Au Kremlin, « le coronavirus a tout gâché »

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Vladimir Poutine le 20 avril à Moscou.
Vladimir Poutine le 20 avril à Moscou. ALEXEY DRUZHININ / AFP

Ce mercredi 22 avril devait être un grand jour pour Vladimir Poutine. Appelés aux urnes pour un vote qui avait tout l’air d’un plébiscite, les Russes devaient approuver le projet de réforme constitutionnelle concocté par leur président pour lui permettre de rester au pouvoir jusqu’en 2036. L’onction de la légitimité populaire n’était pas juridiquement indispensable, mais dans ce type de démarche, elle ne fait jamais de mal.

Le coronavirus a tout gâché. Avec un peu de retard sur l’Europe de l’Ouest, l’épidémie a gagné la Russie, où l’on s’attend maintenant à un pic en mai.

Sagement, le vote a donc été reporté. Aucune nouvelle date n’a été fixée : à Moscou pas plus qu’à Paris, personne ne peut dire à quel stade un scrutin pourra se tenir en toute sécurité sanitaire. L’incertitude économique est plus grande encore – qui a envie d’organiser un plébiscite quand le chômage est au plus haut et les revenus au plus bas ?

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Car une autre catastrophe se profile pour la Russie. Si la nouvelle de l’effondrement du prix du baril de pétrole américain WTI, passé en dessous de zéro dollar lundi, a secoué Washington, elle a dû donner des sueurs froides au Kremlin. Pour la Russie, dont l’économie, très dépendante des revenus de ses hydrocarbures, était déjà stagnante avant cette crise, la perspective d’une chute durable des cours du pétrole est désastreuse : le budget russe est calculé sur la base d’un baril à 42,50 dollars.

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Le Covid-19 n’est pas le seul coupable. Cet effondrement résulte aussi d’une erreur de jugement du pouvoir russe qui, allié à l’Arabie saoudite cet hiver, a voulu tuer les compagnies pétrolières du schiste américain en se lançant dans une violente guerre des prix. L’alliance entre Ryad et Moscou, cependant, n’a pas tenu, entraînant un dérèglement du marché et une douloureuse chute du cours du baril au-dessous de 30 dollars. Fin mars, Donald Trump a négocié un cessez-le-feu avec Vladimir Poutine et le leader saoudien Mohammed Ben Salman, mais les forces du marché, déchaînées par la pandémie qui a fait chuter la demande mondiale, sont en train d’imposer leur loi à la diplomatie.

Traumatisé par le souvenir des années 1990

Tout cela tombe au plus mauvais moment pour la Russie et pour le président Poutine qui avait annoncé, en janvier, un plan d’investissements publics, notamment dans le domaine social, censé lui regagner les faveurs d’une population usée par des années de déclin des revenus des ménages.

La Russie, souligne l’économiste russe Sergueï Gouriev, professeur à Sciences Po, dispose d’un important fonds souverain, équivalent à 10 % ou 12 % de son produit intérieur brut (PIB). « Elle a donc à peu près deux ans devant elle avant de devoir aller emprunter sur les marchés », dit-il.

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