En Russie, le spécialiste du goulag Iouri Dmitriev condamné pour l’histoire

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L’historien Iouri Dmitriev, sous escorte policière, après son audition au tribunal de Petrozavodsk, le 22 juillet 2020. (Capture d’écran tirée d’une vidéo.)

L’un des procès les plus importants de ces dernières années en Russie s’est achevé, mercredi 22 juillet, de manière peu lisible, avec un verdict étonnamment clément, visiblement rendu dans un souci d’apaisement, voire pour sauver la face d’une justice qui aura fait preuve d’un acharnement hors du commun.

Reconnu coupable de violences sexuelles sur sa fille adoptive, l’historien Iouri Dmitriev a reçu une peine de « seulement » trois ans et demi de prison. Au regard de la gravité des faits reprochés, la condamnation est inhabituellement légère. Le procureur, lui, avait réclamé quinze ans.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Iouri Dmitriev est poursuivi par la justice russe pour ses activités dérangeantes d’historien des répressions staliniennes »

Iouri Dmitriev, qui est âgé de 64 ans et a déjà passé plus de trois ans en détention préventive, devrait pouvoir sortir de prison en novembre. Pour nombre de ses partisans, venus le soutenir devant le tribunal de Petrozavodsk, la capitale de la République de Carélie, cette condamnation est un acquittement qui ne dit pas son nom, même si elle lui laisse accolée l’étiquette infamante du pédophile et l’empêchera probablement de revoir sa fille adoptive avant longtemps. Si un revirement judiciaire est toujours possible, c’est bel et bien d’un soulagement, amer, qu’il s’agit.

Emblème de la Russie poutinienne

Ce verdict en demi-teinte, comme conçu sur mesure, sonne surtout comme une confirmation pour ceux, nombreux, qui ont toujours dénoncé des poursuites fantaisistes et motivées politiquement. Depuis 2016, la justice n’aura ainsi jamais levé le soupçon originel, celui d’une procédure dirigée non contre l’homme Iouri Dmitriev, mais contre le personnage public devenu, par ses recherches dans les archives, par ses fouilles dans les forêts de Carélie, le symbole de la lutte contre l’enfouissement de la mémoire des répressions staliniennes et du goulag.

Cette affaire fortement médiatisée était même devenue un emblème de la Russie poutinienne, mêlant toute-puissance des services de sécurité, justice aux ordres et, surtout, une obsession mémorielle portée au rang de politique d’Etat.

Car avant d’être associé à l’accusation de pédophilie, le nom de Iouri Dmitriev le fut à l’un des lieux les plus importants de la Grande Terreur stalinienne, Sandarmokh. Environ 9 000 personnes furent fusillées en 1937 et 1938 et enterrées dans 236 fosses communes dans cette forêt située sur les rives du lac Onega. Ces victimes anonymes furent sorties de l’oubli auquel elles étaient destinées par la détermination de M. Dmitriev et de quelques autres.

A la tête de la branche locale de l’ONG Mémorial, l’historien amateur allait mener de front, dès la fin des années 1980, une double tâche : travail d’archives, d’abord, pour donner un nom à chacun des exécutés, retrouver les documents relatifs à chaque meurtre, chaque bourreau ; travail de terrain rude et pénible, ensuite, qui a vu l’homme, barbe longue et allure de moine-soldat, creuser inlassablement la terre pour exhumer les corps des fosses communes, assembler les milliers d’os éparpillés dans le sol.

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