comment la presse étrangère a rendu compte de l’ampleur de l’hécatombe due au Covid-19

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Cent mille : le nombre est colossal. La France va officiellement franchir le seuil tristement symbolique des 100 000 morts du Covid-19. Avant l’Hexagone, sept autres pays ont déjà dépassé le bilan à six chiffres : Etats-Unis, Brésil, Inde, Mexique, Royaume-Uni, Italie et Russie.

Lire l’analyse : Bientôt 100 000 morts en France, et l’indifférence s’installe

Plus d’un an après le début de la pandémie due au SARS-CoV-2, la litanie quotidienne des cas et des morts recensés a laissé place à une forme de lassitude. Comment alors rendre compte de l’ampleur du nombre de morts ? Comment honorer la mémoire des victimes ? Comment humaniser ces vies perdues, diluées dans les statistiques de la crise sanitaire ?

Aux Etats-Unis, pays le plus endeuillé au monde par la maladie, ces questions se sont posées dès le 27 mai 2020. A cette date, l’épidémie flambe et ce bilan n’est qu’« un titre de plus dans une cascade de sinistres nouvelles », écrit The Washington Post.

Pourtant, rappelle le quotidien, qui a matérialisé les victimes par des rayons lumineux sur une carte du pays, « c’est comme si tous les habitants d’Edison, dans le New Jersey, ou de Kenosha, dans le Wisconsin, étaient morts. C’est la moitié de la population de Salt Lake City [capitale de l’Utah] ou de Grand Rapids, Michigan ».

Capture d’écran de la carte réalisée par Lauren Thierny et Tim Meko pour le « Washington Post », à l’occasion des 100 000 morts du Covid-19 recensés aux Etats-Unis, le 27 mai 2020.

Le journal signe alors un éditorial intitulé « The lives lost », « Les vies perdues ». Sous ces mots, un module numérique retrace le nombre de décès cumulés, jour après jour, imputés au Covid-19 dans le pays, depuis le 6 février et le passage de vie à trépas de Patricia Cabello Dowd, la première victime officielle. Il faut ensuite à peine quinze semaines pour que les Etats-Unis, qui ne représentent que 5 % de la population mondiale, enregistrent un tiers des morts. Et dans les médias, une même envie : rendre hommage à ceux « qui se cachent derrière ces sombres statistiques », selon l’expression du Washington Post. 

En lieu et place des traditionnels articles, photographies ou autres graphiques, les noms de personnes emportées par le virus couvraient, quelques jours plus tôt, la « une » de l’édition dominicale du New York Times. « Joe Diffie, 62 ans, Nashville, star de la country music distingué par un Grammy », « Lila A. Fenwick, 87 ans, New York, première femme noire diplômée de la Harvard Law School » , « Myles Coker, 69 ans, New York, remis en liberté après avoir été condamné à la prison à vie »

« Je voulais quelque chose que les gens puissent relire dans cent ans pour comprendre le poids de ce que nous traversons », a expliqué Marc Lacey, le rédacteur en chef national du quotidien.

« Un nombre est une mesure imparfaite lorsqu’il est appliqué à la condition humaine », insiste la publication, qui décline aussi visuellement ce bilan sur son site Internet :

« L’immensité d’un tel nombre (…) met à l’épreuve notre capacité à concevoir, à comprendre que chaque chiffre, additionné pour atteindre 100 000, représente quelqu’un qui était parmi nous hier encore. Qui est la 1 233e personne morte ? La 25 587e ? La 93 431e ? »

Lire aussi le récit : Depuis un an, le deuil empêché des familles de victimes du Covid-19
Capture d’écran du long format réalisé sur le site du « New York Times » en hommage aux 100 000 morts du Covid-19 dans le pays, le 27 mai 2020.

Depuis, le bilan s’est encore assombri outre-Atlantique. Le 22 février, c’est un autre seuil qui a été franchi : celui des 500 000 morts. En un peu plus de douze mois, « plus d’Américains sont morts du Covid-19 que sur les champs de bataille de la première guerre mondiale, de la seconde guerre mondiale et de la guerre du Vietnam réunies », résume The New York Times.

Et si ces morts « se trouvaient dans une seule ville » ?

Lorsque le Brésil enregistre, à son tour 100 000 morts du Covid-19, le 8 août 2020, difficile de prendre la mesure de la tragédie humaine qui se joue. La pandémie a pourtant « fait plus de victimes que les homicides, les accidents de la route et le diabète en un an », insiste l’édition locale du radiodiffuseur britannique BBC. Mais dans ce pays, qui figure parmi les plus peuplés au monde, ces décès ne représentent que 0,05 % de la population.

