« Je rêve de sang neuf en politique, que l’on chasse du pouvoir ceux qui ont volé le Liban »

0
108

[ad_1]

Le 17 octobre, l’annonce de nouvelles taxes a provoqué des manifestations à Beyrouth. Depuis Riad Al-Solh, la place forte du mouvement de contestation qui enflamme désormais tout le pays, Christina Haddad, une étudiante de 20 ans, témoigne de sa colère contre la corruption des politiques.

Par Publié aujourd’hui à 15h02

Temps de Lecture 2 min.

M Le magazine du Monde

« J’étais dans la vallée de la Bekaa, à une soixantaine de kilomètres de Beyrouth, quand la contestation a commencé dans la capitale, le soir du 17 octobre. Je regardais à la télévision les images de la petite foule dans les rues du centre-ville, criant sa colère. Je bouillonnais, je voulais en être. Impossible. Les routes vers Beyrouth étaient fermées par des protestataires. Le lendemain, je suis allée sur la place Riad Al-Solh, au cœur des manifestations, devant le siège du gouvernement. Depuis le 18 octobre, j’y suis du matin au milieu de la nuit.

Tout est bousculé dans ma vie. D’ordinaire, je partage mon temps entre Beyrouth et la Bekaa, entre mes études en psychomotricité et mon travail de serveuse. En ce moment, je n’ai plus cours : la direction de l’Université libanaise, un établissement public, avait annoncé la réouverture quelques jours après le début de la contestation, mais les étudiants et les professeurs ont refusé. J’ai aussi suspendu mon travail au restaurant à Deir Al-Ghazal, dans la Bekaa.

« Nous, la jeunesse, n’avons pas beaucoup de perspectives. Contrairement à d’autres, je n’ai jamais pensé à émigrer. Je veux vivre au Liban. »

Je ne vois ma mère, enseignante, que lorsqu’elle vient aux rassemblements ; mon frère cadet manifeste aussi. Mon père, ingénieur, est expatrié en Jordanie, mais il nous soutient de tout son cœur. J’ai la chance d’avoir des parents idéalistes. J’appartiens à une génération qui n’a pas connu la guerre civile (1975-1990). Je ne raisonne pas avec ce « logiciel », je rêve de sang neuf en politique, que l’on chasse du pouvoir ceux qui ont volé ce pays. Seul un changement de gouvernance pourra influer sur l’économie. Nous, la jeunesse, n’avons pas beaucoup de perspectives. Contrairement à d’autres, je n’ai jamais pensé à émigrer. Je veux vivre au Liban.

Je rencontre des personnes merveilleuses sur la place Riad Al-Solh, des gens de divers horizons que je n’aurais pas eu la chance de connaître autrement. Ça me fait mal, quand je vois tous les jeunes qui n’ont pas eu la chance d’étudier. J’assiste aux nombreuses discussions organisées. Je regrette que certains soient enfermés dans leur mode de pensée, mais des points de vue variés sont exprimés. Il y a beaucoup de solidarité : des mamans cuisinent pour nous. Sur la place Riad Al-Solh, je participe à un cordon de femmes, pour séparer les policiers des jeunes hommes qui manifestent. Je veux que notre mouvement reste pacifique. La violence ne mène à rien.

Quand elle est à la maison, ma mère est collée à la télévision, et chaque fois qu’il y a un peu de tension ici, elle m’appelle. Dans notre quartier, à Sad El-Bauchrieh, une banlieue au nord de Beyrouth, des gens critiquent la paralysie du pays, le blocage des routes, la grève… Ils disent qu’ils veulent continuer à travailler. Mais personne ne m’a fait de reproches. J’oscille entre la déception, parfois, et l’énergie et l’optimisme, le plus souvent.« 

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Notre colère nous rapproche, on a fait tomber le mur des peurs confessionnelles » : le peuple du Liban uni contre ses dirigeants

[ad_2]

Source link

Have something to say? Leave a comment: