« Le Liban, un pays à venir »

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Le mouvement de contestation qui traverse le pays est inédit par son ampleur et surtout par son caractère transcommunautaire. Si les manifestants parviennent à ne pas céder aux sirènes confessionnelles, une nation unie pourrait enfin naître, estime le romancier libanais dans une tribune au « Monde ».

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

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Une manifestante anti-gouvernement à Beyrouth le 24 octobre.
Une manifestante anti-gouvernement à Beyrouth le 24 octobre. IBRAHIM AMRO / AFP

Tribune. Une des choses les plus stupéfiantes dans le soulèvement du peuple libanais, c’est sa soudaineté et l’incroyable rapidité avec laquelle il s’est propagé pour mettre, après trois jours seulement, deux millions de personnes dans les rues, soit la moitié de la population du pays. Pourtant, depuis des années, la société libanaise semblait comme anesthésiée, prise en otage par un système de gouvernement basé sur le consensus et la coalition des partis politiques.

Ce système pervers et stérile avait permis de confisquer l’Etat au bénéfice de ces partis et de leurs chefs qui ont entrepris de noyauter les administrations publiques et les institutions et de monnayer le moindre service auquel tout un chacun a droit, transformant le rapport entre dirigeants et citoyens en rapport mafieux.

Tout en jouant sur la fibre communautaire, l’oligarchie au pouvoir avait aussi œuvré durant des décennies à mettre la main sur les ressources de l’Etat et sur toutes les aides financières extérieures, tantôt directement tantôt à travers une clientèle d’affidés ou de proches à qui étaient effrontément offerts tous les chantiers et tous les projets nationaux ou régionaux, entraînant de ce fait une corruption monumentale, une dilapidation des divers budgets et la création de caisses parallèles où des sommes énormes ont été englouties.

De tout cela il aura évidemment résulté une des dettes publiques les plus élevées du monde, un pourrissement de l’éthique politique et la montée devenue insoutenable de la morgue et de l’arrogance de la classe dirigeante. Cette dernière, et afin de renflouer les caisses pillées par elle, avait entrepris ces derniers mois d’imposer des mesures et des taxes ne touchant que les classes moyennes et pauvres. Cela apparaissait si scandaleux qu’à chaque nouvelle mesure on pouvait s’attendre à un soulèvement. Mais rien ne se passait, ce qui avait fini par faire sombrer tous les observateurs, les analystes et les hommes lucides dans un pessimisme profond sur la capacité de réaction du peuple libanais.

Une exigence unique

Or c’était mal le juger. Une taxe aberrante sur les appels gratuits offerts par l’application WhatsApp a mis le feu aux poudres. Mais c’est l’énorme colère devant la confiscation de l’Etat, la déliquescence de ses services, le chômage, la cherté de la vie qui s’est en fait exprimée et qui a donné au mouvement son ampleur et surtout son visage.

Entièrement spontané, ce mouvement n’est mené par personne, et aucune personnalité ni aucun groupe dirigeant n’en a pour l’instant émergé. Sa décentralisation permet à toutes les villes, et jusqu’au moindre village, d’organiser ses propres manifestations, dans une ferveur extraordinaire, avec juste quelques slogans communs et une communication constante entre les diverses places, villes, villages. Le plus grand de ces rassemblements, celui de Beyrouth, apparaît lui-même comme une somme d’innombrables meetings mis côte à côte.

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