« La pensée houellebecquienne sur l’Europe est extravagante »

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Dans sa chronique, Alain Frachon, éditorialiste au « Monde », analyse les propos tenus par l’écrivain lors d’un colloque au Cirque d’hiver, à Paris, le 25 avril.

Publié aujourd’hui à 05h20, mis à jour à 06h31 Temps de Lecture 4 min.

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L’écrivain français Michel Houellebecq lors du débat au Cirque d’hiver le 25 avril à Paris.
L’écrivain français Michel Houellebecq lors du débat au Cirque d’hiver le 25 avril à Paris. LIONEL BONAVENTURE / AFP

C’est une figure classique de la littérature : l’écrivain qui s’aventure en politique. Quand il aurait mieux fait d’être moins péremptoire. Tout récemment, au Cirque d’hiver, à Paris, Michel Houellebecq, le magnifique raconteur de nos médiocrités, réglait doctement son compte à l’Union européenne (UE). Excusez du peu ! « On n’est pas plus fort à vingt-huit, c’est une connerie de dire ça », a lâché l’auteur de Sérotonine (Flammarion, 352 pages, 22 euros), qui, caché derrière la brume de sa vapoteuse, nous déclarait encore : « C’est con de dire ça. On est moins forts à vingt-huit qui ne s’entendent pas. »

La question est de savoir s’il ne faut pas retourner la proposition et se permettre de dire que la pensée houellebecquienne sur l’Europe est extravagante. Car, dans le monde qui s’annonce, les Européens n’existeront qu’ensemble. Sur une scène internationale dominée par la Chine et les Etats-Unis, on n’est pas « mieux seul pour défendre son bout de gras », comme dit l’écrivain : on est écrasé, marginalisé, acculé à négocier en position de faiblesse.

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Réchauffement climatique, inégalités, évolution de la mondialisation vers un modèle plus « régionalisé », secousses technologiques de force 7, migrations, accélération de la course aux armements, autant de sujets sur lesquels l’UE apporte, ou devrait apporter, une irremplaçable « plus-value », pour reprendre une expression de l’ancien ministre des affaires étrangères Hubert Védrine. Si les Européens ont un mode de vie à conserver et même à promouvoir, l’instrument, c’est l’UE – il n’y en a pas d’autre.

Bonne chance, Michel

On aimerait voir Houellebecq, légion d’honneur épinglée sur la chemise col grand ouvert, négocier, au nom de la France seule, glorieusement seule, des normes techniques, sanitaires et tarifaires avec la douce administration Trump ou avec les philanthropes de l’équipe Xi Jinping ! Bonne chance, Michel.

Sans le levier de l’accès au marché unique, convoité de tous, aucun pays européen (à l’exception de l’Allemagne peut-être) ne « pèse » suffisamment pour « défendre son bout de gras » – c’est-à-dire réglementer la présence des géants américains du numérique et les investissements chinois chez nous, défendre notre agriculture, maintenir des exigences environnementales et sociales minimum, imaginer l’esquisse d’une défense commune, etc.

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Le système des alliances né au lendemain de la seconde guerre mondiale s’étiole. Donald Trump doute de la nécessité de l’OTAN et considère l’UE comme un ennemi. Le concept d’un camp occidental qu’uniraient des valeurs partagées lui est étranger.

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