A Chicago, la future bibliothèque Obama fait débat

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Géré par une fondation privée, le Centre présidentiel Barack Obama empêchera tout regard critique sur les deux mandats du 44e président des Etats-Unis, estiment certains chercheurs.

Par Stéphanie Le Bars Publié aujourd’hui à 07h30

Temps de Lecture 3 min.

Le projet de bibliothèque de Barack Obama (ici, en 2017)à South Side Chicago, prévu pour 2021, a fait l’objet d’une plainte de la part d’une association pro-environnement.
Le projet de bibliothèque de Barack Obama (ici, en 2017)à South Side Chicago, prévu pour 2021, a fait l’objet d’une plainte de la part d’une association pro-environnement. Tannen Maury/EPA/MaxPPP

Les défenseurs des papillons et les tenants de la tradition semblent avoir fait cause commune. Leur cible ? Le projet de bibliothèque présidentielle de Barack Obama, annoncé en mai 2017. Le 19 février, la plainte d’une association de défense de l’environnement, Protect our Parks, dénonçant la cession de terrains publics à la fondation privée de l’ancien chef de l’Etat et la mise en danger de certaines espèces a été jugée recevable par un tribunal fédéral de Chicago. Cette décision pourrait retarder encore la construction du complexe, dont l’inauguration était prévue à l’origine pour 2021. Déployé sur 8 hectares d’un parc situé sur les rives du lac Michigan, aux abords d’un quartier modeste de Chicago, le projet à 500 millions de dollars prévoit une tour-musée de 70 mètres de haut, célébrant le parcours des Obama, une salle de sport, une annexe de la bibliothèque municipale de Chicago, du travail à temps complet pour 2 500 personnes et plus de 750 000 visiteurs par an.

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A condition bien sûr que le 44e président des Etats-Unis persiste dans son idée d’offrir à ses concitoyens une « bibliothèque » unique en son genre. Car, et c’est là qu’interviennent les défenseurs de la tradition, le Centre présidentiel Barack Obama sera géré par une fondation privée et non par les Archives nationales, l’agence fédérale responsable des treize bibliothèques et musées présidentiels, gardiens de la mémoire des présidents américains, de Herbert Hoover à George W. Bush. Autre originalité promise par Obama : son centre sera dépourvu d’archives papier. Seule une version numérisée des 30 millions de documents mis à disposition sera accessible. Un moyen de « démocratiser » l’accès aux documents, selon l’équipe Obama. Une menace pour la recherche critique sur ses deux mandats, rétorquent certains chercheurs. L’absence d’archivage par des professionnels pourrait rendre difficile la navigation dans cet océan de données et décourager les meilleures volontés.

Monuments à la gloire des anciens présidents

A ces craintes s’ajoute le risque qu’un musée présidentiel géré par des fonds privés fasse difficilement bon ménage avec une présentation non partisane de la période historique en question. Lapidaire, Timothy Naftali, l’ancien directeur de la bibliothèque présidentielle Richard Nixon, réputé pour avoir présenté honnêtement l’épisode du Watergate qui fit chuter le 37e président américain, a estimé dans le New York Times que le projet Obama « ouvrait la porte à une bibliothèque Trump absolument terrible ». Dans la revue The Public Historian, Bob Clark, un des anciens directeurs du musée consacré à Franklin D. Roosevelt, va même plus loin. Des musées tels que le centre Obama « ont un impact sur l’accès des chercheurs à d’importantes informations historiques, mettent en danger le système même des bibliothèques présidentielles et, en fin de compte, portent atteinte à notre démocratie ».

Les bibliothèques présidentielles proposent des expositions montées par de loyaux supporteurs, accueillent des événements politiques partisans et surtout ne dévoilent pas l’ensemble des documents utiles aux chercheurs.

Toutefois, bien qu’elles soient en partie gérées par des fonds publics, les bibliothèques présidentielles traditionnelles ne sont pas exemptes de critiques. Souvent transformés en monuments à la gloire des anciens locataires de la Maison Blanche, ces lieux, dans lesquels leurs fondations privées continuent de jouer un rôle, n’assurent pas forcément une lecture équilibrée de leur héritage. C’est la thèse que défend Anthony Clark, auteur d’un ouvrage sur le sujet, The Last Campaign: How Presidents Rewrite History, Run for Posterity & Enshrine Their Legacies (« la dernière campagne. Comment les présidents réécrivent l’Histoire et œuvrent à faire passer leur action à la postérité », non traduit). « Depuis la création du premier musée, en 1941, ces lieux conçus comme des centres de recherche se sont transformés en temples clinquants et partisans, défendant une histoire mensongère », écrivait-il en 2017 dans une tribune publiée par Politico.

Et de rappeler que les bibliothèques présidentielles proposent des expositions montées par de loyaux supporteurs, accueillent des événements politiques partisans et surtout ne dévoilent pas l’ensemble des documents utiles aux chercheurs. Ou alors dans des délais tels qu’ils découragent les plus patients des universitaires. Dans ces conditions, ce que proposera le centre Obama avec de l’argent privé ne différera pas grandement de ce qu’offrent les autres avec l’argent des contribuables, défend Anthony Clark. Chaque année, le gouvernement fédéral dépense une centaine de millions de dollars pour le fonctionnement des treize lieux consacrés à l’héritage des présidents. S’il voit le jour, le quatorzième comptera sur les dons et les entrées au musée pour diffuser la (bonne) parole du couple Obama.

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Stéphanie Le Bars

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