« La France doit reconnaître la force politique constructive des mouvements sociaux dans le monde arabe »

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Lors de manifestations contre la corruption et le désengagement de la classe politique à Beyrouth, le 1er décembre.
Lors de manifestations contre la corruption et le désengagement de la classe politique à Beyrouth, le 1er décembre. HUSSEIN MALLA / AP

Des mouvements sans leaders, des soulèvements de masse aveugles et incertains, sur lesquels planent le spectre des récupérations islamistes et la menace d’une extension du terrorisme, des groupements hétéroclites unis par leur seule opposition aux régimes en place : telle est la vision des révolutions arabes qui domine les institutions européennes et les chancelleries occidentales. Ces représentations anxiogènes motivent en France une frilosité diplomatique qui justifie un soutien répété à des régimes corrompus et autoritaires, voire aux pires dictatures. La France, qui proposait son expertise sécuritaire au président tunisien Ben Ali quelques jours avant son éviction par les manifestants tunisiens, déplore aujourd’hui, par la voix de son ministre des affaires étrangères, la démission du premier ministre libanais Saad Hariri suite à la pression de la rue, estimant qu’elle « aggrave la crise », et réitère son soutien au premier ministre irakien Adel Abdel Mahdi quelques semaines avant son éviction par un mouvement populaire sans précédent qui mobilise la rue irakienne contre la corruption de ses gouvernants.

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Dix ans après le début du « printemps arabe », les sociétés arabes, largement méconnues, figurent rarement à l’agenda des acteurs politiques français et internationaux et font l’objet d’arrangements politiques qui ne reflètent pas leur rôle réel mais bien les intérêts des maîtres du jeu international. Quand les acteurs occidentaux ne s’appliquent pas à promouvoir des collectifs à leur image ou des Gongo [« ONG » suscitées par le gouvernement] créées de toutes pièces par des régimes autoritaires, ils entretiennent des processus politiques dans lesquels activistes, ONG indépendantes, juristes, cause lawyers et autres figures de sociétés arabes en ébullition brillent par leur absence ou leur marginalisation. Le traitement réservé à la société civile syrienne dans les négociations de paix constitue à ce titre un cas d’école : le comité constitutionnel mis en place par l’ONU en septembre 2019 afin de rédiger une nouvelle constitution pour la Syrie inclut un mélange disparate de 50 personnalités associant suppôts du régime et personnalités indépendantes, et le groupe est soigneusement distingué dans les négociations des représentants de l’« opposition politique ».

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Une telle construction qui sépare artificiellement société et opposition a grandement contribué à entretenir une vision du conflit syrien comme une « guerre civile » entre des factions politiques plutôt qu’une guerre du régime contre sa propre société. Surtout, elle reste aveugle à la puissance constructive des soulèvements populaires, qui font la preuve depuis 2011 de leurs capacités organisationnelles mais aussi de leur propension à incarner des alternatives politiques et idéologiques face aux régimes en place. Des « comités populaires » égyptiens aux « comités de coordination » puis aux « conseils locaux » syriens, ces mouvements sociaux ont fait preuve de leurs remarquables capacités organisationnelles. Ils ont acquis un savoir-faire administratif et juridique qui leur a permis de pallier les défaillances de l’Etat.

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