Gilbert Espitalier-Noël: «Les événements sportifs, un énorme potentiel pour le tourisme»

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Gilbert Espitalier-Noël, Chief Executive Officer de Beachcomber Resorts & Hotels.

Gilbert Espitalier-Noël, Chief Executive Officer de Beachcomber Resorts & Hotels.

Le parcours de Beachcomber Resorts & Hotels (enseigne commerciale de NMH), ces derniers temps a été semé d’embûches propres au monde hôtelier, sujet à des mutations constantes. Gilbert Espitalier-Noël explique comment le groupe s’en est sorti. Les maîtres mots sont : diversification, adaptabilité, flexibilité, innovation, modernisation des outils de gestion.

Les finances de New Mauritius Hotels (NMH) ne brillent pas depuis quelque temps. Les résultats pour l’exercice 2015, sanctionnés par une perte de Rs 600 millions, en sont une parfaite illustration. Quel est l’impact du plan de restructuration du groupe sur la tendance à encaisser des pertes qui a récemment ponctué son évolution ? 
Il est vrai que NMH a souffert de conjonctures difficiles, qui ont pesé lourd sur sa profitabilité ces dernières années. L’environnement dynamique d’aujourd’hui requiert que l’entreprise soit en constante mutation. NMH s’est embarqué dans une phase de restructuration particulièrement profonde et délicate depuis quatre ans. Le groupe faisait face à de grosses difficultés, notamment au Maroc, aux Seychelles et dans certaines de ses autres filiales dont White Sand Tours et Beachcomber Tours France. Les pertes associées à ces opérations se chiffraient à environ Rs 600 millions en 2015. Elles masquaient les profits réalisés sur les opérations mauriciennes. Nous avons aujourd’hui réussi à restructurer ces opérations déficitaires. À partir de 2020, elles seront toutes profitables. 

Nous nous sommes aussi engagés au cours des dernières années dans un important exercice de modernisation, tant au niveau de nos infrastructures hôtelières qu’à celui de nos opérations. Avec la séparation de Semaris et de NMH à la fin de ce mois, nous atteignons une étape très importante dans cette restructuration.

Bien souvent, on explique les pertes non pas par ce qui les a occasionnées mais par les mesures prises pour rebondir. Quels ont été les facteurs qui ont plombé le potentiel de NMH à réaliser des bénéfices ? 
Les opérations mauriciennes ont été et restent profitables. Les résultats financiers du groupe ont été sérieusement affectés par les contre-performances à l’étranger.

L’opinion publique a du mal à admettre qu’un groupe aussi expérimenté dans la gestion de son patrimoine hôtelier qu’est Beachcomber ait fait presqu’un naufrage au Maroc. Que s’est-il passé ? 
Je peux comprendre cet étonnement. Même si je n’étais pas dans le groupe à cette période, je pense pouvoir faire l’analyse suivante : le groupe a démarré les projets au Maroc en 2007, soit juste avant la crise financière. Cette crise, qui a duré plusieurs années, a handicapé considérablement le lancement de l’hôtel et celui du projet immobilier. À peine les effets de cette crise passés, le Maroc a subi de plein fouet les conséquences du Printemps arabe et la tension géopolitique dans la région, avec une baisse considérable des arrivées touristiques dans le pays. Les touristes sont généralement prudents par rapport à la situation de cette partie du monde. De plus, je pense que le management de l’époque a sous-estimé les difficultés liées au développement et à l’opération de projets de cette envergure à des milliers de kilomètres de notre base d’opération, dans un contexte socio-économique totalement diffèrent de celui de l’océan Indien. 

Le management a aussi occulté un élément important : la commercialisation sur ce marché est différente du modèle que nous connaissons à Maurice. C’est du B to C. Le client achète davantage en direct, sans passer par un tour opérateur. De ce fait, pour opérer un hôtel à Marrakech, il est essentiel d’avoir une marque internationale forte, une enseigne reconnue de par le monde.

