« A jouer avec le droit, les démocraties risquent de perdre leur âme »

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Manifestation devant la Cour suprême à Varsovie (Pologone), pour le juge Igor Tuleya, critique des réformes judiciaires du gouvernement, le 8 juin.

Personne ne sait créer des icônes comme les Américains. Ruth Bader Ginsburg était, bien sûr, un éminent personnage public dans son pays. Hollywood lui avait même consacré un film, sélectionné pour les Oscars, en 2019, un documentaire sur son parcours, RBG. Mais quel autre pays que les Etats-Unis exposerait le cercueil d’une juge pendant trois jours sur le catafalque de Lincoln, au cœur des institutions de la capitale fédérale, pour que ses compatriotes puissent lui rendre hommage ?

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Si la disparition, le 18 septembre, à 87 ans, de la juge à la Cour suprême – petite et frêle par son physique, immense et puissante par l’héritage juridique qu’elle laisse – suscite un tel écho auprès des Américains, ce n’est pas seulement parce qu’elle enflamme une fin de campagne électorale déjà passablement explosive.

C’est en partie, sans doute, parce que les femmes et les minorités doivent tant à la ténacité de cette formidable juriste, qui n’a jamais cessé de se battre, et avec plus d’énergie encore lorsque son opinion se retrouvait minoritaire, pour l’égalité des droits. Mais c’est surtout parce qu’elle et la constance de son combat incarnaient ce qui qualifie la démocratie de la manière la plus incontestable, à un moment de troublante fragilité : l’Etat de droit.

Zone grise

A l’heure du grand brouillage des repères politiques, le respect de la règle de droit est devenu le critère ultime d’un vrai régime démocratique. Au XXIe siècle, il n’est plus guère de dirigeants, aussi autocrate soit-il, qui ne puisse se targuer d’être élu, voire réélu, ni prétexter de sa légitimité populaire. Exiger des élections « libres et justes », fondement de la démocratie, à l’époque du bloc soviétique et des régimes de parti unique, était facile.

Aujourd’hui, il y a cinquante nuances d’élections « libres ». Au-delà de la caricature du Turkménistan, ou même de la Biélorussie où les candidats d’opposition ont été emprisonnés et les résultats massivement falsifiés, a émergé toute une zone grise, où les candidats d’opposition n’ont pas vraiment accès à la télévision publique, où les médias ne sont pas tout à fait indépendants, où les électeurs ne sont pas tous inscrits, où certains bureaux de vote ne sont pas accessibles, où le financement des partis n’est pas franchement réglementé… Cette zone grise ne se situe pas que dans des contrées lointaines. On la trouve aussi en Europe, et aux Etats-Unis.

Cette Cour suprême, à laquelle siégeait Ruth Bader Ginsburg, fait aujourd’hui figure de rempart de la démocratie

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