Fang Fang, l’Antigone de Wuhan

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LETTRE DE PÉKIN

L’écrivaine chinoise Fang Fang, à Wuhan, le 22 février.
L’écrivaine chinoise Fang Fang, à Wuhan, le 22 février. STR / AFP

Telle l’héroïne grecque qui ne voulait pas sacrifier sa famille à la raison d’Etat, une écrivaine chinoise, Fang Fang, est aujourd’hui vouée aux gémonies pour offrir à ses frères de Wuhan, morts du Covid-19, la seule épitaphe digne d’eux : la vérité.

Agée de 64 ans, Fang Fang n’a pourtant rien d’une dissidente. Jusqu’à sa retraite, elle était même la présidente de l’Association des écrivains de la province du Hubei, dont Wuhan est la capitale. La plupart de ses livres racontent avec humour et tendresse la vie des « petites gens » de cette ville où elle réside depuis une quarantaine d’années et dont elle est devenue l’une des personnalités marquantes.

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Des journalistes en vue et des policiers figurent au nombre de ses amis. Son dernier roman, Funérailles molles (L’Asiatèque, 2017), a reçu une distinction prestigieuse, le prix Lu Yao, avant d’être sévèrement critiqué par les néomaoïstes, qui n’ont pas supporté cette dénonciation à la fois subtile et sévère de la réforme agraire entreprise par Mao dans les années 1950.

Autorités en alerte

Cette fois, les critiques n’ont même pas attendu la sortie du livre pour passer à l’attaque. La simple annonce, par Fang Fang, le 25 janvier, qu’elle allait publier sur les réseaux sociaux un journal de Wuhan, ville en quarantaine, a mis les autorités en alerte.

Il est vrai que, dès le 26 janvier, plus de 20 millions d’internautes avaient lu son premier blog, 30 millions le jour suivant. Alors que la terre entière découvre, hallucinée, ce confinement inédit d’une ville de 11 millions d’habitants, que nul ne croit les médias officiels et que les médecins ont ordre de se taire, ce journal apparaît comme la meilleure source d’information « de l’intérieur ». Comme le réseau social Weibo ferme de temps à autre son compte, Fang Fang trouve refuge dans la section des blogs du magazine en ligne Caixin. De son côté, une Chinoise qui vit à l’étranger, Er Xiang, les relaie également sur le réseau WeChat.

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Fang Fang mettra fin à ce journal le 24 mars, date à laquelle les autorités annoncent la réouverture de la ville le 8 avril. Dans ses soixante posts, elle dénonce le manque de masques, les hôpitaux débordés, l’incurie des dirigeants…

Le 10 mars, jour de la visite du président chinois Xi Jinping à Wuhan, elle note : « Ne me parlez pas de victoire. Seulement une fin. »

« Il y a quatre parties dans son journal. Elle décrit d’abord le temps qu’il fait ainsi que ses humeurs, d’une façon très classique. Puis elle dénonce les attaques dont elle fait l’objet de la part des ultranationalistes qui, selon elle, ne peuvent être que protégés par des personnes haut placées. Elle parle beaucoup de la maladie, de ce qu’elle en sait, grâce aux témoignages qu’elle recueille et, enfin, elle parle d’elle, de sa vie confinée », témoigne Geneviève Imbot-Bichet, qui, avec Frédéric Dalléas, traduit ce texte qui sera publié chez Stock à la rentrée, sous le titre Wuhan, ville close.

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