Hommage aux victimes du Covid-19 devant un hôpital de Rio de Janeiro, le 24 mars.

Comment, dès lors, appréhender ce bilan ? « Que se passerait-il si ces 100 000 personnes se trouvaient dans une seule ville ? », s’interroge la BBC Brazil, avant de calculer la surface nécessaire pour enterrer ces corps dans quatre métropoles : Sao Paulo, Rio, Fortaleza et Manaus. Dans la première, ces sépultures occuperaient l’équivalent de près de quatre fois la superficie de l’Avenida Paulista, l’un des lieux les plus emblématiques de la ville.

Le 3 octobre 2020, l’Inde franchit à son tour le seuil des 100 000 morts recensés. Là encore, le bilan semble dérisoire dans une nation immense de 1,3 milliard d’habitants. Et les disparités géographiques sont importantes : trois Etats concentrent plus de la moitié (56 %) des décès − le Maharashtra (ouest), le Tamil Nadu (sud) et le Karnataka (sud). En outre, le taux de létalité − proportion de décès par rapport au nombre de cas confirmés − y est alors plus faible que la moyenne mondiale : 1,56 %, contre 2,98 %.

Au cours de la semaine précédente, pourtant, près d’« un décès sur cinq (19 %) dans le monde » est survenu en Inde rappelle le quotidien anglophone Hindustan Times. S’il aura fallu sept mois pour atteindre ce bilan, le rythme des victimes, lui, n’a cessé de s’accélérer :

« Le 12 mars 2020, le premier décès dû au Covid-19 a été signalé au Karnataka et 127 jours plus tard, le 16 juillet, on comptait 25 000 décès dans le pays. Le 15 août, l’Inde a franchi la barre des 50 000 morts seulement trente jours plus tard. Le 9 septembre, le nombre de décès a franchi la barre des 75 000 en vingt-cinq jours, et les 25 000 derniers décès ont été enregistrés en vingt-trois jours seulement. »

« Mettre un visage sur chacun des chiffres »

Le 20 novembre 2020, le Mexique rejoint le triste cénacle. Sur la chaîne d’information en continu Milenio, le présentateur rappelle : « Cent mille vies perdues, 100 000 familles amputées », avant que s’affichent en lettres blanches sur un écran noir, les noms de quelques victimes.

Puis, dans le courant de janvier 2021, c’est au tour du Royaume-Uni de franchir, selon l’expression des médias britanniques, cette « lugubre étape »« grim milestone ». Cent mille morts : « Plus que le nombre de civils tués pendant la seconde guerre mondiale et deux fois plus que le nombre de tués pendant la campagne de bombardement du Blitz, de 1940-1941 », compare l’agence Reuters.

A l’instar du quotidien conservateur The Telegraph et son projet « Never Forgotten » (« Jamais oubliés »), de nombreux journaux et sites Internet proposent à leurs lecteurs de contribuer par des témoignages à l’élaboration de mémoriaux virtuels. Avec une même ambition : « Mettre un visage sur chacun des chiffres », explique le Manchester Evening News.

Même démarche au Brésil, au Mexique, mais également aux Etats-Unis, et plus récemment en Italie, qui pleure elle aussi plus de 100 000 morts, depuis le 8 mars 2021. « Ils n’étaient pas seulement un numéro. Nous nous souvenons de certains d’entre eux pour nous souvenir de tous », annonce en préambule de son article dédié le quotidien La Repubblica.

La Russie a officiellement atteint ce seuil le 3 avril 2021. Nombre d’observateurs estiment pourtant que le bilan de l’épidémie de Covid-19 dans le pays est largement sous-estimé. « Pourquoi les Russes ne sont-ils pas plus en colère ? » face à cet excès de mortalité, s’interrogeait, dès février, le quotidien The Moscow Times. Avant d’avancer cette explication : « Selon les experts, cette indifférence peut s’expliquer par le fait que les médias contrôlés par l’Etat ne rendent pas compte de la surmortalité, que l’accent est mis sur l’impact économique de la pandémie et qu’il existe une tendance culturelle à accepter les décès à grande échelle. »

Lire aussi l’analyse : Face au Covid-19, la Russie a fait un choix millénaire : l’Etat plutôt que le citoyen



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