Les végans australiens entrent en guerre contre les abattoirs

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A Melbourne, le 8 avril.
A Melbourne, le 8 avril. Ellen Smith/Australian Associated Press

C’est un royaume de viandards. Un pays où les tout-petits grandissent en mâchouillant des côtelettes d’agneau, où le traditionnel barbecue dominical a été érigé en art de vivre et où déguster une saucisse grillée les jours d’élection est un rituel tellement ancré dans les mœurs que l’expression « democracy sausage » figure dans le dictionnaire.

Pourtant, même en Australie, le véganisme progresse et les défenseurs de la cause animale ne cessent de gagner en visibilité.

« Les autorités protègent cette industrie lucrative en affirmant qu’elle respecte les normes de bien-être animal les plus élevées au monde. Ce qui est faux. » Brad King, fondateur de Farm Animal Rescue

Le 8 avril, ils ont pour la première fois mené une série d’actions coup de poing dans l’ensemble du pays, s’introduisant dans différents abattoirs et bloquant l’accès à l’un des principaux carrefours de Melbourne. Une journée de mobilisation qui a provoqué l’ire du premier ministre conservateur, Scott Morrison. Le chef du gouvernement est immédiatement monté au créneau pour dénoncer l’attitude « scandaleuse et anti-australienne » de ces militants. « Une forme d’activisme qui va à l’encontre des intérêts nationaux », s’est-il étranglé sur les ondes de la radio 2GB.

Sur l’île-continent, l’élevage compte pour 40 % de la production agricole et rapporte chaque année plus de 60 milliards de dollars australiens (38 milliards d’euros) à l’économie du pays. Le secteur s’appuie sur une forte demande locale et régionale, l’Australie étant l’un des premiers exportateurs de viande ovine et bovine de la planète.

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« Le problème, c’est que les autorités protègent systématiquement cette industrie lucrative en affirmant qu’elle respecte les normes de bien-être animal les plus élevées au monde. Ce qui est faux », s’agace Brad King, fondateur de Farm Animal Rescue. Il a participé à l’occupation d’un abattoir, où les militants végans, qui s’étaient enchaînés aux équipements, ont obtenu la libération de trois moutons. A travers ce type d’actions très médiatisées, ils espèrent pousser l’exécutif à imposer davantage de transparence dans le secteur.

Eleveurs excédés

Ils ont également appelé les consommateurs à regarder, à l’occasion des un an de sa sortie, le documentaire Dominion. Ce long-métrage, disponible en libre accès sur YouTube, a été réalisé par Chris Delforce grâce à des images tournées sur plusieurs années par des centaines de témoins et de militants dans les fermes et abattoirs australiens.

Il offre, à travers une série de séquences pour la plupart insoutenables, une rare plongée dans les réalités les plus sordides de l’élevage industriel. « Nous pensons qu’informer les gens sur ce qu’il se passe réellement dans ces endroits est l’outil le plus puissant dont nous disposions », explique Alix Livingstone, bénévole pour Aussie Farms, une organisation fondée par Chris Delforce et à l’origine de la journée d’action du 8 avril. Une semaine plus tard, quelque 65 000 personnes supplémentaires ont visionné le documentaire.

La proportion de végétariens a progressé régulièrement pour atteindre désormais environ 11 % de la population.

« C’est une vidéo de propagande qui passe totalement sous silence les bonnes pratiques de notre industrie », s’insurge Tony Mahar, directeur de la National Farmers’ Federation. « Les éleveurs aussi sont préoccupés par le bien-être animal, mais nous refusons que ces activistes, qui agissent en hors-la-loi, intimident, harcèlent et malmènent les fermiers australiens. » M. Mahar dit redouter des dérapages.

En février, un éleveur excédé par l’arrivée sur sa propriété de militants végans avait sorti une arme et tiré en l’air. Le mois précédent, la publication par Aussie Farms d’une carte interactive indiquant les adresses des fermes industrielles et des abattoirs sur l’ensemble du territoire avait déjà accru les tensions et ajouté à l’inquiétude ambiante.

Le premier ministre, Scott Morrison, a affirmé que le gouvernement était prêt à soutenir, en cas de démarches judiciaires, les éleveurs affectés par les agissements des militants végans qu’il a qualifiés de « criminels en col vert ».

« Nous parvenons enfin à nous faire entendre »

Opposé à toute forme de violence, l’activiste Brad King défend cependant l’utilisation de moyens illégaux. « Pendant dix ans, nous avons obéi aux lois. Quand nous découvrions des cas de cruauté envers les animaux dans des fermes ou des abattoirs, nous rassemblions des preuves, les envoyions aux autorités compétentes et attendions qu’elles agissent. Et il ne s’est jamais rien passé. Depuis que nous avons changé de mode d’action, nous parvenons enfin à nous faire entendre. »

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Ces dernières années, la proportion de végétariens dans un pays de plus en plus soucieux du bien-être animal, et de plus en plus préoccupé par le fort impact du secteur agricole sur les émissions de gaz à effet de serre, a progressé régulièrement pour atteindre désormais environ 11 % de la population.

Mais le véganisme, et plus particulièrement le combat de sa frange la plus radicale, suscite toujours hostilité et sarcasmes. En témoigne la riposte des amateurs de viande qui ont inondé la Toile de photos de bacon bien gras, de burgers dégoulinants et de pièces de bœuf encore saignantes.

Isabelle Dellerba (Sydney, correspondance)



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