L’hiver des repentis de la Mafia italienne

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TOMMASO BONAVENTURA POUR “LE MONDE”

Par Thomas Saintourens

Témoins-clés des procès de la pègre transalpine, 1 100 « collaborateurs de justice » vivent dans l’anonymat en Italie. Après un nouvel assassinat ciblé, le jour de Noël 2018, certains n’hésitent pas à dénoncer publiquement les menaces qui pèsent sur eux et leurs familles.

Il a donné rendez-vous dans une station balnéaire de la côte adriatique. Ce n’est pas son lieu de résidence – il ne le dévoilera pas. Pour la photo, il masquera son visage d’un bandana noir lui conférant un air de pirate fatigué, mais sans poser de dos : « C’est pour les traîtres », marmonne-t-il de sa voix nasillarde et rocailleuse.

Naguère, dans une autre vie, Luigi Bonaventura, 47 ans, était un boss de la ’Ndrangheta, la puissante Mafia calabraise, dans la ville de Crotone. Et puis, en 2006, il a décidé de renoncer au crime et de dissoudre le lien du sang, si fort dans les clans du Sud. Depuis, ce quadragénaire est l’un des principaux « collaborateurs de justice » d’Italie. Un pentito (« repenti »), dans le langage populaire.

Au total, le pays en compte 1 100, beaucoup d’hommes et quelques femmes, qui ont scellé un pacte avec l’Etat italien : témoigner en échange de remises de peine, puis d’une compensation financière mensuelle (environ 1 500 euros) et d’une protection policière, le tout en jonglant avec les fausses identités et les appartements fournis par les autorités. Vivant reclus, sous la menace des vendettas, on les surnomme « les morts qui marchent ». Luigi Bonaventura, lui, est un mort qui parle.

« Je préfère désormais mourir pour la société civile, pour nos enfants, que pour une organisation criminelle basée sur l’endoctrinement »
Luigi Bonaventura, repenti

Et il en a eu, des choses à dire, sur les activités mafieuses, dans la Péninsule et à l’étranger, des têtes pensantes aux porte-flingues. Lui, l’ancien meneur du redoutable clan Vrenna-Bonaventura, dont la fortune reposait notamment sur le trafic de cocaïne et la gestion des déchets, mesure le poids de ses confidences : « C’est seulement grâce à nos témoignages que l’Italie arrivera à vaincre la Mafia infiltrée dans les hautes sphères du pouvoir politique et économique. Seul le bien pourra éradiquer le mal. Et je préfère désormais mourir pour la société civile, pour nos enfants, que pour une organisation criminelle basée sur l’endoctrinement. »

« Un climat de suspicion et de peur »

Le buste droit, les yeux prêts à scanner les alentours, il baisse d’un ton quand un passant ralentit à proximité. « Les vrais héros, ce sont nos familles, comme ma femme et nos deux enfants, qui doivent subir mon choix et vivre dans un climat de suspicion et de peur », poursuit-il, en longeant la plage déserte.

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