[ad_1]
LETTRE D’ISTANBUL
En visite en Turquie, du jeudi 3 au samedi 5 septembre, Robert Spano, le président de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), en est reparti avec un diplôme, un doctorat honoris causa, qui lui a été décerné vendredi par l’Université d’Istanbul. Cette distinction a laissé un goût amer aux représentants de la société civile, affligés par ce qu’ils perçoivent comme un soutien au régime de la part du premier juge européen, censé pourtant être le garant de la CEDH, laquelle est régulièrement bafouée par la Turquie.
Appréciée du gouvernement, sa visite a provoqué la colère de nombreux internautes, excédés par sa décision de ne pas rencontrer de personnalités de l’opposition, de militants des droits de l’homme, de familles des prisonniers d’opinion. « Honte ! », « Scandale ! », « Déshonneur ! », ont fusé sur Twitter où le mot dièse #SpanoResign (#SpanoDémission) a fait son apparition. « L’homme a détruit en trois jours une réputation de trente ans », s’est ému le journaliste Can Dündar dans un tweet.
3 000 condamnations
Des commentateurs avaient imaginé que le juge européen profiterait de sa tournée pour faire passer un message de fermeté. D’autant que la Turquie est un client régulier de la CEDH, avec plus de 3 000 condamnations à son actif depuis 1959. Depuis la tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016, la situation n’a fait qu’empirer. La justice a perdu son vernis d’indépendance, ses décisions sont devenues arbitraires. Dans les prisons et les commissariats, la torture a refait son apparition. Ces abus ont été récemment documentés par le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT).
Mais dans l’enceinte de la vieille université stambouliote, M. Spano a pris soin d’esquiver les sujets qui fâchent. Son discours, prononcé face à un public trié sur le volet – pas d’étudiants, pas de journalistes –, ressemblait à un cours d’éducation civique pour élèves du secondaire. « La société ne peut progresser sans l’engagement critique de ses citoyens » ou encore « chaque être humain doit pouvoir penser librement pour s’épanouir et grandir ».
Pas un mot sur les quelque 6 000 universitaires limogés sur décret après le coup d’Etat manqué. « Qu’est-il venu faire à l’université d’Istanbul, où près de 200 enseignants ont été limogés de façon arbitraire ? », fulmine l’essayiste Mehmet Altan, qui a enseigné pendant trente ans au sein de cette même université avant d’avoir été démis de son poste au moment des grandes purges contre les intellectuels, entre 2016 et 2017.
Il vous reste 62.03% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
[ad_2]
Source link
Have something to say? Leave a comment: