Au Sénégal, la société civile rend hommage à George Floyd

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Des manifestants posent un genou à terre en hommage à George Floyd, sur la corniche de Dakar, le 9 juin 2020.

Sur la corniche de Dakar, face à l’océan qui sépare l’Afrique des Etats-Unis, une cinquantaine de Sénégalais ont posé un genou à terre pendant précisément 8 minutes et 46 secondes. La durée durant laquelle George Floyd, l’Afro-Américain tué le 25 mai par un policier blanc à Minneapolis, aux Etats-Unis, a été maintenu au sol avant de succomber. Cette manifestation était organisée par un collectif d’associations au moment des funérailles de la victime, mardi 9 juin. Si le nombre de 50 personnes, le maximum autorisé pour un rassemblement au temps du Covid-19, a limité l’opération, le lieu choisi a donné une profondeur particulière à ce moment. « Le mémorial Gorée-Almadies signifie beaucoup pour la communauté noire », explique Modiene Ndiaye, un manifestant, faisant référence aux nombreux esclaves partis vers les Etats-Unis depuis ces côtes.

« Les Noirs sont brimés depuis 400 ans, nous devons nous souvenir de l’histoire esclavagiste de l’île de Gorée, en face de Dakar. C’est l’Afrique qui a formé les Etats-Unis. Et la mort de George Floyd remue le couteau dans la plaie », rappelle, main vers l’océan, Diago Ndiaye, la présidente nationale du réseau Paix et Sécurité pour les femmes de l’espace Cédéao. Dans son boubou bleu et jaune traditionnel, elle est venue avec ses deux filles, jeunes adultes, dont Rokaya, pour qui « c’est l’occasion de dénoncer les agressions contre les Noirs aux Etats-Unis et partout dans le monde, car c’est un problème récurrent ». La jeune femme, tee-shirt et masque roses assortis, poursuit : « On est au XXIe siècle, on doit arrêter le racisme et la ségrégation ! »

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Pendant près de deux heures, des personnalités se sont passé le mégaphone pour prononcer des discours emportés par le vent de la mer. Autour, quelques policiers avaient pour mission de surveiller la petite assemblée masquée, respectant les distances sanitaires et arborant quelques pancartes « Black Lives Matter ». Ancien directeur d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest, fondateur du think tank Afrikajom Center et co-organisateur de cette mobilisation, Alioune Tine se montrait satisfait de la bonne tenue de l’événement.

Le samedi précédent, déjà, un petit rassemblement, plus spontané, avait réuni une trentaine d’individus, dont l’actrice et chanteuse Aida Sock. Mais cette fois, davantage de personnalités se sont déplacées ou ont signé la « déclaration de Dakar en hommage à George Floyd » publiée lundi. « L’Afrique ne saurait demeurer passive ni silencieuse face aux souffrances de sa diaspora », est-il inscrit au bas de ce texte qui condamne « les violences racistes subies par la sixième région d’Afrique ». Parmi les signataires, le rappeur Didier Awadi côtoie le militant Guy Marius Sagna ou le professeur Moussa Seydi, au front pour lutter contre le Covid-19 depuis trois mois.

Le silence de Macky Sall

Très symboliquement, les représentants des communautés musulmanes et chrétiennes sont aussi venus protester ensemble. « Nous soutenons toutes les communautés brimées. Dans le Coran, l’être humain est honoré sans distinction de religion, de race ou de culture », affirme Cheikh Ahmed Tidiane Sy, président du Cadre unitaire de l’islam au Sénégal. Le Musée des civilisations noires, récemment ouvert à Dakar, s’est lui aussi positionné fortement, condamnant « cet acte odieux dont la récurrence est devenue la caractéristique des relations heurtées entre les forces de police et la communauté noire aux Etats-Unis ».

Reste que les plus mobilisés, à l’instar d’Alioune Tine, regrettent le silence du président Macky Sall. « Nous étions mal à l’aise de voir le monde entier se lever pour dire non à l’injustice alors que pratiquement aucun chef d’Etat africain ne s’est prononcé, contrairement à 2015 où ils étaient tous “Charlie” », reproche-t-il. Bien sûr, le militant des droits humains se réjouit du fait que « certaines personnalités du privé et même des députés et anciens ministres sont aussi passés » ; mais il ne peut s’empêcher de déplorer l’absence d’un message fort de la part des autorités, comme celui du président ghanéen Nana Akufo-Addo. Ce dernier a en effet déclaré dans un tweet, le 1er juin, qu’il n’était « pas possible au XXIe siècle que les Etats-Unis, ce grand bastion de la démocratie, continuent d’être aux prises avec le problème d’un racisme systémique ».

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Au Sénégal, la coalition au pouvoir, Benno Bokk Yakaar, a publié un texte condamnant « l’assassinat de George Floyd et de toutes les autres victimes africaines-américaines tombées récemment sous les balles tirées à bout portant ou après des actes de torture mortels et de violences policières inouïes ». Aux yeux d’Alioune Tine, c’est insuffisant. « Dire non aux violences policières et à l’injustice est important en Afrique, alors que des violations des droits humains se font quotidiennement dans les pays de la sous-région. Cela nous concerne de très près : nos institutions judiciaires sont faibles et l’esclavage continue d’être présent dans certains pays comme la Libye, la Mauritanie ou le Mali », estime celui qui ne s’attendait pas à autant de signataires de la déclaration. Celle-ci devait être présentée ce mercredi à l’ambassade américaine par une délégation. Ses auteurs veulent maintenant lancer une pétition en ligne pour cristalliser la mobilisation.

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