Au Royaume-Uni, faire la queue est une science presque exacte

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May 21, 2020. A queue for a fast food drive-in in the New Craighall area of Edinburgh.

Robert Ormerod pour M le magazine du Monde

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Publié aujourd’hui à 14h52

L’espace d’un instant, on avait cru au miracle. La supérette de ce quartier de Londres semblait accessible sans queue. Les ­bandeaux jaune fluo, collés sur le trottoir pour délimiter l’espace de la file d’attente, étaient vides. C’est au moment de passer la porte que le grand gaillard nous a interpellé : « À la queue ! » Le gardien avait beau avoir l’oreille collée à son téléphone portable, il n’avait pas perdu le décompte.

Pas plus de cinq personnes à la fois dans le magasin, distanciation physique oblige. Pas question de nous laisser entrer aussi facilement. Nous voilà donc en train d’attendre seul sur le trottoir. De quoi confirmer le fabuleux adage lancé en 1946 par George Mikes, un humoriste hongrois réfugié au Royaume-Uni : « À l’arrêt de bus (…), un Anglais, même quand il est seul, forme une queue ordonnée d’une personne. »

Samedi 16 mai dans la matinée, devant un gros supermarché de Newcraighall.

Les Britanniques ont en effet élevé la file d’attente au rang d’art. Kate Fox, une anthropologue, consacre pas moins de huit pages « aux règles pour faire la queue » dans son formidable livre Watching the English (Hodder & Stoughton, 2014). Elle commence son ouvrage avec un passage hilarant où elle tente de resquiller au petit matin dans une gare, à l’heure de pointe, pour voir la réaction de ses compatriotes. Mais, étant elle-même anglaise, elle s’en découvre complètement incapable.

Et voilà comment elle se retrouve à 7 h 30 du matin en train de descendre un verre de brandy pour se donner du courage. « Je ne veux vraiment, vraiment pas faire ça, écrit-elle. (…) Je ne veux pas aller doubler dans la queue. » Ce sera, assure-t-elle, tel un soldat victime de syndrome post-traumatique, l’expérience « la plus difficile, répugnante et désagréable que j’aie faite pour ce livre ». Qui a dit que faire la queue n’était pas une affaire sérieuse ?

De nouvelles armes

Alors, en cette période de post-confinement, les Anglais serrent les rangs (mais pas de trop près, quand même). Même la Chambre des communes s’y est mise. Le 2 juin, les députés se sont retrouvés dans un long cortège s’étirant sur un kilomètre pour aller voter. À raison de 2 mètres entre chaque élu, la file a démarré dans une annexe située en face du Parlement, elle est passée par un souterrain, a débouché dans la cour extérieure, puis à travers Westminster Hall, a tourné à droite, puis à gauche, le long d’un couloir près du vestiaire, est montée de deux étages, a tourné deux fois à gauche, est passée dans un couloir, a descendu quelques marches d’escalier, puis est arrivée… dans la Chambre des communes.

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