« Et si on vous kidnappait ? »

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Correspondants de presse (3/12).   Pour le journaliste du « Monde » Benjamin Barthe, Beyrouth est comme une anomalie dans l’étouffoir proche-oriental, et un précieux poste d’observation pour comprendre la région et le conflit syrien.

Par Publié aujourd’hui à 05h18, mis à jour à 06h29

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YASMINE GATEAU

« Ça vous ferait quoi si l’on vous kidnappait, là, tout de suite ? » La question m’est adressée. Je viens de m’asseoir dans le bureau d’Ibrahim Al-Amine, le directeur du quotidien libanais Al-Akhbar, fer de lance de la gauche anti-impérialiste arabe. Nous sommes quelques jours après la tuerie du 7 janvier 2015 dans les locaux de Charlie Hebdo. L’attentat ayant une dimension proche-orientale, j’ai décidé de faire parler des figures de la presse libanaise, l’une des plus riches du monde arabe. Ce sera l’occasion de me présenter, quatre mois après mon installation à Beyrouth, comme correspondant régional du Monde.

Al-Amine, ex-communiste reconverti en thuriféraire du Hezbollah, le parti-milice pro-iranien libanais, me toise de derrière ses lunettes. L’homme est célèbre pour ses éditos au bazooka contre l’ambassade de France à Beyrouth, tête de pont, selon lui, de la conspiration visant à renverser Bachar Al-Assad, le président syrien, qu’Al-Akhbar soutient.

Face au représentant du Monde, pas de salamalecs. « Vous m’avez bien compris, comment réagiriez-vous si l’on vous kidnappait… pour vous échanger contre Georges Ibrahim Abdallah, que votre pays a aussi kidnappé ? On va finir par en arriver là un jour. »

Militant libanais propalestinien, incarcéré depuis 1984 en France, où il a été condamné à perpétuité pour sa complicité dans l’assassinat de deux diplomates en poste à Paris, l’un israélien et l’autre américain, Georges Ibrahim Abdallah est la cause d’Al-Akhbar. Le journal le présente comme un prisonnier politique, un cas flagrant de déni de droit dans la « patrie des droits de l’homme ».

Le « prix » des reporters étrangers

L’accueil d’Al-Amine a un goût un peu douteux. Au Liban, l’enlèvement de journalistes français a une histoire et un visage, celui de Jean-Paul Kauffmann, retenu otage à Beyrouth de 1985 à 1988. C’est à cette époque que les reporters étrangers sont devenus une arme. Un pion sur le plateau de jeu des puissants.

Et trente ans plus tard, leur prix dans le pays voisin, la Syrie, n’a jamais été aussi élevé. Il y a ceux que l’on fait taire de manière expéditive, comme Rémi Ochlik et Marie Colvin, tués à Homs en 2012, dans un bombardement du régime ; ceux que l’on monnaye au prix fort, comme Didier François et Nicolas Hénin (2013-2014), trophées de chasse de l’organisation Etat islamique (EI) ; et ceux que l’on supplicie en mondovision, comme James Foley, le premier occidental égorgé par le mouvement djihadiste, en août 2014, une exécution filmée qui a fait le tour de l’Internet.

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