Guerre identitaire dans la littérature américaine

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La vie des idées. Dans l’Amérique de 2020, William Shakespeare, auteur blanc créateur d’un Othello noir, aurait-il pu conter les amours contrariées d’un Maure et d’une jeune Vénitienne ? Pas si sûr, si l’on en croit les récentes polémiques mêlant défense des minorités, soupçon de racisme et « political correctness » qui agitent le milieu littéraire américain.

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Jeanine Cummins n’est sans doute pas une nouvelle Shakespeare – certains critiques l’ont quand même comparée à John Steinbeck pour sa description de la misère sociale –, mais cette auteure américaine incarne désormais, à son corps défendant, une forme de tribalisme qui n’épargne pas le monde de la création. Son roman American Dirt (Flatiron Books, non traduit), qui retrace les tentatives d’une Mexicaine et de son fils pour entrer illégalement aux Etats-Unis, a suscité une vague de critiques telle que son éditeur, évoquant des « menaces ciblées contre des librairies et l’auteure », a annulé sa tournée de promotion.

Qu’une de ses grands-mères soit portoricaine (quoique d’une famille aisée) et qu’elle ait passé plusieurs années à enquêter sur les migrants n’ont apparemment pas suffi à conférer à cette auteure de trois autres livres une légitimité suffisante pour écrire une fiction sur ce sujet politique et identitaire. Le fait qu’elle se soit librement inspirée d’auteurs mexicains pour trousser son roman a même signé son crime : tentative d’appropriation culturelle.

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Alors que plusieurs maisons d’édition s’étaient battues pour le publier, que le roman avait reçu un bon accueil dans la presse et que des tractations étaient lancées pour en tirer un film, des critiques émanant d’écrivains et de journalistes d’origine latina ont coupé court au conte de fées. Myriam Gurba, écrivaine américaine d’origine mexicaine, a ironisé sur sa consœur qui, utilisant « la justice sociale comme cache-sexe », prétend « donner une voix aux sans-voix » : « Nous avons écrit ces mêmes histoires. Mais personne n’y porte attention car nous ne sommes pas blancs. » Non sans ironie, Jeanine Cummins avait précisé dans une note : « J’aurais aimé que quelqu’un d’un peu plus foncé que moi écrive ce livre. »

« Fatras raciste »

Au nom de la défense des minorités, d’autres ont aussi souligné les difficultés des auteurs latinos à trouver une audience pour conter leur propre histoire, dénoncé un roman de gare non dénué de stéréotypes, relevé des incohérences dans les descriptions du Mexique ou des drames vécus par les candidats à l’immigration. Bref, un ouvrage naïf écrit par une Américaine blanche pour un public d’Américains blancs.

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