En Afrique, le florissant business de « l’or des conflits »

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Dans l'atelier, trois lingots apportés par un client la veille sont récupérés par Pascal SSERUNJOGI, l'ouvrier chargé de la première fonte. Le but de celle-ci est de séparer les impuretés de l'or.

FREDERIC NOY POUR LE MONDEFREDERIC NOY POUR “LE MONDE”

Par Joan Tilouine

Dans la région des Grands Lacs, le précieux métal attise toutes les convoitises. Plusieurs Etats se dotent de leurs propres raffineries pour tenter de capter la production de milliers de sites miniers artisanaux, situés dans des zones en proie à des violences entretenues par des groupes armés.

Avec ses plages sur le lac Victoria, ses hôtels et son aéroport international, la ville d’Entebbe offre un cadre idéal pour observer à bonne distance les conflits en cours de l’autre côté de la frontière, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Sur les rives de l’ancienne capitale ougandaise se croisent diplomates, espions, employés des Nations unies ou d’ONG, mais aussi chefs de guerre et hommes d’affaires souvent troubles. Tous apprécient ce havre de paix propice au farniente, au business et aux tractations, à moins d’une heure d’avion des provinces congolaises meurtries des Kivus et de l’Ituri, leur terrain d’action à tous.

Alphonse Katarebe, un Rwandais de 62 ans, est l’un de ces hommes d’affaires. Cet élégant colosse est au cœur d’un business florissant : le raffinage et la commercialisation de l’or en provenance de RDC. Un or dit « artisanal », car extrait de milliers de sites miniers le plus souvent dépourvus de permis d’exploitation, où des hordes de malheureux tamisent le sable de rivières ou creusent de manière rudimentaire, sans matériel industriel. Une bonne partie de ces sites ressemblent à des zones de non-droit, sous le contrôle d’hommes en armes, miliciens, militaires corrompus et autres gangsters des collines.

Si certaines mines peuvent rapporter jusqu’à 400 000 dollars par mois selon l’ONU, les petites mains de l’orpaillage n’en tirent pas bénéfice, avec un salaire journalier de moins d’un dollar, et pour seules « distractions » la consommation de drogue ou la prostitution.

Alphonse Katarebe, le PDG de la société African Gold Refinery (AGR), sur le site de l’entreprise, à Entebbe (Ouganda), le 20 février 2019. Opérationnelle depuis fin 2015, cette raffinerie d’or est la plus importante de la région des Grands Lacs.
Alphonse Katarebe, le PDG de la société African Gold Refinery (AGR), sur le site de l’entreprise, à Entebbe (Ouganda), le 20 février 2019. Opérationnelle depuis fin 2015, cette raffinerie d’or est la plus importante de la région des Grands Lacs. FREDERIC NOY POUR “LE MONDE”

Alphonse Katarebe connaît mieux que personne ce petit monde qui brasse des sommes considérables. Mais, pour gérer ses affaires, il n’a plus besoin de se rendre sur place comme autrefois ni de négocier avec les caïds de l’est de la RDC, une centaine de groupes armés congolais, rwandais et burundais, qui s’affrontent, s’allient, se trahissent et se financent largement par l’exploitation des ressources naturelles. Non, pour ce Rwandais installé en Ouganda, ce temps-là est révolu : il est désormais en bout de chaîne, et une bonne partie de l’or artisanal congolais vient à lui, à Entebbe.

Certification et traçabilité

Depuis le début de l’année, M. Katarebe est le PDG de la société ougandaise African Gold Refinery (AGR), qui a créé la plus importante raffinerie d’or de la région des Grands Lacs, opérationnelle depuis fin 2015. Il règne ainsi sur ce marché controversé en exportant 10 tonnes d’or par an à Dubaï. L’origine congolaise d’une partie de la marchandise « brute » a valu à AGR d’être accusée par les Nations unies et par des ONG d’acheter, de vendre, de blanchir et d’exporter ce qu’il est convenu d’appeler « l’or des conflits » (conflict gold).

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