En Transcarpathie, l’art russe de l’intox fait des étincelles

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Par Benoît Vitkine

Ingérences russes (4/5). La Russie de Vladimir Poutine s’attache depuis plusieurs années à étendre par tous les moyens ses réseaux et son influence à l’étranger. Parmi son cyberarsenal, les opérations de manipulation, comme celle menée dans la ville ukrainienne d’Oujgorod, en 2018.

C’est l’histoire d’une manipulation si retorse qu’elle ferait aisément passer les « fake news » sur les réseaux sociaux pour d’inoffensives distractions pour enfants. Une opération d’intoxication sur laquelle plane l’ombre de la Russie et qui met en scène une galaxie improbable d’acteurs venus de plusieurs pays d’Europe, avec pour cible un Etat aussi fragile que stratégique : l’Ukraine.

Tout commence dans l’une des villes les plus occidentales de ce pays, Oujgorod (120 000 habitants), une cité pauvre mais charmante située près des frontières slovaque, hongroise, roumaine et polonaise. Le 4 février 2018, peu avant 1 heure du matin, trois hommes arpentent la rive droite de la rivière Ouj, à quelques encablures du centre-ville, à l’architecture très Mitteleuropa. Ils s’arrêtent devant le numéro 5 du quai Orthodoxe, où sont situés les locaux de l’Association culturelle hongroise d’Oujgorod, que tout le monde ici appelle la « Maison hongroise ».

Sur les caméras de surveillance, on distingue deux silhouettes tenter de mettre le feu au bâtiment. La nuit est humide, c’est un échec. Le trio repart vers une station-service des faubourgs, achète de l’essence puis revient finir le travail. A 4 heures du matin, le feu a enfin pris. Les trois hommes repassent à leur hôtel avant de quitter la ville en bus. Ils franchissent la frontière slovaque à 6 heures, au moment où les voisins de la Maison hongroise découvrent le sinistre.

Carrefour slave

D’un bout à l’autre de l’opération, les incendiaires ont fait preuve d’amateurisme, laissant ici ou là des traces de leur passage. Les images de vidéosurveillance et les références de leurs passeports aident à les identifier. Trois semaines après les faits, ils sont arrêtés par les services de sécurité polonais à l’issue d’une enquête menée conjointement avec leurs homologues ukrainiens. Alors que tout a été fait, à l’origine, pour faire croire à la culpabilité de nationalistes ukrainiens, jusqu’à la croix gammée dessinée sur le bâtiment, il s’avère qu’il s’agit de néonazis polonais. D’où cette énigme : pourquoi être venu mener une telle opération à plusieurs centaines de kilomètres de chez eux ?

Pour comprendre l’affaire, il faut se plonger un instant dans l’histoire bien particulière de cette région de l’Ouest ukrainien. La Transcarpathie, au cœur d’une Europe centrale dont les frontières n’ont cessé de se déplacer tout au long du XXe siècle, est « la région la plus multiculturelle d’Europe », assure Yosif Rezesh, chargé des minorités au sein de l’administration régionale. Vivent ici des Roumains, des Russes, des Roms, des Slovaques, des Allemands… et environ 150 000 Hongrois, soit 12 % des habitants de la région.

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