéance sociale

En grande difficulté financière, le père de famille avait obtenu, il y a plusieurs années déjà, que sa fille soit dispensée de frais de scolarité. Il ne restait à sa charge que le bus de ramassage, les manuels, les fournitures et les activités extrascolaires. Mais même cela était devenu trop lourd à payer pour le foyer, dont les dettes s’accumulaient.

Georges s’était donc résolu, comme des milliers d’autres Libanais à court d’argent, à mettre son enfant dans le public. Une forme de déchéance sociale au pays du cèdre, où l’honneur des familles se mesure à la qualité des établissements fréquentés par leur progéniture.

Pour procéder à ce transfert, le chauffeur de taxi à la barbe poivre et sel réclama à l’école Notre-Dame les relevés de notes de sa fille. Le directeur accepta de lui délivrer ces documents à condition qu’il règle ses impayés. Une dispute s’ensuivit, à l’issue de laquelle Georges Zreik jura de se donner la mort. Ce qu’il fit peu après, dans la cour de récréation de l’école, avec un bidon d’essence et un briquet.

Son immolation a suscité un émoi instantané dans le pays. Les réseaux sociaux se sont couverts de commentaires révoltés, dénonçant notamment « le chantage » des établissements privés, qui scolarisent près de 60 % des élèves du pays et dont les frais oscillent en moyenne autour de 5 000 dollars par an. Un fardeau terrible sur les épaules des parents, surtout ceux qui ont plusieurs enfants.

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