portraits de disparus et propagande russe

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Une fois par an, des millions de Russes défilent avec le portrait de leurs parents disparus ou blessés pendant la seconde guerre mondiale. L’historienne Galia Ackerman a enquêté sur cette initiative, et sa récupération par le Kremlin.

Par Isabelle Mandraud Publié aujourd’hui à 05h00

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« Le Régiment immortel. La guerre sacrée de Poutine », de Galia Ackerman, éditions Premier Parallèle, 288 p., 20 euros.
« Le Régiment immortel. La guerre sacrée de Poutine », de Galia Ackerman, éditions Premier Parallèle, 288 p., 20 euros.

Livre. Elevée au rang de « cause sacrée » par Vladimir Poutine, la commémoration de la Grande Guerre patriotique – ainsi que l’on nomme en Russie la seconde guerre mondiale – ne se traduit plus seulement par une imposante parade militaire sur la place Rouge. Depuis 2015, les célébrations de la victoire sur le régime nazi s’accompagnent d’un gigantesque défilé civil, baptisé le « Régiment immortel ». Une procession au cours de laquelle les vivants brandissent les portraits des morts d’hier, parents et grands-parents.

Ce 9 mai, 10 millions d’hommes et de femmes, selon l’agence Ria Novosti, ont ainsi marché à travers tout le pays, et même au-delà des frontières, dans de nombreux plusieurs pays, sous l’impulsion des ambassades russes. A Moscou, comme il le fait désormais chaque année, le chef du Kremlin s’était lui-même de nouveau posté au premier rang de la foule avec une photo de son père, blessé au combat.

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Née en 2012 à Tomsk, en Sibérie occidentale, l’initiative, rare manifestation indépendante dans la Russie de Poutine, partait d’une juste inspiration : rendre hommage aux morts et aux rescapés de cette guerre abominable, qui fit 27 millions de victimes, en les faisant sortir de l’oubli. Mais, très vite, dès 2015, année du 70e anniversaire de la victoire, les cortèges se sont mués en autre chose, comme l’avait confié au Monde Sergueï Lapenko, cofondateur du mouvement. « Certains essaient de trouver une idéologie dans le Régiment Immortel. A ce stade, cela ressemble plutôt au 1er-Mai du temps de l’URSS », déclarait-il avec regret.

Cérémonies pompeuses

C’est ce phénomène d’« encadrement » par les propagandistes du pouvoir que décortique fort bien Galia Ackerman. Cette historienne russe installée en France, chercheuse associée à l’université de Caen, démontre comment les « technologues politiques » du Kremlin ont accaparé le Régiment immortel, « apothéose païenne du culte de la nation », pour l’accorder à la nouvelle idéologie de l’Etat russe basée sur un patriotisme effréné et une militarisation sans précédent. Aujourd’hui, même des enfants, petits, défilent au pas de l’oie en uniforme dans des écoles.

Alors que la fin de la seconde guerre mondiale n’est commémorée chaque année que depuis 1995 en Russie, « plus on s’éloigne de l’événement, plus les célébrations sont pompeuses et militarisées », observe avec justesse l’auteure. La force militaire est ainsi magnifiée en même temps qu’elle prépare les esprits à d’éventuels conflits. Les chaînes de télévision matraquent le public avec force films et documentaires sur l’héroïsme et l’esprit de sacrifice d’une « génération de vainqueurs », selon l’expression de Vladimir Poutine. Staline est réhabilité, l’histoire officielle purgée de tout ce qui pourrait entacher le récit glorieux.

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