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Pour le plus grand nombre, le pantalon le plus populaire du monde est né aux Etats-Unis et est arrivé en Europe après la seconde guerre mondiale. Et les mieux informés savent que sa toile Denim est en fait née en France, à Nîmes exactement d’où elle tient son nom (« de Nîmes »), avant de traverser l’Atlantique pour faire carrière. La réalité historique est en fait un petit peu différente. C’est au XVIèmes siècle que l’on trouve ses premières traces. Il s’agit alors d’une toile coton et lin utilisée pour fabriquer les voiles de la marine génoise. La République de Gênes l’exporte partout en Europe, où elle sert à fabriquer voiles et toiles de tentes. En France les tisserands nîmois tentent de la reproduire, sans succès jusqu’à ce qu’ils mettent au point au XVIIème siècle un mélange laine et soie en armure de serge, qu’ils vont à leur tour exporter. Ironie de l’histoire : c’est pour les marchés de Gênes que les producteurs français conçoivent de teinter leur toile en bleu indigo, couleur moins salissante que le beige naturel originel.
C’est cette toile Denim que la firme Levi Strauss vend au milieu du XIXèmes siècle aux aventuriers de la ruée vers l’or américaine, qui en font des toiles de tente et des bâches. Et c’est à cette époque qu’un tailleur de Reno nommé Jacob Davis imagine utiliser cette toile pour fabriquer des pantalons, qu’il renforce au moyen de rivets de cuivre aux poches et à la braguette. Le succès du produit auprès des mineurs et des bûcherons incite Davis, qui craint les contrefaçons, à proposer une association à Levi Strauss afin de le breveter. Outre sa toile particulière, la production du tandem se distingue en se concentrant exclusivement sur les pantalons, alors que la concurrence propose essentiellement des salopettes. En quelques années Levi Strauss & Co voit fleurir la concurrence, dont la marque se distingue par ses rivets de cuivre et par les détails qui caractérisent ses modèles, aujourd’hui oubliés, dus à la formation tailleur de Jacob Davis : boutons de bretelles, surpiqûres des poches arrière en lin orange (coordonnées aux rivets), poche à gousset, poche arrière unique, et même une martingale dans le dos !
Avez-vous déja remarqué que des petits boutons étaient présents sur les poches de ce dernier?
À quoi servent les boutons sur les poches du jean ?
Il y a des années, leur utilisation était fondamentale. Les travailleurs qui portaient des montres à gousset les perdaient rapidement parce que les poches pouvaient se déchirer rapidement.
Ensuite, le tailleur Jacob W. Davis a eu l’idée de renforcer les poches avec des éléments métalliques. Levi Strauss a également adopté cette initiative et a commencé à produire des jeans avec de petits boutons métalliques au niveau des poches.
L’idée a été adoptée chez les fabricants de pantalons et c’est pourquoi, de nos jours, les jeans actuels présentent de petits boutons. Ceux-ci ont pour principale but de solidifier les petites poches latérales que l’on utilise pour les pièces de monnaie, les chewing-gums ou les billets de bus.
La seconde évolution marquante du jean intervient dans les années 1920, lorsque le terme blue jeans apparaît par contraction (une habitude linguistique typiquement américaine) de « bleu de Gênes ». Cette fois la légende est en route. A la fin de la guerre les magasins de surplus américains en inondent une Europe demandeuse des pantalons vus dans les films hollywoodiens (et vantés par de nombreuses publicités). En 1947 Levis lance le fameux 501, caractérisé par ses cinq poches, celle de droite en abritant une seconde, dérivée de la poche gousset. Son seul concurrent direct est le Lee 101Z, qui s’en distingue par une braguette à zip (au lieu des boutons utilisés par Levis) et une toile un peu plus épaisse (11,05 Oz au lieu de 10 Oz, soit env. 300 gr.) que celle de Levis. Le grammage des toiles de jeans ne cessera jamais d’augmenter, jusqu’à atteindre 13,5 à 14 Oz aujourd’hui, et jusqu’à 22 Oz pour les jeans japonais les plus haut de gamme. Entre-temps ce pantalon universel aura fait sa révolution et aura conquis la planète entière, tous sexes, âges et catégories sociales confondus. Il faut attendre la vague hippie des années 70 pour le voir évoluer, s’habiller de divers artifices et broderies et adopter les calamiteuses pattes d’éléphant de la mode de l’époque. Une nouvelle étape est franchie avec le choc pétrolier de 1973, qui impose le jean, au-delà du statut de produit de masse, comme pantalon générique.
Les cinquante années suivantes vont achever d’en faire la pièce de base d’un uniforme planétaire produit chaque année à 2,3 milliards d’exemplaires. Face à cette popularisation du genre, une frange d’amateurs et de collectionneurs va susciter la fabrication de modèles plus typés : ce sera d’abord le stone-washed, vieillissement artificiel obtenu en abrasant la toile à la pierre ponce ; puis le stone-bleached, qui ajoute à cette dernière un blanchiment chimique ; le sur-teint qui s’inscrit dans la tendance inverse ; le used vieilli par sablage… Dans le même temps les coupes se multiplient : à la regular succède la slim (ou cigarette), la skinny (très étroite aux chevilles), la flare (retour aux abominables pattes d’éph’), la bootcut, la baggy à taille basse (aberration de style comparable à la patte d’éléphant)…
Si du côté de la production de masse la fabrication se délocalise à l’Est, l’Asie damant le pion aux pays méditerranéens (les principaux producteurs étant aujourd’hui le Bangladesh, la Turquie, la Chine et le Pakistan), dans le haut de gamme le Japon est devenu le nouvel Eldorado des afficionados, dont les produits sont les plus recherchés par les puristes et les collectionneurs.