L’endettement est un des facteurs qui a contribué à une baisse de la performance de NMH. Quelle est la nature de cet endettement ? 
À la fin de 2007, NMH avait une dette d’environ Rs 3 milliards. Entre 2007 et 2012, l’endettement est monté à Rs 16 milliards, soit une hausse de Rs 13 milliards en cinq ans. Cette hausse s’explique par des investissements très importants pendant cette période, dont environ Rs 7 milliards au Maroc, Rs 4 milliards pour le redéveloppement du Trou Aux Biches Beachcomber, dont le coût a été nettement plus élevé que prévu et Rs 2 milliards pour l’achat des terrains aux Salines, Rivière-Noire. De plus, ces investissements ont été engagés juste avant la crise financière, qui a considérablement réduit les profits des opérations existantes.

Comment le fardeau de l’endettement a-t-il été géré ? 
À partir de février 2015, nous avons engagé un nombre considérable d’initiatives courageuses et innovantes : une émission d’actions de préférence à hauteur de Rs 1,8 milliard, une restructuration des termes de la dette, qui a permis une réduction du taux d’intérêt moyen et un rééchelonnement du remboursement sur un plus long terme, la vente d’un certain nombre d’actifs «non-productifs» tant à Maurice qu’aux Seychelles, la création de Beachcomber Hospitality Investments, une filiale de NMH dans laquelle nous avons accueilli un partenaire financier.

Où en êtes-vous avec l’endettement ? 
La dette de la holding NMH, dans laquelle se trouvent les opérations hôtelières mauriciennes, a été considérablement réduite. Elle est aujourd’hui de Rs 11 milliards. Les intérêts payés par le groupe en 2019 se chiffrent à Rs 750 millions, contre Rs 1 milliard il y a trois ans. Nos projets en cours aux Seychelles et aux Salines seront financés directement par les filiales du groupe. La réalisation de ces projets ne va pas impacter l’endettement de la holding. Ces dettes contractées pour le financement de ces projets sont «ring-fenced» dans ces filiales et seront supportées intégralement par les opérations de ces filiales, sans garantie de la holding.

Vous êtes à la tête du groupe NMH depuis 2015. Quels ont été les défis auxquels vous avez été confrontés ?
Lors de ma prise de fonction en juillet 2015, les défis à relever étaient nombreux. Tout en gérant le problème de la dette, il fallait renverser la performance négative de certaines opérations du groupe, dont celles mentionnées précédemment. Les équipes étaient affectées par la détérioration profonde de la performance du groupe. Il était nécessaire de leur redonner de la motivation et de la fierté. Il fallait aussi engager une modernisation de nos hôtels et de nos systèmes de gestion, qui avaient pâti d’un manque d’investissement. Il y avait aussi un travail important à entreprendre au niveau de la marque, afin de redynamiser cette entreprise pionnière à Maurice. Il fallait moderniser et innover.

«L’érosion des plages est sans aucun doute une menace majeure pour notre industrie.»

Vous êtes arrivé à un moment où l’avenir du groupe nécessitait l’amorce d’une nouvelle étape dans son développement. Quels sont les facteurs fondamentaux autour desquels va s’articuler le devenir du groupe ? 
Ma priorité au cours des quatre dernières années a été d’entreprendre une restructuration profonde du groupe. L’objectif était de rendre profitables les opérations fortement déficitaires, restructurer l’endettement et consolider l’ADN de Beachcomber en mettant nos 5, 000 artisans au coeur de notre action. Aujourd’hui, j’ai le sentiment que ces objectifs ont été atteints. 

Nous allons maintenant nous concentrer sur l’excellence opérationnelle, en capitalisant sur l’expérience et le savoir-faire exceptionnels et uniques de nos équipes. Nous entrons dans une phase dans laquelle efficience, innovation opérationnelle et commerciale, digitalisation et modernisation de nos outils de gestion seront les maîtres mots.

La protection et la conservation de l’environnement, a priori, devraient tout naturellement faire partie de votre stratégie de développement. Quels sont les facteurs qui constituent une menace ou un handicap pour le futur de NMH dans ce domaine ? 
L’érosion des plages est sans aucun doute une menace majeure pour notre industrie. Il nous faut combattre cette érosion comme le font avec succès de nombreux pays, en désensablant les lagons et en ramenant le sable sur nos plages. Il faut aussi créer de nouvelles plages artificielles qui seront destinées au public mauricien. Il suffit d’aller voir ce que font les îles voisines dans ce domaine. Si nous ne prenons pas des actions fortes afin de préserver nos plages, nous perdrons progressivement cet atout majeur qu’a notre pays.

