En Allemagne, la crise sanitaire rebat les cartes de la succession d’Angela Merkel

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La chancelière allemande Angela Merkel au Bundestag, à Berlin, le 18 juin 2020.

Elle l’avait déjà dit à plusieurs reprises. Mais la question lui a été posée une nouvelle fois, jeudi 4 juin, à la télévision. « Pensez-vous être candidate à un cinquième mandat ? », fut-il demandé à Angela Merkel, ce soir-là, sur le plateau de la ZDF. « Non ! Non ! Vraiment pas », répondit la chancelière allemande.

Il y a six mois, la question aurait eu l’air totalement incongru. A la tête d’une coalition qui semblait à bout de souffle, Mme Merkel paraissait elle-même en fin de course. Qui aurait eu l’idée, à l’époque, de spéculer sur un cinquième mandat, alors que le doute était réel sur sa capacité de mener le quatrième jusqu’à son terme ?

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Est-ce à dire, pour autant, que la crise du coronavirus a éclairci l’horizon politique outre-Rhin ? A court terme, certainement. La « grande coalition » au pouvoir en Allemagne depuis 2018 n’a jamais paru aussi solide. Début juin, 62 % des personnes interrogées se déclaraient satisfaites du travail du gouvernement, selon le baromètre ARD-Deutschlandtrend. Sur la même période, la chancelière a gagné 18 points d’opinions favorables, de 53 % à 71 %, selon le même baromètre.

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S’ils stabilisent le paysage politique à court terme, de tels sondages ne doivent cependant pas faire illusion. A quinze mois des élections législatives de l’automne 2021, l’après-Merkel n’a, en réalité, jamais été aussi ouvert. Cela tient à l’absence de successeur évident de la chancelière au sein de son propre parti, depuis l’annonce, en février, de la démission de sa remplaçante à la tête du parti conservateur, Annegret Kramp-Karrenbauer (« AKK »). Son successeur, qui devait à l’origine être élu fin avril, ne le sera finalement qu’à la fin de l’année, lors d’un congrès prévu du 3 au 5 décembre à Stuttgart.

Une série de maladresses

A six mois de l’échéance, les pronostics sont impossibles. Sur les trois candidats déclarés, un seul semble n’avoir quasiment aucune chance de l’emporter : Norbert Röttgen, le président de la commission des affaires étrangères du Bundestag, certes très respecté pour sa maîtrise des questions internationales, mais sans relais puissants dans le parti.

Le deuxième, Friedrich Merz, est en difficulté. Battu de peu par « AKK » en 2018, il a été très peu audible durant la crise du coronavirus, ses positions ultralibérales le mettant en décalage avec les choix faits par le gouvernement et soutenus par la grande majorité des élus de la CDU, en faveur d’une intervention massive de l’Etat dans l’économie. Son image d’adversaire historique d’Angela Merkel, dont il pouvait tirer profit quand celle-ci était contestée au sein de la CDU, est devenue plus difficile à porter depuis que la chancelière a retrouvé son autorité sur ses propres troupes.

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Dans ce contexte, le favori semble être Armin Laschet qui, sur le papier, part avec deux avantages. Le premier est d’être le ministre-président de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé d’Allemagne, qui concentre à lui seul 130 000 des 400 000 adhérents de la CDU. Le second est de se présenter en « ticket » avec Jens Spahn, de 19 ans son cadet, plus apprécié que lui de l’aile droite du parti et qui a gagné en popularité et en notoriété, en tant que ministre de la santé, à la faveur de la crise du coronavirus, dans un pays qui compte à ce jour 9 000 morts, soit trois fois moins que la France, l’Italie ou l’Espagne.

Soutenu par les amis de Mme Merkel, dont il a toujours défendu la ligne centriste et pragmatique, M. Laschet a néanmoins commis une série de maladresses, ces dernières semaines, qui en ont fait la cible de violentes polémiques. La dernière : des propos sur les « Roumains et les Bulgares » dont il a lié la venue en Allemagne à la récente recrudescence de l’épidémie dans les abattoirs, où nombre d’employés viennent d’Europe de l’Est.

Volatilité des pronostics

S’il est élu président de la CDU, M. Laschet sera-t-il pour autant le prochain candidat des conservateurs allemands à la chancellerie ? Si la question se pose, c’est à cause d’un dernier homme, Markus Söder, ministre-président de Bavière et patron de la CSU, le parti allié à la CDU dans ce Land du sud de l’Allemagne.

Politiquement, ce dernier a largement tiré profit de l’épidémie de Covid-19. A la tête de la région la plus touchée par le virus, il a prôné, dès le début, une politique de fermes restrictions, là où Armin Laschet, dans un Land pourtant lui aussi très frappé, a toujours paru réticent à imposer des mesures contraignantes, au risque de paraître irresponsable. En outre, M. Söder a compris tout le profit qu’il pouvait tirer d’occuper, cette année, le rôle de porte-parole de l’ensemble des ministres-présidents des seize Länder du pays.

« Deux facteurs majeurs peuvent tout faire basculer : une deuxième vague du virus et une crise économique plus violente que prévue », Ursula Münch, académie de science politique de Tutzing (Bavière)

Une fonction qui lui a valu d’apparaître régulièrement aux côtés de Mme Merkel, lors de conférences de presse à Berlin, à l’issue de réunions auxquelles ses homologues – dont M. Laschet – assistaient depuis leurs capitales régionales par visioconférence. A ces occasions, M. Söder n’a pas manqué de dire tout le bien qu’il pensait de la chancelière, faisant oublier les critiques virulentes qu’il proférait, il y a quelques années, contre sa politique d’accueil des réfugiés.

Plus populaire que M. Laschet au niveau national, M. Söder sera-t-il tenté de s’imposer comme candidat des conservateurs à la chancellerie ? La question, a priori, se posera début 2021, après le congrès de la CDU. Pour l’heure, l’intéressé répond qu’il est comblé à Munich, tandis que nombre de commentateurs rappellent que les deux fois où un Bavarois a tenté de devenir chancelier (Franz-Josef Strauss en 1980 et Edmund Stoiber en 2002), ce furent des échecs.

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Reste l’essentiel : la volatilité de tels pronostics. Aujourd’hui, la CDU-CSU est donnée à 40 % dans les intentions de vote, en hausse de plus de dix points par rapport au début de l’année devant Les Verts (17-19 %) et le Parti social-démocrate (14-16 %). Mais l’heure des choix est encore loin. Comme le rappelle Ursula Münch, directrice de l’académie de science politique de Tutzing, en Bavière, « deux facteurs majeurs peuvent tout faire basculer d’ici là : une deuxième vague du virus et une crise économique plus violente que prévue ». Or, dans ce cas, les cartes pourraient être largement rebattues.

« Si l’épidémie revient, un Laschet, qui incarne depuis le début une politique d’assouplissement des contraintes, sera en difficulté. Quant à la crise, si elle est très forte, une grosse colère peut monter, ce qui pourrait très bien profiter à l’AfD. » Miné par des divisions internes, le parti d’extrême droite est aujourd’hui crédité de moins de 10 % dans les sondages. Mais il est le seul à ne participer à aucun exécutif régional ou local, ce qui en fait le seul à pouvoir se dédouaner de toute responsabilité sur la situation actuelle.

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