« la Kinoise », un café 100 % congolais

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Tisya Mukuna sur sa plantation de café, dans la commune de Mont Ngafula à Kinshasa, en septembre 2020.

Une à une, elle inspecte les grappes de « cerises » rouges, les sentant prêtes pour la récolte. Entre les palmiers, les plants de citronnelle et les herbes folles, les caféiers sont là et Tisya Mukuna les couve du regard.

« Chef Cobra, cet arbre, c’est de l’arabica ou robusta ? », demande la jeune femme, 28 ans tout juste, au chef du village. Car Tisya découvre et n’est pas encore incollable sur cet univers du café dont elle ignorait tout il y a cinq ans.

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« On m’a toujours dit : le café ne pousse pas à Kinshasa », résume-t-elle, en supervisant du regard sa plantation à flanc de coteau. Il est vrai qu’en RDC, pour trouver des plantations de café, il faut aller à l’autre bout du pays, dans les provinces des Kivus et de l’Ituri, ou encore au Kasaï.

Pourtant, c’est à une vingtaine de kilomètres du centre de la capitale, là où la terre commence juste à reprendre ses droits, que la jeune femme a décidé de planter quelques arbres fruitiers avec son père il y a quatre ans.

90 % d’arabica et 10 % de robusta

Sur les terres familiales, elle a aligné les rangs de citronniers, d’orangers, de caféiers. Et ce seront ces derniers qui ont le mieux poussé. Alors depuis, le père et la fille torréfient et moulent les graines, conquis par le résultat. « J’étais de passage à Kinshasa pour deux mois. Finalement, je ne suis jamais repartie ! », résume la jeune femme, pas mécontente de son sort.

Née en RDC, Tisya Mukuna a grandi en France où elle a étudié le commerce et la négociation avant de commencer sa carrière dans le marketing des jeux vidéo en dépit de son envie « de lancer quelque chose dans l’alimentation » et plus précisément « dans le bio ». Après une première récolte, « pour voir », elle décide de s’installer à Kinshasa et de lancer « son » café, qu’elle appelle « la Kinoise ».

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Quatre ans plus tard, aux 1 100 arbres de sa plantation s’ajouteront 750 nouvelles plantules de robusta le mois prochain. Désormais, quatre ouvriers travaillent à plein temps sur l’exploitation, dont le chef du village, et Tisya collabore aussi avec un ingénieur agronome spécialisé dans le café. En 2019, pour sa première récolte commercialisée, elle a pu obtenir trois tonnes de café : 90 % d’arabica et 10 % de robusta.

La cheffe d’entreprise arrive dans un secteur qui, à une époque, a fait la fierté du Congo, mais s’est effondré ces trente dernières années. Jusqu’aux années 1990, le pays en exportait 120 000 tonnes à travers le monde. Le café était cultivé depuis la fin du XIXsiècle, à l’époque du Congo belge.

Un café qui a très bonne réputation

Mais les provinces de l’Est où se trouvaient la majorité des exploitations ont connu la guerre à partir de 1996. Alors, la plupart des cultivateurs ont dû fuir et la maladie du flétrissement du café s’est installée, aggravant encore la situation.

Aujourd’hui, seules 11 000 tonnes d’or noir quittent le pays chaque année. D’ailleurs, le café congolais est devenu une niche, une boisson pour gourmet qui a encore très bonne réputation. Réputé fruité, très équilibré, en particulier celui qui pousse sur les terres volcaniques du Nord-Kivu, il s’inscrit dans la catégorie des cafés de belle qualité.

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La grande majorité de ce café congolais est achetée par conteneurs entiers par des intermédiaires implantés au Havre ou à Anvers qui le revendent aux marques européennes et américaines. Seuls 3 % des grains cultivés sont transformés sur place.

Le café de Tisya fait donc figure d’exception puisqu’il est entièrement produit en RDC, de la plantation au magasin. Si la majorité des agriculteurs choisissent d’exporter le produit brut, c’est moins par choix que par manque d’infrastructures et de soutien des autorités. Partout dans le pays, les routes sont en piteux état. Comme celle qui mène à la plantation de Tisya Mukuna, absolument impraticable en voiture à la saison des pluies.

Disponible en supermarché à Kinshasa

La plupart des cultivateurs n’ont pas de quoi s’offrir un torréfacteur et doivent envoyer leur production dans les locaux de l’Office national du café (ONC), où la plupart des machines datent de l’époque coloniale.

Dommage, car « le marché est là », soupire Emmanuel Rwakagara, producteur de café à Goma et responsable du Conseil interprofessionnel pour la promotion de l’agriculture (CIPA). « En RDC, on importe 11 000 tonnes de café par an, autant que ce qu’on exporte ! On importe le café déjà moulu alors qu’on exporte le produit brut », regrette celui qui rêve de « consommer du local ».

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C’est ce que Tisya Mukuna a décidé de proposer. Et pour que les foyers congolais se convertissent à « la Kinoise », chaque paquet est proposé au prix démocratique de 2,50 dollars et désormais disponible dans la plupart des grands supermarchés de Kinshasa. La jeune femme travaille aussi sur des doses individuelles qui pourraient être vendues dans les stands au coin des rues, ce qui « correspond mieux au mode de vie d’ici, où les gens achètent de quoi consommer au jour le jour ».

L’initiative de Tisya Mukuna est saluée par ses confrères, à commencer par Emmanuel Rwakagara qui trouve « très bien que des jeunes se lancent ». D’ailleurs, l’aventurière compte bien élargir son offre de boissons en plantant des cacaotiers et en produisant des infusions de plantes. Car, à ses yeux, c’est le premier pas le plus difficile.

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