Comment le groupe s’est-il engagé à aligner son mode d’opération sur les critères qui s’inspirent d’un développement durable ? 
Beaucoup de gens ne se rendent pas compte que Beachcomber a été pionnier depuis 1985, par rapport à l’intégration dans ses opérations hôtelières, des pratiques respectueuses de l’environnement. Nous n’avons pas attendu que le développement durable soit «à la mode» pour mettre en place des actions au niveau de l’énergie, de l’eau, de la gestion des déchets et de la protection de biodiversité. 

Le développement durable occupe une place stratégique dans notre plan d’action. Il ne fait aucun doute que le principal atout de notre île, au-delà de la qualité exceptionnelle de sa population, est son capital environnemental. C’est sur cet atout que repose l’existence même de notre industrie touristique. 

Beachcomber s’est engagé, de façon forte et pérenne, dans la mise en place de très nombreuses initiatives afin d’apporter sa contribution à la préservation de notre environnement. La certification EarthCheck est pour nous un moyen de nous pousser à faire plus chaque jour et, surtout, de nous assurer que nos actions apportent une vraie différence dans la durée.

Le moment est venu de ne plus se cantonner à un tourisme traditionnel qui a fait son temps. Comment ? 
Je ne pense pas que nous ayons atteint une limite. Le tourisme traditionnel restera pour longtemps encore la base de l’industrie. Il faut néanmoins continuer à diversifier notre offre touristique avec de nouveaux produits, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des hôtels. Il nous faut aussi une meilleure cohérence dans la construction et la communication de l’image de la destination. Il faut faire attention à ne pas tirer l’image vers le bas, avec une prolifération d’offre de type AirBnB deux-étoiles.

La visite du pape François a démontré que des événements ponctuels ayant une portée internationale peuvent contribuer à faire de Maurice une destination pour un nouveau genre de tourisme. Quels sont les autres événements dont le pays peut exploiter l’immense potentiel de retour ? 
Les événements sportifs représentent le plus gros potentiel. Déjà, de nombreux événements golfiques attirent une clientèle intéressante. Chez Beachcomber, les événements comme l’Ultra Trail Raidlight Beachcomber et le Mauritius Tour Beachcomber permettent de mieux remplir nos hôtels en basse saison. Nous pouvons faire encore plus. Cependant, ces initiatives se construisent sur le long terme.

Comment les infrastructures modernes associées au complexe sportif de Côte-d’Or pourraient-elles être exploitées comme un atout susceptible d’attirer un tourisme d’un nouveau genre ? 
Comme cela a été le cas pour le golf, le développement d’infrastructures qualitatives devrait permettre d’organiser des compétitions dans des disciplines comme la natation, le rugby ou le football. Néanmoins, cela demande l’implication du secteur privé qui est beaucoup mieux structuré pour organiser des événements de ce genre. Un partenariat public-privé est donc souhaitable dans ce domaine.

Outre la chute inattendue du voyagiste britannique Thomas Cook, un autre phénomène compromet l’avenir du tourisme : la possibilité que certaines lignes de croisières, dont Costa Crociere S.p.A, éliminent la destination Maurice de leur parcours. Comment en atténuer les effets et rebondir ? 
La chute de Thomas Cook n’est pas si inattendue que cela. Depuis quelques mois, l’industrie suivait l’affaire, espérant qu’une solution pérenne soit trouvée. Nos pensées vont d’abord aux 22 000 personnes qui ont perdu leur emploi. C’est un coup dur pour l’industrie. Notre priorité est bien entendu nos clients. Maurice est une destination longcourrier, vendue à 65 % par les tour-opérateurs. La faillite de Thomas Cook et de ses nombreuses filiales est donc une très mauvaise nouvelle pour la destination. Il y aura indéniablement des retombées négatives sur les arrivées et les recettes. Les dégâts à court terme sont la perte de tous les clients qui avaient réservé et payé leur séjour au voyagiste et qui, avec la faillite, ne peuvent plus séjourner dans les hôtels réservés. La fermeture de Thomas Cook et la possibilité que certaines lignes de croisières éliminent la destination Maurice sur leur parcours mettent en lumière la fragilité de l’industrie et sa vulnérabilité aux facteurs exogènes.


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Lexpress

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