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Factuel
Le septième art sud-coréen, dont le système de production et de distribution dynamique est soutenu par les pouvoirs publics, est à l’honneur à Cannes. La capitale, toile de fond de nombreux films, attire réalisateurs locaux et étrangers.
Bong Joon-ho revient à Cannes. Le cinéaste sud-coréen est en compétition avec Parasite, dénonciation acide de la violence des rapports de classes, à travers le récit de deux familles, l’une misérable et l’autre richissime. Le réalisateur de 49 ans filme Séoul entre zones très populaires et villas luxueuses des beaux quartiers. Une atmosphère sud-coréenne que le Festival de Cannes aime célébrer.
En 2018, avec Burning, mélodrame de Lee Chang-dong. En 2017, avec Okja, du même Bong Joon-ho, ou Le Jour d’après, du plus intimiste Hong Sang-soo. Et l’année précédente, le film de zombies Dernier train pour Busan, de Yeon Sang-ho, ou l’érotisant Mademoiselle, de Park Chan-wook, Grand Prix à Cannes douze ans auparavant avec Old Boy.
Autant de preuves cannoises que la Corée du Sud, des quartiers traditionnels de Bukchon, à Séoul, aux buildings qui surplombent le fleuve Han, en passant par les sièges du KTX, le train à grande vitesse qui traverse le pays, est aujourd’hui un décor familier des cinéphiles. Tout comme ses thématiques, les conséquences du développement économique accéléré de l’après-guerre de Corée ou la relation névrotique au cousin communiste au nord du 38e parallèle.
Cinquième marché mondial
Car le cinéma sud-coréen figure aujourd’hui parmi les plus productifs, créatifs, divers et talentueux du monde. Une industrie qui s’appuie sur un vaste réseau de salles, particulièrement à Séoul, la tentaculaire capitale, véritable cœur du cinquième marché cinématographique mondial. Et qui fait la part belle aux films du pays. En 2018, détaille sur son site le Conseil du film coréen (Cofic), sur les 50 premiers films du box-office, 29 étaient des productions locales. En tête est arrivé le dernier opus de la franchise Along with The Gods, de Kim Yong-hwa, avec 12,2 millions d’entrées.
Jusqu’en 1985, la distribution des films américains se fait obligatoirement par un intermédiaire sud-coréen.
Une vitalité qui a des raisons historiques, dans un pays avide de raviver une culture considérée comme étouffée par l’occupant japonais entre 1910 et 1945. Le cinéma sud-coréen a pu s’épanouir grâce à une politique de soutien ancienne. En 1967, le gouvernement impose la production de trois films locaux pour avoir le droit d’en diffuser un étranger. Les exploitants doivent par la suite programmer 146 jours par an des longs-métrages financés localement.
Jusqu’en 1985, la distribution des films américains se fait obligatoirement par un intermédiaire sud-coréen. L’ouverture du marché suscite une vive opposition. En 1988 et 1989, les opposants n’hésitent pas à lancer des serpents vivants lors de projection de Liaison fatale, d’Adrian Lyne, et de Rain Man, de Barry Levinson. Les distributeurs sud-coréens manifestent et la presse refuse les publicités du studio américain qui les a sortis. Les deux films sont des échecs.
Avec les années, une véritable industrie est née, soutenue par le président Kim Young-sam (1993 à 1998). Selon l’anecdote, ce dernier aurait découvert que les recettes de Jurassic Park, de Steven Spielberg, équivalaient à la vente de 1,5 million de voitures Hyundai. Le premier long-métrage non financé par le gouvernement est pris en charge par le conglomérat Samsung : Marriage Story, de Kim Ui-seok (1992). En 1995, le géant de l’agroalimentaire CJ Group, lié à Samsung, se lance dans la « production, l’investissement et la distribution » cinématographiques avec comme slogan : « Pas de culture, pas de pays. »
Un régime inspiré du système français
Du côté du financement public, Kim Dae-jung et Roh Moo-hyun, présidents progressistes de 1998 à 2003 et de 2003 à 2008, développent un système de subventions massives. Le second veut faire de la Corée du Sud l’un « des cinq premiers pays de l’industrie culturelle ». Son ministre de la culture, le réalisateur Lee Chang-dong, s’inspire du système français et crée un régime d’intermittents du spectacle. Sans avoir les mêmes effets, faute de moyens, cette politique permet néanmoins l’émergence de talents. Elle pâtit de l’accord de libre-échange de 2007 avec les Etats-Unis, qui réduisait à 73 jours les quotas de diffusion des films coréens puis de l’accélération de la libéralisation sous les présidents conservateurs Lee Myung-bak et Park Geun-hye, au pouvoir de 2008 à 2017.
Comme les tubes de la K-pop, les films sud-coréens s’exportent aujourd’hui dans le monde entier, et particulièrement en Asie. D’où un nombre de coproductions, notamment avec la Chine, entre les grandes sociétés de production CJ Group, Lotte ou encore Showbox. Les stars du pays ont des carrières internationales. La presse spécialisée annonçait ainsi mi-avril que l’acteur Ma Dong-seok, à l’affiche de Dernier train pour Busan (2016), serait du casting de The Eternals, une nouvelle production du studio Marvel.
La Corée du Sud n’a plus besoin de se barricader pour défendre son cinéma. Elle est désormais armée pour laisser le rival américain – qui la voit comme un moyen d’accéder au marché chinois – se faire une place dans la péninsule. Et accepte même qu’il y organise des tournages. En 2018, le film événement Black Panther, de Ryan Coogler, produit par les mêmes studios Marvel, voyait une mémorable course-poursuite tournée dans les rues de Busan. Comme si la modernité des artères sud-coréennes avait remplacé les rues de San Francisco, que Steve McQueen dévalait dans Bullitt, pour emporter le spectateur contemporain dans le tourbillon d’un film d’action.
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