à Riyad, l’ouverture sous haute surveillance

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Plus de loisirs, moins de contraintes pour les femmes et un climat de peur exacerbé par l’affaire Khashoggi :  la capitale saoudienne est la vitrine du projet de modernisation autoritaire du prince héritier, « MBS ».

Par Benjamin Barthe Publié aujourd’hui à 11h21, mis à jour à 11h54

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A Dammam (Arabie saoudite), le 8 février. Depuis 2018, les Saoudiennes ont le droit de conduire.
A Dammam (Arabie saoudite), le 8 février. Depuis 2018, les Saoudiennes ont le droit de conduire. TASNEEM ALSULTAN POUR « LE MONDE »

La scène se déroule au pied de la Kingdom Tower, la gigantesque tour en forme de décapsuleur qui trône sur Olaya, le quartier huppé de Riyad. Deux jeunes femmes en abaya noire, la tenue réglementaire des Saoudiennes, mais la tête nue, attendent un taxi sur le parvis. Une patrouille de la police des mœurs, la Moutawa, s’arrête à leur hauteur.

« Mes sœurs, veuillez s’il vous plaît vous couvrir la tête », demande l’un des agents de cette unité, chargée de faire respecter les préceptes wahhabites, la veine islamique ultra-puritaine en vigueur dans le royaume. La réplique fuse : « On t’emmerde, on est dans l’ère du prince Mohammed Ben Salman. » Le policier encaisse l’affront, remonte la vitre de sa voiture et passe son chemin sans un mot.

Lire notre récit : De l’affaire Hariri à l’assassinat de Khashoggi, la méthode « MBS »

Cette anecdote, rapportée au Monde par un témoin, en dit long sur l’atmosphère qui règne à Riyad. Elle met en lumière deux phénomènes concomitants, l’un ostentatoire, le recul du rigorisme religieux dans l’espace public, et l’autre, plus diffus, la peur qu’inspire Mohammed Ben Salman, dit « MBS », le tout-puissant prince héritier, fils du roi Salman.

Plus détendue d’un point de vue social, mais encore moins respirable qu’avant d’un point de vue politique, la capitale est une ville aliénée. On s’y réjouit volontiers de l’octroi aux femmes du droit de conduire, la grande réforme de 2018. Mais on se mure dans le silence à la simple évocation de Jamal Khashoggi, le journaliste assassiné en octobre 2018 dans le consulat saoudien d’Istanbul (Turquie), et des militantes féministes soumises à la torture en prison. Deux opérations sordides, sur laquelle plane l’ombre de « MBS » et de ses sbires, notamment Saoud Al-Qahtani, l’inquisiteur en chef de la couronne, chargé de la surveillance des réseaux sociaux et de la répression de tous les mal-pensants.

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« Les gens n’ont pas peur, ils ont très peur, confie un contact saoudien, sous le couvert de l’anonymat. Dans les années 2000, on débattait de presque tout. Mais à partir de 2011, l’espace d’expression s’est restreint. Et aujourd’hui, avec les événements des derniers mois, les gens sont tétanisés. Plus personne n’ose contredire le pouvoir ou pointer ses erreurs. C’est dangereux. »

Avenue Tahlia, les Champs-Elysées de Riyad, mi-janvier. Des hommes s’attablent à la terrasse d’un restaurant, devant un écran de télévision dressé en prévision du match entre l’Arabie saoudite et le Qatar, en Coupe d’Asie de football. Un groupe de six jeunes femmes prend place, indifférentes au serveur qui leur demande de s’installer à l’intérieur, l’espace réservé aux membres du sexe féminin. « On veut fumer », explique Noura, qui sort de la salle de fitness où elle travaille comme coach.

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