« La “peuplecratie” est un défi pour la démocratie libérale et représentative »

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L’historien et sociologue analyse, dans un entretien au « Monde », la montée des mouvements populistes en Europe. Pour lui, leur force est de se présenter comme les meilleurs défenseurs de la démocratie.

Propos recueillis par Marc Semo Publié aujourd’hui à 07h00

Temps de Lecture 8 min.

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Professeur d’histoire et de sociologie politique, spécialiste reconnu de l’Italie contemporaine, Marc Lazar est directeur du Centre d’histoire de Sciences Po et président de la School of government de la Luiss (Libre université internationale des études sociales, Rome). Il analyse le phénomène populiste, objet de son nouveau livre Peuplecratie. La métamorphose de nos démocraties (Gallimard, 192 pages, 19,50 euros), qu’il cosigne avec le sociologue italien Ilvo Diamanti.

Pourquoi ce néologisme un peu lourd de « peuplecratie », alors que l’étymologie grecque de démocratie, c’est « le pouvoir du peuple » ?

Marc Lazar : Je dois reconnaître qu’en italien cela sonne mieux : popolocrazia. Ilvo Diamanti, avec qui j’ai écrit ce livre, est aussi un éditorialiste de talent, inventeur de mots. L’émergence de nouvelles pratiques politiques, voire de nouveaux régimes, nécessite de forger de nouvelles notions. Ainsi, dans les années 1930 et 1950, celle de « totalitarisme » pour tenter d’appréhender ce que pouvaient avoir en commun le bolchevisme, le fascisme et le nazisme. Or, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition, les mouvements populistes d’aujourd’hui sont en train de faire muter les bases mêmes de la démocratie libérale et représentative. La démocratie, dans sa pratique moderne, se fonde sur la séparation des pouvoirs et sur tout ce qui relève de l’Etat de droit né des Lumières. Nous entrons maintenant, sous la pression de ces mouvements, dans une tout autre période…

Qu’est-ce qui change ?

Ces mouvements populistes et leurs leaders martèlent que la souveraineté du peuple est sans limite. Tous les contre-pouvoirs doivent céder le pas au suffrage universel. Le deuxième élément qui les caractérise est la mise en avant non seulement d’une démocratie directe mais aussi d’une démocratie immédiate, sans aucune forme de médiation, passant outre les corps intermédiaires et les partis. Leur discours est celui d’une urgence permanente. Ils clament qu’il y a des solutions simples pour tous les problèmes, d’où leur demande d’une pratique référendaire systématique. Ils ont compris également la révolution que représentent les réseaux sociaux, qu’ils utilisent à fond.

La « peuplecratie » serait donc à la fois une nouvelle phase de la démocratie et une menace pour celle-ci ?

La « peuplecratie » n’a pas encore vaincu, mais elle est là comme un grand défi pour la démocratie libérale et représentative. Les populistes ont déjà réussi à imposer leur façon de faire de la politique et leur temporalité, à tel point que ceux qui veulent les combattre ne peuvent qu’avoir la tentation de recourir à leur tour à ce que nous appelons le style populiste.

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