Comment vérifier s’il s’agit d’un vrai jean ?
La plupart des jeans peuvent cacher des défauts que vous ne remarquez pas lorsque vous les achetez.
De nombreux pantalons ressemblent à des jeans, mais ils ne sont pas faits de denim, c’est-à-dire de ce tissu spécial de fil de coton de qualité, qui se conserve pendant des années. Le vrai denim a des fils tissés en diagonale entre les fils de chaîne droits et il se caractérise par sa douceur au toucher. Les imitations de denim se distinguent par un tissu de fils horizontalement et verticalement.
De plus, le denim n’est teint qu’à l’extérieur, de sorte que le jean a une couleur plus claire à l’intérieur.
Certains jeans ont des poches surdimensionnées, d’autres trop petites. Lors de l’achat de ce pantalon, faites attention aux poches arrière, pour qu’elles puissent s’adapter harmonieusement à la taille de vos hanches.
Les jeans de qualité sont toujours bien équilibrés et ont des poches adaptées à la taille de ces dernières.
La distance entre les poches arrière est importante. Si vos poches sont trop éloignées, vos hanches peuvent paraître plus grosses.
Le jean, un produit peu écologique
Paradoxalement, pour (extrêmement) populaire qu’il soit, le jean est loin d’être vertueux en terme écologique. A partir de coton cultivé en Inde ou en Afrique, son circuit de fabrication l’emmène au Pakistan où celui-ci va être tissé, puis en Chine où la toile sera assemblée (les usines de la région de Xintang produisent 800.000 jeans par jour !), puis au Bangladesh, en Chine ou en Syrie où seront exécutées ses finitions – notamment le sablage, violemment dénoncé par les associations droits de l’hommistes en raison de sa dangerosité pour la santé des ouvriers. La question des conditions de travail des employés des sociétés alimentant la fast-fashion (qui fournissent Carrefour, Pimkie, Décathlon, Kiabi, Tesco, Walmart, Mark&Spencer…) reste plus qu’épineuse, et notre confrère Libération a publié une enquête consacrée à la société indienne KPR dans laquelle sont dénoncées les journées de travail de seize heures payées deux euros par jour et les ouvrières des « usines-prisons » (sic) entassées à une dizaine dans des chambres de dix à douze mètres carrés. Au-delà du drame humain, l’empreinte de fabrication du jean sur l’environnement est tout aussi lourde, l’association Conso Globe ayant déterminé que la fabrication d’un jean requiert jusqu’à 25.000 litres d’eau, 75 kg de pesticide et 2 kg d’engrais chimiques… Des données auxquelles feraient bien de penser les écolos les plus radicaux pestant contre le système dans leurs jeans fabriqués on ne sait où.
Du mass market au haut de gamme
Si la majeure partie de ce marché planétaire colossal concerne le mass market, quelques maisons se sont fait une spécialité du jean haut de gamme. C’est le cas de l’Italien Jacob Cohen, dont les produits très soignés offrent des rapports qualité/prix intéressants (entre 350 et 550 euros la pièce), Brunello Cucinelli (env. 490 euros), Dolce & Gabbana (645), Loewe (430), et tout en haut de la pyramide Kiton, avec ses jeans à 1 000 euros ! A côté Levis Vintage Clothing ou Tellason, dont les pantalons sont assemblés à San Francisco, paraissent bon marché. Mention particulière également pour AVN, marque française (et qui fabrique en France) née d’une plateforme de financement collaboratif. Enfin, last but not least, le petit club des petits fabricants de jeans haut de gamme s’est enrichi début février d’un nouveau membre : Alexander Kraft Monte Carlo, marque créée l’année dernière par le directeur de Sotheby’s Realty France et grand élégant devant l’Eternel, qui s’est donné pour mission de rendre son style accessible. Après les costumes, gilets et pull-overs, la maison lance aujourd’hui son jean, qui ne pouvait être que bien coupé et bien fini. Proposé exclusivement en coupe slim valorisante et dans deux coloris : bleu et écru (en fait un Japanese selvedge denim non-lavé), il est stone-washed, affiche des poches et une doublure intérieure contrastées rouge, des boutons en laiton massif gravés, un patch en cuir caramel et ses coutures extérieures sont bleu Navy et non orangées comme on les connaît habituellement, ce qui donne au jean un aspect un peu plus habillé.
La toile utilisée est un denim italien de qualité supérieure, grammage 13 Oz, et la fabrication n’est bien entendu pas réalisée dans un lointain pays à bas coût, mais en Italie où les ouvriers ont la culture du vêtement bien fait et bien fini. Grâce à la distribution exclusivement online, son prix de vente est particulièrement placé, puisque fixé à 240 euros.
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