la fuite en avant d’Israël

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Les photos de Benny Gantz (à gauche) et Benyamin Nétanyahou, sur des affiches électorales, à Ramat Gan (Israël), le 17 février 2020.
Les photos de Benny Gantz (à gauche) et Benyamin Nétanyahou, sur des affiches électorales, à Ramat Gan (Israël), le 17 février 2020. JACK GUEZ / AFP

Editorial du « Monde ». Il aura fallu seize mois et trois élections législatives pour qu’Israël sorte de l’ornière. Le 20 avril, Benyamin Nétanyahou et son principal rival, le général Benny Gantz, se sont mis d’accord pour former un gouvernement d’« urgence nationale ». Ces deux premiers ministres se succéderont à la tête de l’exécutif pour faire face à l’épidémie due au coronavirus.

M. Nétanyahou se trouve relégitimé, après plus de dix ans consécutifs au pouvoir. Son opposition ne pourra pas le forcer à quitter ses fonctions pour comparaître, en simple justiciable, dans son procès pour corruption, fraude et abus de confiance, qui doit s’ouvrir le 24 mai. Seule la Cour suprême est encore à même de l’y contraindre. Mais les juges hésiteront à s’opposer à un compromis qui a la faveur d’une majorité de parlementaires et celle de la présidence.

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Les Israéliens peuvent espérer échapper à un conflit frontal entre l’exécutif et le pouvoir judiciaire. Mais à quel prix ? Ils suivront au jour le jour le procès de leur premier ministre, qui pourrait durer quatre ans et lui valoir la prison. Un tel feuilleton va nuire à l’image de la démocratie israélienne.

Surtout, cet accord représente une fuite en avant, dont les Israéliens n’ont pas eu le temps de prendre la mesure. Durant six mois, il limite l’action de l’exécutif à l’endiguement de la pandémie et de ses conséquences économiques. Mais il prévoit une exception, cruciale, en ouvrant la voie à l’annexion de la vallée du Jourdain et de colonies en Cisjordanie occupée depuis la guerre des Six-Jours, en 1967.

Action unilatérale

M. Nétanyahou l’avait promise à ses électeurs en avril 2019. Ce projet pourrait être examiné par le gouvernement et la Knesset dès le mois de juillet. D’ici là, un comité israélo-américain aura dressé la carte précise des territoires que la « vision » de Donald Trump pour une « paix » au Proche-Orient a esquissée en janvier.

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Une telle action unilatérale, illégale au regard du droit international, menace de cantonner un hypothétique Etat palestinien à des territoires disjoints par les colonies, perdant leur accès à la Jordanie. Elle risque d’abattre l’Autorité palestinienne, en accélérant la destruction de son projet national. Elle met aussi à mal la survie de la fragile monarchie jordanienne. Enfin, en Israël, l’Etat de droit risque d’être fragilisé par une décision qui romprait la distinction entre l’appareil juridique national et le régime d’occupation militaire en vigueur dans les territoires occupés, temporaire depuis 1967.

Voilà dix ans, ce projet demeurait aux marges de la politique israélienne. Mais, au moment où M. Nétanyahou se trouve sous la pression judiciaire, l’annexion lui permettrait de laisser un héritage politique qui lui fait aujourd’hui défaut. Or, tout concourt aujourd’hui à la rendre possible.

Elle a les faveurs de l’électorat chrétien évangélique de M. Trump, qui prépare sa réélection en novembre. La pandémie mondiale couvre toute action d’un assourdissant vacarme. L’Europe, qui dispose face à Israël d’arguments économiques non négligeables, a déjà dit son refus en janvier. Saura-t-elle parler d’une seule voix cet été ?

Quant à M. Gantz, il n’a pas obtenu de droit de veto sur ce projet, dans l’accord qui le lie à M. Nétanyahou. En campagne électorale, il avait déjà souhaité appliquer la souveraineté israélienne dans la vallée du Jourdain, « en coordination avec la communauté internationale ». C’était une façon de ne rien promettre. Il sera bientôt contraint de sortir de cette ambiguïté.

Le Monde

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