« Beaucoup craignent que les statues entraînent dans leur chute la complexité historique »

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La statue d’Edward Colston, un marchand d’esclaves, renversée par des manifestants antiracistes le week-end des 6-7 juin, a été repêchée hors du port de Bristol (Royaume-Uni), le 11 juin 2020.

Chronique. Les statues, on les ignore ou on les détruit. C’est le destin des « grands hommes » qui trônent dans la rue ou dans un square. Le plus souvent, elles meurent d’indifférence lente. Dès qu’elles font l’actualité, elles meurent plus vite. Dans six villes du sud des Etats-Unis, des sculptures de généraux confédérés – Lee et Jackson en tête – ont été souillées lors de manifestations contre le racisme policier envers les Noirs. Peinture rouge, tags, incendies, pancartes indiquant « traître » autour du cou, tentatives de déboulonnage.

Depuis que George Floyd est mort étouffé par un policier, le 25 mai, à Minneapolis (Minnesota), les Etats-Unis mais aussi la Grande-Bretagne et la Belgique, la France peut-être demain, voient nombre de statues insultées, dégradées, mises à terre. Le 9 juin, à Richmond (Virginie), Christophe Colomb fut décapité, incendié et jeté dans un lac. A cause de son action sanglante envers les Amérindiens.

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Le déboulonnage fut longtemps la marque d’un basculement politique, par exemple pendant la Révolution française. C’est aujourd’hui le signe d’une colère : la figure statufiée ne participe plus d’un roman national mais de fractures communautaires, elle est un symbole inflammable de la colonisation, de l’esclavage et du racisme. Du reste, le mouvement aux Etats-Unis a débuté en 2015, quand neuf Noirs ont été tués à Charleston (Caroline du Sud), puis s’est intensifié en 2017, après les émeutes de Charlottesville (Virginie). Des dizaines de statues évoquant le passé esclavagiste du pays ont alors été mises à terre.

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Il est probable que les cibles – à étendre aux plaques de rue ou écoles – vont se multiplier dans le monde en un combat sans nuances. Pour certains, déboulonner vise à vandaliser l’histoire ; pour d’autres, c’est faire l’histoire que d’abattre des figures glorifiant la mémoire de l’oppresseur. Pour certains, ce n’est pas en se vengeant sur la pierre mais en la faisant « parler » qu’on fait bouger une société. Pour d’autres, c’est le symbole d’un pouvoir qui les opprime toujours. Tandis qu’un égyptologue de l’université de Birmingham (Alabama) a expliqué comment s’y prendre techniquement pour abattre un obélisque confédéré, des activistes exhibent sur Internet leurs images de trophées à terre.

Risque d’anachronisme

Quand des communautés veulent effacer une représentation historique qu’ils ne reconnaissent pas comme la leur, où s’arrête le curseur ? C’est la question. Beaucoup craignent que les statues entraînent dans leur chute la complexité historique, que l’anachronisme s’impose – juger le passé avec nos valeurs d’aujourd’hui –, sans prendre en compte les facettes multiples d’un personnage.

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