Au nom de la reine et du Brexit

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Comme de nombreux Européens vivant au Royaume-Uni, la perspective de la sortie du pays de l’Union européenne a poussé Éric Albert, collaborateur de « M », à demander sa naturalisation. Un choix difficile.

Par Eric Albert Publié aujourd’hui à 15h16

Temps de Lecture 13 min.

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M Le magazine du Monde

Les Britanniques ont une blague formidable pour se décrire. « Être britannique, c’est conduire une voiture allemande pour aller dans un pub irlandais boire une bière belge, puis rentrer chez soi et prendre un plat indien à emporter ou un kebab turc, s’asseoir sur des meubles suédois pour regarder des émissions américaines sur une télévision japonaise. »

En arrivant à Londres, au printemps 2003, l’incroyable mélange des cultures de cette ville-monde m’a immédiatement séduit. Partout dans les rues, on entend parler anglais avec des accents étrangers. Personne ne s’étonne que la boulangerie italienne au coin de ma rue soit tenue par des Polonais ou que les restaurants indiens soient cornaqués par les Bangladais. À l’époque, Tony Blair faisait des discours vantant les mérites de l’immigration, un choc par rapport au ton qui dominait alors en France.

Seize ans plus tard, dans mon quartier du sud de Londres, ma voisine est une Polonaise qui a immigré pendant la seconde guerre mondiale, mon médecin est irlandais, mon épouse thaïlandaise et nos meilleurs amis sont des couples anglo-allemand, anglo-français, anglo-srilanko-italien ou encore australo-français…

Sujet de Sa Majesté

Voilà donc l’étrange contexte dans lequel j’ai prêté serment par une magnifique matinée de février. « Je déclare solennellement et sincèrement qu’en devenant citoyen britannique je prête allégeance fidèlement à Sa Majesté la reine Elizabeth II, ses héritiers et successeurs, en respect de la loi. Je vais donner ma loyauté au Royaume-Uni et respecter ses droits et ses libertés, défendre ses valeurs démocratiques, respecter ses lois fidèlement et remplir mes devoirs et obligations de citoyen britannique. »

« L’an dernier, 47 000 Européens ont fait comme moi, trois fois plus qu’avant le référendum. »

Citoyen britannique… Me voilà sujet de Sa Majesté, forcément gracieuse. Il ne me reste plus qu’à me mettre au thé au lait et à aller agiter l’Union Jack devant Buckingham Palace lors de la naissance du prochain bébé royal. Je m’empresse de répondre à la question que tout le monde pose : bien sûr que j’ai gardé ma citoyenneté française, je n’aurais pas fait la demande si j’avais dû choisir entre les deux.

Ma nouvelle citoyenneté devrait être un honneur. Pour connaître quelques non-Européens qui peinent parfois à obtenir leur visa, je sais le bonheur qu’ils ressentiraient à décrocher ce label officiel. Mais la vérité est que le moment était aigre-doux. Mon sentiment, aussi injustifié soit-il, est que j’ai été forcé par les circonstances à demander ce sésame, à cause du Brexit. L’an dernier, 47 000 Européens ont fait comme moi, trois fois plus qu’avant le référendum.

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