En Angola, la milliardaire Isabel dos Santos cernée par la justice

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La femme d’affaires angolaise Isabel dos Santos, le 5 février 2018 à Maia, au Portugal.
La femme d’affaires angolaise Isabel dos Santos, le 5 février 2018 à Maia, au Portugal. MIGUEL RIOPA / AFP

La justice angolaise a annoncé, lundi 30 décembre dans la soirée, la saisie préventive des comptes bancaires et le gel des actifs des entreprises d’Isabel dos Santos, la fille de l’ancien président angolais. Son époux danois d’origine congolaise, Sindika Dokolo, et le Portugais Mario da Silva, l’un des conseillers financiers et prête-nom du couple, sont également visés par cette décision du tribunal de Luanda sur demande du service national de recouvrement des avoirs. L’Etat angolais accuse Mme dos Santos et M. Dokolo d’avoir détourné plus d’un milliard de dollars (plus de 890 millions d’euros).

Parmi les entreprises d’Isabel dos Santos concernées se trouvent le géant national des télécoms, Unitel, mais aussi des banques importantes et la cimenterie Cimangola, créée récemment avec Sindika Dokolo. Sur Twitter, elle a adressé lundi soir « un message de tranquillité et de confiance à [ses] équipes » et précisé : « La route est longue, la vérité l’emportera. »

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Sous le règne de son père, José Eduardo dos Santos (1979-2017), Isabel dos Santos a pu s’emparer de tout un pan de l’économie du pays, deuxième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne, et ainsi bénéficier d’un accès privilégié à des fonds publics en partie détournés, selon les soupçons des autorités angolaises. Télécoms, diamants, pétrole, banque, brasserie, immobilier, « consulting », urbanisme, grande distribution, médias… Son empire économique tentaculaire, piloté avec son époux à travers une cascade de sociétés offshore, s’étend aussi au Portugal, où elle détient notamment des participations dans des banques.

La femme la plus riche d’Afrique

Agée de 46 ans, cette milliardaire considérée comme la femme la plus riche d’Afrique vit entre Lisbonne et Londres depuis qu’elle est ciblée, comme plusieurs membres du clan dos Santos, par la spectaculaire lutte anticorruption lancée par le président Joao Lourenço. Depuis près de deux ans, Isabel dos Santos n’est pas retournée en Angola et n’a pas souhaité coopérer avec la justice depuis l’ouverture, en mars 2018, d’une enquête sur un « transfert suspect ».

Il s’agit de 38 millions de dollars versés d’un compte de l’entreprise pétrolière d’Etat Sonangol – qu’elle a dirigée de juin 2016 à novembre 2017 – vers une société opaque établie à Dubaï. Son successeur à la tête de la Sonangol, Carlos Saturnino, s’était par ailleurs publiquement étonné d’avoir découvert des dépenses de consultance avoisinant les 135 millions d’euros. Isabel dos Santos avait alors exprimé son « indignation totale » et dénoncé des « accusations et insinuations graves ».

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Les enquêtes de la justice angolaise ont toutefois avancé et mis en lumière d’importants détournements de fonds publics présumés. Car pour développer leur empire, Isabel dos Santos et Sindika Dokolo avaient pris l’habitude de s’associer à des entreprises d’Etat et ainsi de bénéficier d’argent public. La Sonangol n’y a pas échappé. Bien avant qu’elle soit nommée par son père à la tête du mastodonte pétrolier, Isabel dos Santos et son mari s’étaient imposés comme partenaires d’affaires de la compagnie.

Au début des années 2000, ils obtiennent ainsi un prêt de 75 millions d’euros pour co-investir avec la Sonangol via l’une de leurs sociétés offshore. La joint-venture acquiert, grâce à l’argent de l’Etat, des parts de l’entreprise pétrolière portugaise Galp. Un investissement stratégique… sauf que la Sonangol n’a jamais été remboursée et n’a perçu aucun dividende, selon le procureur général d’Angola.

La société diamantifère d’Etat, Sodiam, a été victime du même schéma. Là encore, c’est à travers une myriade de sociétés offshore dirigées par Mario da Silva que le couple s’associe à cette entreprise publique pour prendre le contrôle du joaillier genevois De Grisogono. « Sodiam a investi 146 millions de dollars suite à un crédit accordé par Banco BIC [une banque en partie contrôlée par Isabel dos Santos] et garanti par l’Etat angolais, qui continue à payer sa dette sans jamais avoir reçu de bénéfices à ce jour », note la justice angolaise.

Elle dénonce une « chasse aux sorcières »

A travers leur lacis de circuits financiers offshore, Isabel dos Santos et Sindika Dokolo auraient ainsi détourné puis « caché » à l’étranger des montants astronomiques puisés dans les fonds publics angolais. « Presque tout [leur] patrimoine est à l’extérieur du pays, laissant en Angola principalement des participations sociales dans plusieurs entreprises », peut-on lire dans l’ordonnance du tribunal de Luanda, datée du 23 décembre, consultée par Le Monde Afrique.

Ce document de seize pages révèle également que « la police judiciaire portugaise a intercepté un transfert d’une valeur de 10 millions d’euros en Russie ». Isabel dos Santos, se sachant traquée par les autorités angolaises, tente de transférer une partie de sa fortune dans le pays de sa mère, où elle-même, née à Bakou et russophone, a noué des relations étroites avec des oligarques et des personnalités politiques. Pour ce faire, elle a recouru à son partenaire d’affaires, le richissime Leopoldino Fragoso do Nascimento, alias général « Dino », l’un des piliers du système corruptif de l’ère dos Santos, également actionnaire d’Unitel. C’est de l’un de ses comptes au Portugal que le virement devait être effectué vers celui d’une société, Woromin Finance, ouvert dans une banque de Moscou.

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Cette nouvelle décision de la justice angolaise accentue la pression sur les responsables de crimes économiques commis sous l’ancien régime. Dans un contexte de crise, le président Joao Lourenço entend continuer ses efforts pour lutter contre la corruption et poursuivre la traque des avoirs détournés, qui a permis de rapatrier 5 milliards de dollars en Angola cette année. Isabel dos Santos dénonce une « chasse aux sorcières ». Sindika Dokolo, lui, parle d’une « cabale » et tente une contre-attaque face à Sodiam, à qui il reproche de lui avoir fait perdre 120 millions de dollars par son attitude « politique ». Il vient de déposer un recours auprès de la Cour d’arbitrage international de Londres.

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