Au Mali, Bamako se réveille dans l’attente

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Le colonel-major Ismaël Wague (au centre), porte-parole du Comité national pour le salut du peuple, annonce que ce dernier a pris le contrôle du Mali, mercredi 19 août 2020.

Jour d’après à Bamako. La capitale malienne s’est réveillée au petit matin sur les annonces du porte-parole des militaires, le colonel major Ismaël Wagué, chef d’état-major adjoint de l’armée de l’air, après la démission forcée du chef de l’Etat. « Nous, forces patriotiques regroupées au sein du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), avons décidé de prendre nos responsabilités devant le peuple et devant l’histoire », a déclaré à l’aube l’homme sur la télévision publique ORTM, avant d’affirmer que tous les accords internationaux du Mali seraient respectés et qu’une transition politique civile conduisant à des élections serait mise en place.

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La nuit a été étonnamment calme à Bamako. Les grins, ces lieux où les hommes se retrouvent d’ordinaire tard le soir pour palabrer ou jouer aux cartes, un verre de thé à la main, sont restés déserts dans les rues du quartier de Badalabougou, pourtant au cœur des manifestations quelques semaines auparavant. C’est là que le week-end du 10 juillet, entre onze et vingt-trois personnes avaient trouvé la mort selon les versions. Dans la nuit de mardi, seuls les crépitements des armes à feu rappelaient cette folle journée du 18 août.

A minuit, l’intervention du président Ibrahim Boubacar Keïta, annonçant sa démission sur la chaîne nationale, a clôturé l’acte I de cette nouvelle page d’histoire malienne en train de s’écrire en direct. « Si aujourd’hui il a plu à certains éléments de nos forces armées que cela devait se conclure par ma démission, ai-je réellement le choix que de m’y soumettre ? Car je n’ai jamais souhaité que le sang coule », a-t-il déclaré, ajoutant que les dissolutions de l’Assemblée nationale et du gouvernement prenaient effet au même instant.

« Pas eu d’effusion de sang »

Quelques heures plus tôt, déjà, des cris de joie résonnaient entre les murs de banco, cette terre crue qui sert aux constructions basses. La ville entière semblait n’avoir qu’une phrase sur les lèvres : « IBK a été arrêté. » Ce souhait était celui d’une partie des manifestants qui scandaient leur mécontentement tous les vendredis depuis le 5 juin. Des rassemblements ont pu être observés ici et là dans la capitale avec cris de liesse et tirs en l’air.

Dans l’après-midi, dans une grande confusion qui a duré plusieurs heures, des mutins du camp militaire de Kati, commune adjacente de Bamako, s’étaient en effet rendus au domicile du président de la République, arrêté aux côtés de son premier ministre, Boubou Cissé. Dans la capitale de 2,5 millions d’habitants, où la misère côtoie l’opulence et où le ressentiment contre une classe dirigeante est très fort, des scènes de pillage aux différents domiciles des représentants de l’Etat ont eu lieu.

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Une vidéo qui a fait le tour des réseaux sociaux montrait des enfants et des adolescents se baignant dans la piscine de Karim Keïta, fils du président et député très décrié ces dernières semaines. Plus tôt, les bureaux du ministre de la justice récemment nommé, Kassoum Tapo, avaient été vandalisés et incendiés.

En dépit du chaos ambiant, « il n’y a pas eu d’effusion de sang », se félicite un ingénieur quinquagénaire, présent sur place. Mobilisé depuis le premier jour au sein du Mouvement du 5 juin – Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), cette coalition hétéroclite composée d’acteurs religieux, de la société civile et de l’opposition, il avoue ne pas être surpris par le « coup de force » engagé par l’armée et estime que cette initiative des militaires est venue « parachever [leur] lutte ».

Transition démocratique indispensable

Depuis début juin, des centaines de Maliens prenaient la rue pour contester l’invalidation par la Cour constitutionnelle de l’élection de trente et un députés lors des législatives de mars et d’avril. Une goutte d’eau dans un océan de revendications. Depuis 2012, le Mali traverse une grave crise dans le nord et le centre du pays, ponctué de scandales dans les plus hautes sphères de l’Etat. « Alors, forcément, les gens ont commencé à être dégoûtés », assure l’ingénieur, qui attend du M5-RFP « la formation d’un gouvernement d’union nationale après des élections crédibles et une refondation du Mali avec une nouvelle Constitution ».

Mais qui du M5-RFP ou des militaires putschistes prendra le pouvoir désormais vacant ? Pour Issa Kaou N’Djim, coordinateur général de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Dicko (CMAS), organisation à la tête du M5-RFP, une transition démocratique est indispensable : « Nous nous incluons dans la légalité et nous ne faisons pas de cette situation un combat personnel. »

Une proposition qu’a volontiers acceptée le CNSP, expliquant lors de son discours que « la société civile malienne et les mouvements sociopolitiques sont invités à nous rejoindre pour qu’ensemble nous créions les meilleures conditions d’une transition politique civile » et tendant ainsi la main aux contestataires des premiers jours.

En guise de menace, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), opposée à « tout changement politique et anti-institutionnel », a annoncé dans un communiqué « dénier toute forme de légitimité aux putschistes » et décider « de la fermeture de toutes les frontières terrestres et aériennes ainsi que l’arrêt de tous les flux et transactions économiques, commerciales et financières entre les pays membres de la Cédéao et le Mali ».

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