A Qom, la discrète émancipation du haut clergé

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 An Iranian clergyman makes his way at the city of Qom 78 miles (125 kilometers) south of the capital Tehran, Iran, Nov. 1, 2018.

MARYAM RAHMANIAN POUR “LE MONDE”

Par Louis Imbert

Les 40 ans de la révolution en Iran. Les plus hauts clercs du chiisme résident dans la ville sainte iranienne. Dans le pays, ils représentent la source de la légitimité du pouvoir. Mais ils cherchent à s’en écarter.

Une station de bus à Qom, le 1e rnovembre 2018
Une station de bus à Qom, le 1e rnovembre 2018 MARYAM RAHMANIAN POUR “LE MONDE”

Un vent froid souffle dans les rues de Qom. La capitale du clergé d’Iran s’est vidée : les séminaristes ont rejoint des millions de pèlerins, en Irak voisin. Ils marchent vers Kerbala, l’un des plus hauts lieux saints de l’islam chiite, pour la fête religieuse de l’Arbaïn. C’est la fin du mois d’octobre 2018. Dans la ville déserte, un employé du ministère de la culture et de la guidance islamique, accroché à nos pas, soupire.

L’employé s’ennuie. Le tour de Qom, seule ville où l’Etat impose aux journalistes étrangers une telle surveillance, il l’a déjà fait cent fois. Ni surprise ni imprévu : les rendez-vous ont été validés à l’avance, chacun de nos interlocuteurs pèse ses mots. L’Etat veille de près sur Qom, où résident les plus hauts clercs du chiisme : une centaine de marja capables d’interpréter les écritures saintes et reconnus, par leurs pairs et par les fidèles, comme « source d’imitation », intercesseurs entre Dieu et les hommes.

En République islamique, ils représentent la source de la légitimité du pouvoir. L’autorité publique s’efforce de financer les écoles religieuses, de les organiser, de les contrôler, et de censurer les voix dissidentes lorsqu’elles s’élèvent. Pour le haut clergé, Qom est tout à la fois un écrin et un étouffoir. Mais, à la mi-2018, ce bel édifice s’est mis à tanguer. Durant l’été, lors d’un meeting en ville, un polémiste ultraconservateur, Hassan Rahimpour Azghadi, a accusé le haut clergé de s’assoupir sur ses rentes. « Le sécularisme s’enracine dans les séminaires », tonnait-il.

Critique « indécente »

Le meeting se déroulait à l’école Feizieh, foyer de la révolution de 1979, où le fondateur de la République islamique, l’ayatollah Rouhollah Khomeyni, a lui même enseigné. Dans ces murs, la saillie de M. Azghadi faisait mauvais genre. « J’entends que 700 à 800 traités religieux nous parviennent de Qom. Mais avons-nous besoin de 700 marja ?, interrogeait-il. J’ai présenté 100 problèmes, dont 80 % comptent parmi les plus urgents de notre société, or la majorité de ces clercs n’y fournissent aucune réponse ! »

Un religieux dans les rues de Qom, le 1er novembre 2018
Un religieux dans les rues de Qom, le 1er novembre 2018 MARYAM RAHMANIAN POUR “LE MONDE”

La très conservatrice Société des enseignants des séminaires de Qom a jugé cette critique indécente. Mais cela n’a pas empêché l’une des principales organisations étudiantes d’oser se ranger derrière le polémiste. Ces jeunes gens aimeraient que leurs professeurs se prononcent, par exemple, sur un éventuel retrait du pays de l’accord international sur le nucléaire, à la suite des Etats-Unis, qui l’ont dénoncé en mai 2018 et qui accablent l’Iran de sanctions. « Vous savez, les jeunes clercs sont plus révolutionnaires que leurs aînés… », explique Rasoul Jafarian, dans le département d’histoire qu’il dirige au sein d’une importante bibliothèque de recherche.

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